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La diversité des opinions morales est-elle une justification suffisante du scepticisme moral ?

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« La diversité des opinions morales est la constatation du fait que selon les époques et les pays, les valeurs de bien et de mal, de juste et d'injuste, de vice et de vertus, varient radicalement.

Les valeurs morales ne semblent pas universelles, mais bel et bien diverses selon les nations, et au sein d'une même nation, selon l'époque envisagée. Une justification suffisante est une preuve qui suffit à rendre raison, notamment, d'un principe.

Il s'agit d'un argument qui permet de déterminer le caractère juste, avéré, d'une position de pensée ou d'une action. Le scepticisme moral est la position morale qui consiste à dire qu'il n'y pas de valeur universelle, mais, précisément, uniquement des opinions morales : c'est-à-dire des discours variés, souvent contradictoires, sur les mêmes objets.

Le scepticisme moral se caractérise par l'impossibilité proclamée à déclarer quoique ce soit de certain sur les questions morales, et sa position caractéristique est celle du doute. Rien n'est ni bon, ni mauvais : tout passe pour tel, sans raison valable. Nous nous demanderons si l'argument de la diversité des opinions morales est suffisant pour justifier cette position philosophique, qui consiste à dire qu'il faut douter de tout en matière de morale. I. a. La diversité des opinions morales est un argument décisif pour justifier le scepticisme moral. Une diversité en fonction des pays et des époques Qu'entendons-nous par diversité morale ? La diversité morale est la pluralité des opinions, contradictoires souvent, sur les mêmes objets. Il se peut en effet que ce que nous appelons crime en France, aujourd'hui, ne soit pas considéré comme tel à l'étranger ou à une autre époque.

Personne mieux que le marquis de Sade n'a théorisé la diversité des opinions morales.

Voici ce que l'un des personnages du roman Libertin intitulé Histoire de Juliette déclare à ce sujet : « On appelle crime, toute contravention formelle, soit fortuite, soit préméditée, à ce que les hommes appellent les lois ; d'où, tu vois que voilà encore un mot arbitraire et insignifiant ; car, les lois sont relatives aux mœurs, aux climats, elles varient de deux cent lieues, en deux cent lieues, de manière, qu'avec un vaisseau, ou des chevaux de poste, je peux me trouver, pour la même action, coupable de mort le dimanche matin à Paris, et digne de louanges, le samedi de la même semaine, sur les frontières d'Asie, ou sur les côtes d'Afrique ». b. Un scepticisme moral qui aboutit à la valorisation absolue de la nature Une telle diversité ne peut que justifier le scepticisme moral, c'est-à-dire la position de doute absolu relativement au question de morales (ce qui est bien, bon, juste ou injuste, vertueux ou vicieux).

En effet, si rien n'est intrinsèquement bon, ou mauvais, mais que tout peut passer pour bon ou mauvais en fonction des mœurs et des climats qui ont formé ces dernières, alors il devient impossible de tenir le moindre discours fondé en raison sur la morale.

Il ne reste à l'individu qu'à suivre l'inspiration de la nature, qui a fait de lui un homme enclin à tel type de plaisir, sans considérer le caractère bon ou mauvais de ses actions, qui tient uniquement à des conventions toutes relatives. II.

La diversité des opinions morales est une thèse contestable, donc insuffisante pour justifier le scepticisme moral a. L'universalité cachée des principes moraux Cependant, nous dirons ici qu'il est possible que la diversité des opinions morales recouvre l'universalité de certains principes.

En effet, si nombre de positions morales sont contradictoires dans le monde, il n'en existe pas moins des opinions reçues par l'ensemble des peuples.

Pensons à la prohibition universelle de l'inceste mise en lumière par Lévi Strauss comme un invariant culturel.

Mais surtout à la thèse de Kant en matière de morale : contre la diversité des opinions dispersées, celui-ci oppose l'universalité d'une maxime en particulier : « Fais en sorte que la maxime de ton agir puisse être universalisée ».

Sans doute avons-nous là une pierre de touche de la morale, un principe sur lequel fonder des certitudes, et lutter contre le scepticisme moral. b. Un scepticisme moral dont il convient de douter à son tour En effet, à partir du moment où nous avons remis en cause la thèse d'une diversité absolue des opinions morales, puisqu'il existe des opinions partagées par toutes les nations et en tous temps sur ce qui est bon et ne l'est pas, le scepticisme moral devient une thèse contestable.

De même que Descartes sort du doute hyperbolique en découvrant la certitude du cogito, nous pouvons sortir du scepticisme moral en montrant que la pierre de touche du bien et du mal est la maxime suivante : est bonne toute action dont nous serions prêts à devenir le patient. III.

Le scepticisme moral est à refuser, plutôt qu'à réfuter, pour des raisons pragmatique a. L'extrême danger incarné par le scepticisme moral Cependant, il convient de lutter contre le scepticisme moral pour des raisons pragmatiques.

En effet, celui-ci représente un danger considérable s'il est pris comme le principe d'actions concrètes.

Si tout est indifférent en matière de morale, pourquoi nous gênerions nous pour tuer, voler, violer ? Il n'y a en effet aucun mal à commettre de telles actions, puisqu'elles ne sont pas mauvaises en elles mêmes, mais dans notre seule opinion.

Les livres de Sade sont pleins d'individus qui tirent les conclusions pratiques, cruelles, de leur scepticisme moral. b. Refuser le scepticisme moral au nom de la pérennité de la société Nous dirons donc que, quand bien même notre thèse sur l'universalité de certains principes moraux serait erronée, il ne convient pas de faire de la diversité des opinions morales la justification du scepticisme moral. Dans la mesure où celui-ci est dangereux, nous venons de le voir, nous soutiendrons donc une thèse de conformisme moral : il faut suivre les opinions morales de son pays, de son temps, car celles-ci règlent la puissance de destruction et de cruauté illimitée de l'individu, et contribuent à préserver la société. Conclusion : A première vue, la diversité des opinions morales étant avérée, elle justifie le scepticisme moral : si tous les peuples ne s'accordent pas sur le bon et le juste, alors celui-ci est douteux, et il ne nous reste qu'à écouter les impulsions de notre nature.

Cependant, il existe certains principes moraux universels qui empêchent de justifier le scepticisme moral.

Et quand bien même ces derniers seraient faux, le scepticisme moral doit être refusé dans l'intérêt de l'individu et de la société.. »

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