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Kant, critique de la théologie rationnelle

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Kant, critique de la théologie rationnelle

   Des preuves à propos de Dieu ?    Dieu existe-t-il ? N'est-il qu'une illusion destinée à se rassurer ? La discussion philosophique est âpre au sujet de Dieu. Les partisans de l'existence de Dieu ne manquent pas d'arguments. La tradition en a retenu trois. Les deux premiers sont extérieurs et concernent le monde.

« Kant, critique de la théologie rationnelle Des preuves à propos de Dieu ? Dieu existe-t-il ? N'est-il qu'une illusion destinée à se rassurer ? La discussion philosophique est âpre au sujet de Dieu.

Les partisans de l'existence de Dieu ne manquent pas d'arguments.

La tradition en a retenu trois.

Les deux premiers sont extérieurs et concernent le monde.

Le troisième est intérieur et concerne les idées*.

S'agissant du monde, il y a deux façons de prouver que Dieu existe.

La première consiste à partir de l'imperfection du monde.

La seconde consiste à partir au contraire de la perfection décelable dans le monde.

S'agissant de l'imperfection du monde, celle-ci est bien un signe de l'existence de Dieu.

Considérons un instant, en effet, l'argument couramment employé par ceux qui ne croient pas en Dieu. Dieu n'existe pas, disent-ils, car c'est la nature* qui est Dieu.

Il s'agit là d'une position « panthéiste », qui se heurte à une contradiction.

Si la nature, en effet, était Dieu, ne devrait-elle pas être parfaite ? À l'évidence, il y a en elle des imperfections. C 'est donc qu'elle n'est pas parfaite et divine et que Dieu se trouve ailleurs.

De même, considérons, cette fois-ci, la perfection de la nature.

À l'évidence, un accident n'a pas pu créer un monde aussi organisé et aussi intelligent que le nôtre.

À l'évidence, le monde ne fait rien en vain et ne va pas nulle part.

N'est-ce pas là le signe manifeste qu'il existe une cause intelligente organisant tout ce qui existe dans le monde ? Enfin, considérons nos pensées.

Nous avons en nous l'idée de perfection.

La perfection ne possède-t-elle pas par définition toutes les qualités ? Ne possède-t-elle pas, par là même, celle d'exister ? Les réticences de Kant Kant n'a pas été convaincu par ces preuves de l'existence de Dieu.

Certes, dira-t-il dans les antinomies de la « Raison pure », chapitre de la Critique de la raison pure , il n'est pas rationnel de considérer que la nature est Dieu.

Mais dire que Dieu existe est-il pour autant possible ? Ne dit-on pas que Dieu existe pour se représenter la nature et son commencement, et non parce que l'on a effectivement rencontré un Dieu existant et vivant ? De même, il n'est pas faux de considérer que la nature n'a pas pu surgir par hasard, tant il y a de perfection en elle.

Devons-nous pour autant conclure que l'idée de Dieu, qui nous permet de penser la nature, n'est autre que Dieu lui-même ? V oyons-nous Dieu parce que nous voyons la perfection qui réside dans la nature ? Enfin, il n'est pas faux de dire que, si Dieu existe, celui-ci doit avoir toutes les qualités, dont l'existence.

Mais, quand j'ai l'idée d'une existence, est-ce là l'existence elle-même ? Et, quand j'ai affaire à l'existence, est-ce à une idée que j'ai affaire ? Un idéal régulateur Kant s'est parfaitement rendu compte d'une erreur majeure que nous faisons quand nous parlons de Dieu.

Nous confondons sans cesse le discours que nous pouvons tenir sur Dieu avec Dieu lui-même.

A insi, ce n'est pas parce que nous avons l'idée que la nature n'est pas Dieu–parce qu'il existe une perfection à l'origine de la nature ou parce que l'idée de Dieu implique nécessairement que Dieu existe– que Dieu existe effectivement.

Est-ce à dire que Dieu n'a aucun rôle à jouer en philosophie ? Nullement.

Nous ferions moins d'erreurs si nous envisagions Dieu comme un idéal régulateur, écrira Kant, et ce pour deux raisons.

Imaginons en effet que Dieu soit simplement celui dont on a l'« idée » à propos du spectacle de la nature ou d'une méditation personnelle; Dieu redeviendrait une réalité «extraordinaire» que nos expériences ou nos méditations nous permettraient d'aborder comme tel.

Tout serait alors « régulé », autrement dit à sa place : l'homme avec ses expériences et ses méditations, Dieu avec son visage extraordinaire. Le raisonnement de Kant, illustré par l'exemple des «cent thalers », consiste à démontrer l'impossibilité de prouver l'existence réelle de Dieu par l'argument ontologique que Descartes a formulé rigoureusement. Le argument ontologique soutient qu'il y a un passage logique du concept d'un être parfait à l'existence de cet être.

Soit la définition possible, c'est-à-dire pensable sans contradiction, d'un être parfait.

On peut, comme un mathématicien le ferait, déduire de cette définition ses conséquences, parmi lesquelles se trouve le fait pour cet être...

d'exister.

S'il était privé de l'existence, il ne serait plus parfait, puisqu'il lui manquerait quelque chose.

Donc cet être existe.

L'argument peut-il devenir valable pour un autre genre d'être? Les objets mathématiques, pures idéalités, offrent un premier terrain pour comprendre l'argument et l'erreur que dénonce Kant. Il est ainsi contradictoire de considérer un triangle dont la somme des angles ne serait pas égale à la valeur de deux angles droits, puisque telle est la définition même du concept de triangle.

Mais Kant réfute qu'on puisse déduire l'existence du triangle de son essence : du penser à l'exister, il y a un saut et non pas un passage.

S'il est contradictoire de se donner le triangle et d'en nier les qualités (l'égalité à deux droits de la somme de ses angles), il n'y a aucune contradiction à supprimer ensemble le prédicat (l'égalité...) et le sujet (le triangle).

Il est impossible que la somme des angles d'un triangle ne soit pas égale à deux droits, mais il n'est pas nécessaire que quelque chose comme un triangle existe ! En va-t-il de même avec l'être parfait? Oui, selon Kant.

C ent thalers — monnaie prussienne de l'époque de Kant —, un triangle et Dieu sont en tout point comparables du point de vue de leur existence pensable.

Dans tous les cas, il faut faire la différence entre une possibilité logique et une possibilité réelle. C ent thalers possibles et cent thalers réels donnent droit aux mêmes prestations.

Mais si vous ne pouvez pas les échanger, si vous ne les détenez qu'en pensée, vous n'obtenez réellement rien.

V ous possédez « en pensée » tout ce qui pourrait «réellement» vous appartenir.

La possibilité réelle implique un accord avec les conditions de l'expérience.

Or, dans le possible, aucune intuition sensible, aucune expérience de l'objet ne m'est donnée. L'erreur dénoncée par Kant consiste à traiter l'existence comme un prédicat de même nature que les autres.

Le concept d'être parfait est celui d'un être tel qu'il n'entre dans sa définition que des affirmations.

Considérer son existence comme non nécessaire aboutirait à une contradiction Donc il existe.

Mais la possibilité démontrée n'est qu'une possibilité logique ou conceptuelle.

L'existence ici affirmée n'est qu'une existence en idée.

Or, l'existence est irréductible à un concept: elle est une position.

C 'est l'ensemble des prédicats du sujet, mais tels qu'ils sont ensemble posés ou donnés dans l'existence.

Il s'agit en toute chose de ne pas confondre ce qu'elle est (son essence) et le simple fait qu'elle soit là (son exis tenc e, ou Das ein).. »

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