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Je est-il un autre?

Publié le 13/05/2024

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« Je est-il un autre? « Connais-toi toi-même » reprend Socrate.

Cette maxime illustre la quête de se connaitre soi-même qui est une recherche intemporelle auquel s’est confronté tout individu, et qui a été et est toujours un sujet de débat entre les philosophes à travers l’Histoire.

Cette quête implique inévitablement de comprendre ou en tout cas, tenter de comprendre et définir ce qui fait de nous ce que nous sommes. Sur cette note, se connaitre soi-même entraine la compréhension du ‘Je’.

Ce présupposé indique déjà que l’homme se définit en tant que sujet ; un être pensant tant qu’il sait être lui-même auteur de ses pensées, paroles et actes.

Ainsi ce ‘Je’ est l’affirmation de l’état de l’homme en tant que sujet et qui se reconnait comme tel, en plus de l’utiliser pour essayer de se définir soi-même ou son identité.

D’un autre côté, l’autre est généralement considéré comme étant différent de soi ; il correspond, pour ce ‘soi’, à un étranger.

Il est même possible de dire que logiquement, l’autre se comprend et se définit par opposition au ‘soi’. Il parait alors étrange de poser la question si ce qui, supposément, nous définit est alors différent ou étranger à nous-même.

Toutefois, quoiqu’une réponse négative puisse apparaitre comme une solution simple et vraisemblablement approprié, le sujet ouvre des portes à plusieurs autres questions: qu’est-ce qui nous définit réellement ? Est-il même possible de savoir qui on est ? Dans ce cas, ou réside la légitimité de définir l’autre ou autrui si se définir soi-même se révèle déjà être une tâche complexe ? Ainsi l’autre qui par définition est différent de soi, n’est-il peut être pas l’élément essentiel à la connaissance de soi ? Pourrait-il même être plus semblable à soi que l’on pourrait croire avec notre compréhension de nous-même qui parait limité ? Il s’agira donc dans une première partie de voir que le ‘Je’ se retrouve dans autrui en tant que marqueur de la subjectivité tout en lui permettant de pouvoir entretenir un lien essentiel au soi et pour le soi.

Toutefois, la partie suivante montrera que ce raisonnement pose des limites car le ‘Je’ en tant qu’outils qui permet de définir son identité n’est vraisemblablement pas un autre.

Finalement, dans une troisième partie, il s’agira de voir que l’incapacité de l’homme à comprendre concrètement qui il est ouvre une porte sur la possibilité d’admettre que le ‘Je’ comprend quelque chose de différent, extérieur à soi. En premier lieu, le ‘Je’ apparait et réside dans l’autre, en tant qu’autrui, et entretient alors une dynamique importante avec le ‘soi’.

En effet, en tenant compte qu’autrui est exclusivement un être humain comme le soi, celui-ci « Possède[...] le Je dans sa représentation » comme le dit Kant.

Effectivement, autrui autant que soi, possède la subjectivité soit la capacité d’être un sujet puisqu’il est un être humain et seul cette espèce peut en faire usage.

Ainsi, cet être étranger partage aussi la caractéristique fondamentale du sujet pensant : l’IPSEITE.

Il est capable en d’autres mots de se reconnaitre lui-même comme étant seul et identique car autrui qui est autant humain que soi, est pour lui-même un soi.

Toutes les interactions que les hommes ont entre eux, leur capacité à s’identifier les uns aux autres, et même la capacité à ressentir de l’empathie dans la généralité des cas ; tous ces éléments qui sont partagés par l’autre et par soi indiquent qu’autrui est autant sujet que ‘soi’ pour sa propre personne.

Bref, ce que subit ou comprend le soi sur lui- même est le même processus pour l’autre.

De ce fait, ce dernier a aussi conscience de lui-même.

Quoiqu’on ne puisse pas se projeter dans l’esprit de quelqu’un d’autre pour le vérifier, il est bien claire que quiconque qui puisse comprendre le cogito cartésien de Descartes admet cette conscience de soi ; en assimilant cette vérité première, n’importe quel individu a une preuve concrète qu’il est capable de se prendre soi-même en tant qu’objet.

Il est évident que cette preuve n’est qu’une indication et ne nie pas la capacité des autres à prendre conscience d’eux-mêmes même si ils n’ont jamais fait face au cogito cartésien.

De ce fait, un autre indicateur tout aussi valide est l’apprentissage des langues : « Toutes les langues, lorsqu’elles parlent a la premier personne, doivent penser ce Je » dit Kant.

Effectivement, selon le philosophe allemand, la conscience de soi, propre de l’être humain, s’opère grâce à l’apprentissage des langues.

