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Baruch SPINOZA

Extrait du document

... Pour ma part, je qualifie de libre une chose qui existe et agit par la seule nécessité de sa nature ; j'appelle contrainte celle qui est déterminée par une autre à exister et à agir selon une loi précise et déterminée. Dieu par exemple, existe librement (quoique nécessairement) parce qu'il existe par la seule nécessité de sa nature... Vous voyez donc que je place la liberté non dans un libre décret mais dans une libre nécessité. Mais descendons au niveau des choses créées qui toutes sont déterminées à exister et à agir selon une loi précise et déterminée. Pour que ce soit bien clair, prenons un exemple très simple : une pierre reçoit d'une cause extérieure qui la pousse, une certaine quantité de mouvement, par laquelle lorsque cesse l'impulsion de la cause extérieure, elle continue nécessairement de se mouvoir. La persistance du mouvement de cette pierre est une contrainte, non parce qu'elle est nécessaire, mais parce qu'elle doit être définie par l'impulsion d'une cause extérieure ; et ce que je dis ici d'une pierre, doit être dit de n'importe quelle chose singulière. Or imaginez à présent, s'il vous plaît, que la pierre, tandis qu'elle continue à se mouvoir pense et sache qu'elle même, autant qu'elle peut, fait effort pour continuer à se mouvoir. Cette pierre, assurément, puisqu'elle est consciente seulement de son effort, croira qu'elle est souverainement libre et qu'elle persévère dans son mouvement pour une seule cause, à savoir parce qu'elle le veut ainsi. Or telle est cette fameuse liberté humaine que tous se vantent de posséder et qui consiste seulement en ceci, que les hommes sont conscients de leurs désirs mais ignorants des causes qui déterminent ces désirs... L'homme ivre croit dire par une libre décision de son esprit ce qu'il voudrait ensuite avoir tu. De même un fou, un bavard et tant d'autres du même genre croient agir par une libre décision de leur esprit et non être déterminés par une impulsion. ... (Votre ami) dit avec Descartes qu'est libre celui qui n'est contraint par aucune cause extérieure ; si par « homme contraint » il entend celui qui agit contre son gré, j'accorde qu'en certaines occasions nous ne sommes pas contraints et qu'en ce sens nous possédons un libre arbitre. Mais si par contraint il entend celui qui, quoique de son propre gré, agit pourtant nécessairement (comme Je l'ai expliqué plus haut) je dis que nous ne sommes jamais libres... Il dit ensuite que les causes pour lesquelles il a appliqué son esprit à l'acte d'écrire l'ont assurément poussé à écrire mais ne l'ont pas contraint... Mais cette remarque ne peut signifier que ceci. Des causes qui, dans d'autres situations, ne l'auraient pas contraint d'écrire, l'ont contraint cette fois ci non certes à écrire contre son gré mais à avoir nécessairement le désir d'écrire. Baruch SPINOZA

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Pour ma part, je qualifie de libre une chose qui existe et agit par la seule nécessité de sa nature ; j'appelle contrainte celle qui est déterminée par une autre à exister et à agir selon une loi précise et déterminée. Dieu par exemple, existe librement (quoique nécessairement) parce qu'il existe par la seule nécessité de sa nature... Vous voyez donc que je place la liberté non dans un libre décret mais dans une libre nécessité. Mais descendons au niveau des choses créées qui toutes sont déterminées à exister et à agir selon une loi précise et déterminée.

Pour que ce soit bien clair, prenons un exemple très simple : une pierre reçoit d'une cause extérieure qui la pousse, une certaine quantité de mouvement, par laquelle lorsque cesse l'impulsion de la cause extérieure, elle continue nécessairement de se mouvoir.

