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Blaise PASCAL

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Nous ne tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l'avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l'arrêter comme trop prompt, si imprudents que nous errons dans des temps qui ne sont point nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient, et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et [laissons] échapper sans réflexion le seul qui subsiste. C'est que le présent d'ordinaire nous blesse. Nous le cachons à notre vue parce qu'il nous afflige, et s'il nous est agréable nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l'avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance pour un temps où nous n'avons aucune assurance d'arriver. Que chacun examine ses pensées. Il les trouvera toutes occupées au passé ou à l'avenir. Nous ne pensons presque point au présent, et si nous y pensons ce n'est que pour en prendre la lumière pour disposer de l'avenir. Le présent n'est jamais notre fin. Le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. Blaise PASCAL

« La mutuelle tromperie entre les hommes - PASCAL Si Pascal affirme que les hommes ne font que se mentir entre eux, ce n'est pas qu'ils sont foncièrement mauvais mais que le mensonge est nécessaire à l'amour-propre de chacun. "La vie humaine n'est qu'une illusion perpétuelle ; on ne fait que s'entretromper et s'entre-flatter.

Personne ne parle de nous en notre présence comme il en parle en notre absence.

L'union qui est entre les hommes n'est fondée que sur cette mutuelle tromperie ; et peu d'amitiés subsisteraient, si chacun savait ce que son ami dit de lui lorsqu'il n'y est pas, quoiqu'il en parle alors sincèrement et sans passion. L'homme n'est donc que déguisement, que mensonge et hypocrisie, et en soi-même et à l'égard des autres.

Il ne veut pas qu'on lui dise la vérité, il évite de la dire aux autres ; et toutes ces dispositions, si éloignées de la justice et de la raison, ont une racine naturelle dans son coeur." Blaise PASCAL., Pensées, n° 100, 1657-1662, © Hachette, texte établi par Brunschvicg. Dégagez la thèse de l'auteur et son argumentation Dans ce texte Pascal affirme que le mensonge règne en permanence dans les relations entre les hommes. Pans un premier temps, il souligne que les hommes ne se parlent jamais avec sincérité comme le montre la différence de discours selon que la personne évoquée est présente ou absente.

Ce mensonge réciproque apparaît nécessaire à la vie sociale (« union entre les hommes »), et même à l'amitié (qui ne peut durer sans cela). Pans un second temps, l'auteur reprend la même idée en précisant que ce mensonge réciproque est recherché et souhaité par tous car il appartient à la nature même de l'homme. Nous ne nous tenons jamais au temps présent.

Nous anticipons l'avenir comme trop lent venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l'arrêter comme trop prompt : si imprudents que nous errons dans les temps qui ne sont pas nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient : et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste.

C'est que le présent, d'ordinaire, nous, blesse.

Nous le cachons à notre vue parce qu'il nous afflige et s'il nous est agréable, nous regrettons de le voir échapper.

Nous tâchons de le soutenir par l'avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance, pour un temps où nous n'avons aucune assurance d'arriver.

Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé et l'avenir.

Nous ne pensons presque point au présent ; et, si nous y pensons, ce n'est que pour en prendre la lumière pour disposer de l'avenir.

Le présent n'est jamais notre fin : le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin.

Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre ; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais. QUESTIONNEMENT INDICATIF • De quel passé peut-il s'agir dans « nous rappelons le passé l'arrêter comme trop prompt »? Qu'est-ce qui justifie dans le texte que nous sommes « imprudents » et « vains » ? Que signifie exactement « vain » ici ? • Que sont le passé et l'avenir selon Pascal ? Qu'est-ce qui « subsiste » ? Est-ce la seule appréhension du temps possible ? (Peut-être convient-il de distinguer le plan du vécu de celui de la représentation.) • Pourquoi, selon Pascal, « laissons-nous échapper sans réflexion » le présent ? — Comment penser que nous puissions cacher à notre vue « le présent » alors qu'il nous afflige ? — Que signifie « nous tâchons de le soutenir par l'avenir » (de prolonger son existence dans le temps qui suit ? Et l'existence de quoi ?)? • Comment penser que chacun peut trouver « toutes (ses pensées) occupées au passé et à l'avenir » et que « nous ne pensons presque point au présent »? • Quelle appréhension du présent doit-on avoir pour concevoir qu'il puisse être notre fin ? (Ne pourrait-on dire que dans la mesure où le présent est, il ne saurait être notre fin ?) • Comment expliquer « nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre » (En prenant les expressions « à la lettre » ne pourrait-on dire qu'espérer c'est vivre ?) • Quel est l'enjeu de ce texte ? — Une ontologie du temps ? — Comment être heureux ? — Démontrer la misère de l'homme dans le temps ? NOTE SUR LE JANSÉNISME Le jansénisme est une forme particulièrement rigoureuse de pensée et de vie chrétienne.

Il se propose de revenir à. »

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