En effet, qu’une personne parle anglais, français, mandarin ou quelque langue, il existe toujours un équivalent linguistique pour exprimer cette première personne.

Ainsi, le Je en tant qu’indicateur de la subjectivité d’un être humain est présent dans ‘l’autre’.

De plus, ces points communs sont corrélés a la relation dynamique et quasi dépendante qui se joue entre le ‘soi’ et autrui. En effet, le ‘Je’ et autrui soit le ‘Tu’, apparaissent complémentaires.

Le Tu se définit alors par une existence plus précise qu’un simple ‘autre’ ; il est l’entité avec laquelle le Je qui représente le ‘soi’, interagit et fonde sa vision du monde.

En effet, le ‘Je’ base sa propre personne, par imitation, sur l’autre. René Girard le dit bien : « Le rival est le modèle du désir [de l’homme] » c’est-àdire que l’homme ne vient à désirer une chose que parce qu’il reconnait qu’une autre personne le désire.

Il base effectivement son comportement sur une logique d’imitation inconsciente d’autrui.

Cette logique se trouve aussi en sociologie pour expliquer les comportements de consommateurs qui achètent des produits seulement car d’autres personnes l’ont acheté.

Toutefois, ce raisonnement amène à se poser la question : Où réside notre originalité ? Kant précise que l’unicité c’est-àdire le fait d’être unique fait, entre autres, de l’homme une seule et même personne.

Pourtant si nos comportements ne sont que le fruit de facteurs sociaux, la définition de l’homme même est remise en cause.

Par ailleurs, comme l’illustre Michel Tournier dans Vendredi ou les limbes du Pacifique, les personnages de fond dans le paysage d’un peintre « donnent l’échelle » au personnage principal.

Ils lui fournissent une base de comparaison, des repères au personnage principal, soit au ‘Je’ pour qu’il puisse se construire sa propre personne.

En conséquence, le ‘Je’ nécessite bien un autre pour affirmer certains éléments de sa personne qui fait de lui ce qu’il est.

Par exemple, la bonté, la générosité, l’empathie sont vaines s’il n’y a pas de récepteur à qui les diriger.

Par conséquent, il est logique qu’une personne privée de ces repères, soit de ‘l’autre’, vienne à perdre la tête.

Cette situation est représentée dans le film Cast Away avec Tom Hanks dont le personnage, isolé sur une ile au milieu de l’océan, se résout à personnifier un ballon pour se donner l’illusion qu’il interagit avec autrui.

De plus, cet exemple est encore plus pertinent dans l’actualité du COVID-19 où il a été remarque que la santé mentale des personnes vivant seules s’est dégradée considérablement pour la majorité.

Ainsi se soulève une nouvelle question : l’Homme peut-il exister sans l’autre, sans autrui ? Bref, Le ‘Je’ réside dans autrui en tant que marqueur de la subjectivité puisqu’autrui est tout autant un ‘soi’ pour lui que notre ‘soi’ l’est à nous-même.

De plus le ‘Je’ base, vraisemblablement, une partie de qui il est sur autrui.

N’est-il pas alors le reflet de l’autre ? Toutefois, cette première approche du problème est bel et bien incomplète car il n’est pas possible de ne pas prendre en compte les observations évidentes qui attestent que le ‘Je’ est diffèrent de l’autre. Effectivement, un simple regard jeté autour de nous atteste bien que chaque individu est différent des autres par sa physiologie et ce qui fait pour chacun qu’il est différent des autres.

On distingue alors le ‘Je’ d’autrui selon le fait que ce ‘Je’ soit un outil de définition de l’identité personnelle.

En effet, chaque être humain possède un patrimoine génétique différent les uns des autres, une enveloppe corporelle qui n’existe pas en double dans le monde.

Même les jumeaux ne partagent pas des séquences génétiques complètement identiques quoiqu’elles soient très similaires.

De plus, plusieurs personnes mentionneraient leurs traits de personnalité ou de caractères pour les différencier du reste de la population.

Ces « qualités » selon Pascal font ce que chaque individu considérerait comme unique et originale.

Dans le film The Double par exemple avec l’acteur Jesse Eisenberg, le personnage principal se confronte à un double identique qui pourrait rendre difficile la tâche de les différencier.

Cependant, l’adaptation se fait très rapide car son double est un personnage charismatique et social.

Tout le contraire de l’original qui est timide et introverti.

Ce sont bien les qualités divergentes des deux qui témoignent de la distinction entre leurs deux identités.

Par ailleurs, ces différences ne se limitent pas qu’aux comportements mais aussi aux manières de pensée, de voir le monde.

Par exemple, un stoïcien et un épicurien ne trouvent tous deux pas qu’il faut satisfaire ses désirs pour être heureux.... »

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