Epictète (citation sur le déterminisme et la liberté
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«
"Ne cherche pas à faire que ce qui arrive, arrive comme tu le désires;
veuille, au contraire, ce qui arrive comme il arrive.
Alors tu jouiras de
la paix intérieure..." ÉPICTÈTE
Épictète (50-125), philosophe stoïcien de langue grecque, né à Hiérapolis,
dans la région occidentale de l'actuelle Turquie, passe à Rome une partie
de sa vie, puis (vers 94) il fonde une école philosophique à Nicopolis, sur la
côte ouest de la Grèce, où il enseigne, entouré de disciples, jusqu'à sa
mort.
Son enseignement prolonge, sur le plan de la morale, une réflexion
engagée, à Athènes, dès le troisième siècle avant J.-C., avec Zénon de
Citium, fondateur de l'école stoïcienne, et ses successeurs : Cléanthe et
Chrysippe ; et reprise à Rome par ce qu'il est convenu d'appeler le « moyen
stoïcisme ».
Épictète assure un enseignement strictement oral, mais ses
leçons et les discussions qui s'ensuivent sont recueillies sous le nom
d'Entretiens.
Ces Entretiens ont été rédigés par Flavius Arrien (95-175), général grec,
homme politique et historien qui, à ses heures libres, ne dédaigne pas
d'apprendre la philosophie auprès d'un maître tel qu'Épictète.
Mais les huit
livres qu'il rédige (dont quatre sont parvenus jusqu'à nous) sont trop longs
pour être un simple ouvrage d'initiation, et c'est à partir d'eux qu'est
composé un ouvrage très court, formé d'une série de quelque cinquante
paragraphes, qui porte le nom grec d'Enchiridion, le plus souvent traduit par
Manuel, au sens de l'objet qu'on porte sur soi.
C'est au paragraphe VIII que l'on trouve ce texte :
« Ne cherche pas à faire que ce qui arrive, arrive comme tu le désires ; veuille, au contraire, ce qui arrive comme
il arrive.
Alors tu jouiras de la paix intérieure.
»
Ce qui est posé ici, c'est le rapport que l'homme est capable de tenir entre les choses telles qu'elles adviennent
et son propre désir.
C'est déjà un thème que l'on trouve chez Platon, dans un passage des Lois où, dans le
dialogue avec l'Athénien, cherchant ce qui est convenable pour la Cité, un certain Mégillos déclare :
« Il ne faut pas demander instamment que tout obéisse à notre désir, sans que notre désir obéisse davantage à
notre raison ; ce qu'une cité et chacun de nous doivent hâter de leurs voeux, c'est d'être raisonnable » (Livre III,
687 e).
C'est aussi cette référence à la raison que l'on trouve, presque mot pour mot, dans un autre texte d'Épictète où
s'opposent les points de vue de l'insensé et du sage.
Le fou déclare :
« L'homme libre est celui à qui tout arrive comme il le désire.
Comme lui, je veux aussi que tout m'arrive comme il
me plaît.
»
Ce à quoi le philosophe répond :
«Eh ! mon ami, la folie et lu liberté ne se trouvent jamais ensemble.
[...] La liberté consiste à vouloir que les
choses arrivent, non comme il te plaît, mais comme elles arrivent» (Entretiens, Livre I, Chap.
12).
Mais si des textes, ici ou là, dans la philosophie grecque et plus encore chez les stoïciens, se ressemblent sur ce
point, c'est parce qu'ils répondent à un principe unique.
Ce principe, on le trouve en tête du Manuel (et
également dans le chapitre I des Entretiens), dans la distinction fameuse des choses qui dépendent de nous et
des choses qui ne dépendent pas de nous.
Pour le philosophe, les choses qui dépendent de nous sont nos
opinions, nos désirs, nos aversions, « en un mot, tout ce que nous faisons ».
Les choses qui ne dépendent pas de
nous sont le corps, les richesses, la réputation, les honneurs, « en un mot toutes les choses qui ne sont pas du
nombre de nos actions ».
Une telle alternative sert de crible parfaitement efficace pour éprouver la valeur de ce qui advient.
Les choses qui
arrivent de l'extérieur dépendent-elles de nous ? Certainement pas.
Dès lors, nous devons les considérer comme
hors de notre pouvoir.
Car les choses qui ne dépendent pas de nous échappent à notre volonté libre.
L'homme qui
s'attacherait à ces choses deviendrait faible, esclave, dépendant, insensé.
Plus encore, il nous faut admettre que
les choses extérieures, puisqu'elles ne dépendent pas de nous, ne sont rien.
Ce que nous croyons apprécier, ce
ne sont pas les choses, mais seulement l'opinion que nous en avons.
Et c'est là l'origine de nos troubles, de nos
souffrances, de nos malheurs.
Épictète l'affirme :
« Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions qu'ils en ont [...] Lors donc que nous
sommes traversés, troublés ou tristes, n'en accusons pas d'autres que nous-mêmes, c'est-à-dire nos opinions»
(Manuel, V ).
Mors, mis en garde contre le trouble (taraxé), nous
pourrons, comme le sage, écarter de nous les opinions vides et atteindre la véritable sagesse.
En effet, chez les
stoïciens, la vie du sage parvenu au sommet de la perfection consiste à jouir d'une constante et complète
ataraxie (a — taraxé, c'est-à-dire absence de trouble).
Mais parvenir à de tels sommets, ce n'est pas, comme on
le croit parfois hâtivement, se retirer du monde, ou plus simplement manifester une vague indifférence sceptique.
Certes, celui qui progresse vers la sagesse donne parfois l'image d'un homme à l'écart du monde :
«Il ne blâme personne, il ne loue personne, il ne se plaint de personne, il n'accuse personne, il ne parle pas de lui
comme s'il était quelque chose, ou qu'il sût quelque chose ; quand il trouve quelque obstacle ou quelque
empêchement à ce qu'il veut, il ne s'en prend qu'à lui-même» (Manuel, XLVIII).
Mais l'homme en marche vers la sagesse doit, plus profondément, et plus difficilement sans doute, être « en.
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