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Baruch SPINOZA

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Les exigences de la vie en une société organisée n'interdisent à personne de penser, de juger et, par suite, de s'exprimer spontanément. A condition que chacun se contente d'exprimer ou d'enseigner sa pensée en ne faisant appel qu'aux ressources du raisonnement et s'abstienne de chercher appui sur la ruse, la colère, la haine ; enfin, à condition qu'il ne se flatte pas d'introduire la moindre mesure nouvelle dans l'État, sous l'unique garantie de son propre vouloir. Par exemple, admettons qu'un sujet ait montré en quoi une loi est déraisonnable et qu'il souhaite la voir abroger. S'il prend soin, en même temps, de soumettre son opinion au jugement de la souveraine Puissance (car celle-ci est seule en position de faire et d'abroger des lois), s'il abstient entre-temps de toute manifestation active d'opposition à la loi en question, il est –au titre d'excellent citoyen- digne en tout point de la reconnaissance de la communauté. Au contraire, si son intervention ne vise qu'à accuser les pouvoirs publics d'injustice et à les désigner aux passions de la foule, puis, s'il s'efforce de faire abroger la loi de toute manière, ce sujet est indubitablement un perturbateur et un rebelle. Baruch SPINOZA

« Les exigences de la vie en une société organisée n’interdisent à personne de penser, de juger et, par suite, de s’exprimer spontanément.

A condition que chacun se contente d’exprimer ou d’enseigner sa pensée en ne faisant appel qu’aux ressources du raisonnement et s’abstienne de chercher appui sur la ruse, la colère, la haine ; enfin, à condition qu’il ne se flatte pas d’introduire la moindre mesure nouvelle dans l’État, sous l’unique garantie de son propre vouloir.

Par exemple, admettons qu’un sujet ait montré en quoi une loi est déraisonnable et qu’il souhaite la voir abroger.

S’il prend soin, en même temps, de soumettre son opinion au jugement de la souveraine Puissance (car celle-ci est seule en position de faire et d’abroger des lois), s’il abstient entre-temps de toute manifestation active d’opposition à la loi en question, il est –au titre d’excellent citoyen- digne en tout point de la reconnaissance de la communauté.

Au contraire, si son intervention ne vise qu’à accuser les pouvoirs publics d’injustice et à les désigner aux passions de la foule, puis, s’il s’efforce de faire abroger la loi de toute manière, ce sujet est indubitablement un perturbateur et un rebelle. VOCABULAIRE SPINOZISTE Passions: non pas l’affectivité en général, mais les affects passifs (inadéquats, dépendants).

La passion est donc, chez Spinoza, la forme passive du Désir.

Une action, au contraire, en est la forme active (affect actif).

Une joie passive est une passion, mais il existe une joie active, adéquate réfléchie, qui est une action.

Les passions expriment une servitude mais non un péché coupable ou un «vice de la nature». Pensée: l’un des Attributs de la substance.

En Dieu elle est infinie.

Elle est une activité.

Ce qu’on appelle l’entendement infini de Dieu (mode infini) est identique à la somme de tous les entendements humains finis.

En l’homme, la Pensée se saisit donc elle-même comme entendement, c’est-à-dire comme idée singulière et active, et comme idée d’idée (réflexion).

Le Désir est de l’ordre de la Pensée, encore confuse, mais il peut toujours devenir une connaissance (claire) par redoublement de l’idée du corps (ou conscience). Homme: réalité singulière, contingente, constituée par un corps et par l’idée de ce corps (esprit humain). L’existence d’un homme n’est pas logiquement nécessaire mais elle résulte du système des causes naturelles. Thèse et étapes de l'argumentation: Spinoza s'interroge ici sur le droit de regard dont peut disposer l'individu à l'égard des lois: que puis-je légitimement faire si une loi me déplaît, me désavantage ou si je la trouve injuste ? La position de Spinoza est de prôner une action franche mais insérée dans une démarche rationnelle et institutionnelle et non pas passionnée et révolutionnaire.

Son raisonnement peut valoir aussi bien pour les citoyens auxquels il conseille la liberté de pensée et d'expression dans des limites raisonnables, que pour les dirigeants auxquels il vaut montrer que ces libertés ne sont pas dangereuses en elles-mêmes et doivent même être encouragées pour mieux isoler et réprimer proprement dite: les libertés de pensée et d'expression ne sont en rien contraires aux "exigences de la vie en une société organisée". Le citoyen dispose de sa liberté d'opinion de respecter la puissance souveraine qui dirige l'Etat: il est alors un bon citoyen.

Toute action ou parole attaquant le Souverain constitue un acte de rébellion.

Pour Spinoza, toute manifestation active ou violente (verbale ou non) qui s'oppose aux lois de l'Etat est inacceptable. L'architecture du texte est simple: il s'agit de l'énoncé du principe général suivi d'une illustration par l'exemple.

Le principe général est celui de la liberté de pensée et d'expression limitée par trois conditions: * la rationalité de la démarche; * le renoncement à des procédés sournois et séditieux; * le renoncement à une volonté arbitraire. L'exemple reprend point par point les conditions énoncées dans la premières partie, en ajoutant que le citoyen qui agit dans des conditions souhaitables mérite la gratitude de la communauté dont il contribue à améliorer le cadre de vie; et qu'il mérite une répression sévère s'il nuit à la communauté en détachant son intérêt individuel de celui de la société. 2.

Expliquez l'affirmation suivante.

« [ ...] s'il s'abstient entre-temps de toute manifestation active d'opposition à la loi en question ». Spinoza reprend ici une position classique à propos du respect des lois et de la possibilité de réformer le système des lois : position d'autant plus classique qu'elle remonte à Socrate lui-même, qui affirmait qu'il vaut mieux subir l'injustice que de la commettre.

Or il est injuste de se révolter contre la loi; il faut donc demander que la loi injuste soit réformée. »

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