La persistance du mouvement de cette pierre est une contrainte, non parce qu'elle est nécessaire, mais parce qu'elle doit être définie par l'impulsion d'une cause extérieure ; et ce que je dis ici d'une pierre, doit être dit de n'importe quelle chose singulière. Or imaginez à présent, s'il vous plaît, que la pierre, tandis qu'elle continue à se mouvoir pense et sache qu'elle même, autant qu'elle peut, fait effort pour continuer à se mouvoir.

Cette pierre, assurément, puisqu'elle est consciente seulement de son effort, croira qu'elle est souverainement libre et qu'elle persévère dans son mouvement pour une seule cause, à savoir parce qu'elle le veut ainsi. Or telle est cette fameuse liberté humaine que tous se vantent de posséder et qui consiste seulement en ceci, que les hommes sont conscients de leurs désirs mais ignorants des causes qui déterminent ces désirs... L'homme ivre croit dire par une libre décision de son esprit ce qu'il voudrait ensuite avoir tu.

De même un fou, un bavard et tant d'autres du même genre croient agir par une libre décision de leur esprit et non être déterminés par une impulsion. ...

(Votre ami) dit avec Descartes qu'est libre celui qui n'est contraint par aucune cause extérieure ; si par « homme contraint » il entend celui qui agit contre son gré, j'accorde qu'en certaines occasions nous ne sommes pas contraints et qu'en ce sens nous possédons un libre arbitre.

Mais si par contraint il entend celui qui, quoique de son propre gré, agit pourtant nécessairement (comme Je l'ai expliqué plus haut) je dis que nous ne sommes jamais libres... Il dit ensuite que les causes pour lesquelles il a appliqué son esprit à l'acte d'écrire l'ont assurément poussé à écrire mais ne l'ont pas contraint...

Mais cette remarque ne peut signifier que ceci.

Des causes qui, dans d'autres situations, ne l'auraient pas contraint d'écrire, l'ont contraint cette fois ci non certes à écrire contre son gré mais à avoir nécessairement le désir d'écrire. VOCABULAIRE SPINOZISTE Nature: ensemble de la réalité.

Elle est soumise à des lois déterminées, elle ne comporte aucune finalité et elle est infinie.

Totalement autonome et unique, elle comporte une infinité d’aspects différents dont deux nous sont connus parce qu’ils nous constituent directement ce sont la Pensée et l’Étendue, Attributs de la substance, qui est Dieu, c’est-à-dire cette Nature même. Nécessité: lien logique entre deux essences ou entre une essence et son existence, lorsque l’une ne peut être rationnellement conçue sans l’autre.

Le déploiement existentiel des conséquences nécessaires est le déterminisme.

Les lois de la Nature découlent nécessairement de l’essence de la substance. Liberté: elle n’est pas un acte de la volonté qui n’est qu’une faculté (entité abstraite, en fait inexistante).

La liberté concrète est l’autonomie d’un individu, atteinte lorsque ses actions ne résultent que de causes internes (celles qui résultent de l’essence même de cet individu, c’est-à-dire de son Désir). Homme: réalité singulière, contingente, constituée par un corps et par l’idée de ce corps (esprit humain). L’existence d’un homme n’est pas logiquement nécessaire mais elle résulte du système des causes naturelles. Esprit: idée du corps constituant « l’esprit humain ».

C’est donc un mode fini de l’Attribut Pensée («Âme»). Dieu: nom donné par Spinoza à la substance infinie (Être) en tant qu’elle est constituée par un nombre infini d’attributs infinis.

Dieu est donc la Nature elle-même.

Ce terme (Dieu) est équivalent au terme vérité. Conatus: l'effort par lequel chaque chose tend à persévérer dans son être.

Il est donc la puissance d’exister (vim existendi) et l’essence même du Désir. Désir: mouvement concret fondé sur le conatus et par lequel l’individu poursuit des biens qui accroîtront sa puissance d’exister, c’est-à-dire sa perfection et son être.

Un tel accroissement produit la Joie (et ses dérivés) ; sa réduction produit au contraire la Tristesse (et ses dérivés).

Le Désir est l’essence de l’homme.. »

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