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Inviterai-je un anthropophage chez moi ?

Extrait du document

« Le sujet malgré sa formulation étrange pose une question sur le rapport entre les différentes cultures.

Le cannibalisme est en effet une pratique bien éloignée de celles pratiquées dans la culture occidentale, il est même condamné.

La question consiste donc à savoir si nous pouvons légitimement condamner ou accepter les pratiques d'autres cultures.

Nous sommes nous même issu d'une culture spécifique, ne l'oublions pas, à de nombreux égards nous paraissons sûrement aussi étranges aux cannibales que l'inverse.

De quel droit pouvons nous prétendre nous imposer aux autres cultures comme modèle de normalité ? Cependant une position du type « à chacun sa culture » ne consiste-t-elle pas à morceler le genre humain ? Si le genre humain est une unité il doit bien y avoir pour celui-ci des règles de droit valant pour tous. I. Montaigne et le relativisme culturel Nous sommes tous issu d'une éducation particulière, chacun est éduqué avec des valeurs morales qui correspondent à une époque et à un lieu donné.

Ce qui nous choque ne choquera pas quelqu'un avec un système de valeur différent du notre.

La question est de savoir si on peut dire qu'un système de valeur s'impose en regard d'un autre, ce qui est choquant pour nous ne l'est pas pour tous, qui est dans le juste ? Montaigne est un philosophe sceptique, il doute de l'existence d'un bien et d'un mal en soi, il y a des lois et des coutumes ceux qui les enfreignent sont punis.

Mais à la question de savoir quelles sont les coutumes qui sont les meilleures Montaigne nous met en garde, toutes les coutumes se valent, que celles qui sont en place le restent, ce n'est pas qu'elles sont les meilleures, mais puisque aucunes ne valent mieux autant conserver les mêmes.

On connaît la célèbre citation de Montaigne « Vérité en dessus des Alpes, fausseté en deçà », il n'y a donc pas de vrai ni de faux seulement des coutumes établies qui diffèrent toutes selon le lieu.

Montaigne nous donne donc une grande leçon de tolérance ce qu'on nous a appris n'est peut-être pas autre chose qu'une certaine coutume qui nous est relative.

Nous voyons tout à travers un prisme, celui de notre culture nous n'avons pas de regard objectif, nous ne pouvons pas condamner les autres cultures parce que c'est uniquement de notre point de vue que certaines pratiques sont choquantes.

En conséquence il faut se contenter de reconnaître la variété des cultures sans se permettre de juger des cultures différentes des nôtres. TRANSITION Montaigne nous invite donc à beaucoup de prudence concernant notre droit à critiquer les cultures qui ne sont pas les nôtres.

Nous ne sommes pas la norme vers laquelle toute culture doit s'efforcer de tendre.

Cependant si on accorde que nous ne constituons pas un modèle, n'y a-t-il pas quelque chose de problématique à supposer que des hommes en différents milieux culturels n'ont rien de commun ? Sans prétendre régir les autres civilisations les hommes ne sont-ils pas tous des êtres raisonnables et en tant que tels soumis à des règles, celles de la raison. II. Kant Les règles de droit valent pour tout homme La question à présent est de savoir s'il n'y a pas des règles au-delà des différences de culture qui puissent valoir pour tous les hommes.

Les hommes ne sont pas seulement les produits de leur culture, ils sont aussi des individus raisonnables et en tant que tels ils ont en commun une même raison.

Dès lors au lieu d'un relativisme culturel on aboutit à une universalité des règles que prescrit à chacun sa raison.

Le relativisme de Montaigne empêche de critiquer des pratiques telle que l'excision, à chacun sa culture.

Pour Kant ce relativisme ne vaut pas, quand la maxime d'une action ne peut pas être universalisée on dispose là d'un outil pour dire que cette action est injuste.

On voit ici que Kant refuse une position relativiste.

Pour Kant notre raison reconnaît que les actions dont la maxime n'est pas universalisables sont des actions injustes.

On voit ici s'opposer au relativisme culturel, un universalisme basé sur la nature de chacun en tant que sujet raisonnable.

Kant permet de critiquer certaines coutumes, ou pratiques, non pas en les critiquant parce qu'elles sont choquantes pour nous mais bien pour tout être raisonnable.

Montaigne nous prévenait contre un risque « culturo-centriste », ici Kant ne souffre cependant pas de critique en s'appuyant sur la raison et pas sur notre propre culture.

Malgré la reconnaissance que chaque culture est différente on possède ici un moyen de condamner certains actes en tant que non raisonnables. TRANSITION Critiquer une autre culture ce n'est donc pas nécessairement faire de sa propre culture un modèle.

Notre critique peut se référer à la raison et pas à notre propre culture.

Tout ne peut donc pas être accepté, même si notre culture ne constitue pas un modèle. III. Relativisme et colonialisme Notre sujet nous met aux prises avec deux positions.

La première consiste à tout accepter d'une culture et s'interdire tout ingérence, puisque cette culture et la notre sont différentes nous n'avons rien à en dire.

La seconde position consiste à refuser une telle attitude attentiste et à intervenir quand des choses inadmissibles sont produites.

La question est en fait de distinguer pour quelles raisons une pratique nous paraît inadmissible.

Cette pratique nous paraît-elle choquante vis-àvis de notre propre culture, ou en regard à la seule dignité humaine ? Il semble inacceptable aujourd'hui d'affirmer qu'il faut tout respecter, que notre droit ne va pas jusqu'à se mêler de ce qui ne nous concerne pas.

Tolérer tout est n'importe quoi semble une position suicidaire.

Cependant les critiques concernant d'autres cultures doivent se garder de tout ethnocentrisme.

Il faut distinguer la critique de pratiques portant atteintes à la dignité humaine, d'une glorification de notre modèle de société.

Il ne s'agit pas de privilégier notre modèle de société en tant que plus civilisé, pour autant on ne doit pas s'interdire la défense de la dignité humaine tout en reconnaissant la différence des cultures.. »

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