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Baruch SPINOZA

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Pour trouver la meilleure méthode de recherche de la vérité, nous n'aurons pas besoin d'une méthode par laquelle nous rechercherions cette méthode de recherche, et pour rechercher cette seconde méthode nous n'aurons pas besoin d'une troisième et ainsi de suite à l'infini ; car de cette façon nous ne parviendrons jamais à la connaissance de la vérité ni même à aucune connaissance. Il en est de cela tout de même que des instruments matériels, lesquels donneraient lieu à pareil raisonnement. Pour forger le fer en effet, on a besoin d'un marteau et pour avoir un marteau il faut le faire ; pour cela un autre marteau, d'autres instruments sont nécessaires et, pour avoir ces instruments, d'autres encore et ainsi de suite à l'infini ; par où l'on pourrait s'efforcer vainement de prouver que les hommes n'ont aucun pouvoir de forger le fer. En réalité les hommes ont pu, avec les instruments naturels, venir à bout, bien qu'avec peine et imparfaitement, de certaines besognes très faciles. Les ayant achevées, ils en ont exécuté de plus difficiles avec une peine moindre et plus parfaitement et, allant ainsi par degrés des travaux les plus simples aux instruments de ces instruments à d'autres travaux et d'autres instruments, par un progrès constant, ils sont parvenus enfin à exécuter tant d'ouvrages et de si difficiles avec très peu de peine. Baruch SPINOZA

« Pour trouver la meilleure méthode de recherche de la vérité, nous n'aurons pas besoin d'une méthode par laquelle nous rechercherions cette méthode de recherche, et pour rechercher cette seconde méthode nous n'aurons pas besoin d'une troisième et ainsi de suite à l'infini ; car de cette façon nous ne parviendrons jamais à la connaissance de la vérité ni même à aucune connaissance.

Il en est de cela tout de même que des instruments matériels, lesquels donneraient lieu à pareil raisonnement.

Pour forger le fer en effet, on a besoin d'un marteau et pour avoir un marteau il faut le faire ; pour cela un autre marteau, d'autres instruments sont nécessaires et, pour avoir ces instruments, d'autres encore et ainsi de suite à l'infini ; par où l'on pourrait s'efforcer vainement de prouver que les hommes n'ont aucun pouvoir de forger le fer.

En réalité les hommes ont pu, avec les instruments naturels, venir à bout, bien qu'avec peine et imparfaitement, de certaines besognes très faciles.

Les ayant achevées, ils en ont exécuté de plus difficiles avec une peine moindre et plus parfaitement et, allant ainsi par degrés des travaux les plus simples aux instruments de ces instruments à d'autres travaux et d'autres instruments, par un progrès constant, ils sont parvenus enfin à exécuter tant d'ouvrages et de si difficiles avec très peu de peine. VOCABULAIRE SPINOZISTE Vérité: ce n’est pas seulement l’accord de l’idée et de son objet extérieur: c’est aussi et surtout l’accord de cette idée avec elle-même, et l’évidence intérieure et immédiate d’une idée adéquate (index sui).

Les concepts «Dieu» et « vérité» sont identiques. Homme: réalité singulière, contingente, constituée par un corps et par l’idée de ce corps (esprit humain).

L’existence d’un homme n’est pas logiquement nécessaire mais elle résulte du système des causes naturelles. Dans ce texte, la question de la technique se présente comme un exemple : mieux, comme un modèle.

Spinoza est lancé dans des considérations de méthode, et se trouve placé devant la menace d'un obstacle : celle d'une régression à l'infini.

C'est ce qu'ex-prime le premier temps du texte : pour trouver la méthode qui mène à la vérité, ne faut-il pas trouver la méthode de cette méthode, et donc la méthode de cette deuxième méthode, et ainsi de suite à l'infini.

Pour éviter cette aporie, Spinoza fait donc appel au modèle de la technique.

Si la technique peut être un modèle, c'est que son existence même (et ses succès) témoigne de ce qu'elle a su surmonter cette difficulté préalable. Spinoza entreprend donc, dans un second temps du texte (à partir de « Il en est de cela tout de même [...] ») la construction d'une analogie.

Le même problème semble en effet devoir s'être posé pour le marteau (ici l'analogue de la méthode qui permet de trouver la vérité), qui, théoriquement, paraît avoir présupposé l'existence d'un outil pour faire des marteaux, et ainsi de suite, ce qui nous exposerait à une régression à l'infini analogue à la première.

La conclusion de Spinoza repose alors sur un argument par l'absurde : il est inutile de se réfugier derrière les difficultés de méthode pour prétendre que la vérité est inaccessible, sinon aucun marteau n'aurait jamais vu le jour. Le domaine technique offre donc le grand mérite de présenter un modèle de résolution (ce que Spinoza examine dans un dernier temps du texte, à partir de « En réalité [...] »).

Pour en arriver jusqu'au degré d'élaboration du marteau, on ne passe pas de rien à tout, de l'absence du marteau au marteau, par une sorte de « saut » logique : au contraire, le marteau n'est que le terme d'une certaine évolution, dont le texte souligne la longueur et la difficulté.

Cette évolution relève d'un perfectionnement progressif et empirique, qui éclaire le passage du naturel à l'artificiel. Spinoza tirera les leçons du modèle technique : on ne peut trouver la vérité que comme on commence à nager, c'est-à-dire en se jetant à l'eau.

L'être de la technique n'est pas prisonnier d'un savoir préalable (pensons au bricolage) : la technique ne se comprend qu'« in medias res ». Spinoza dans ce texte traite de la nature de l'entendement, c'est-à-dire de l'intellect.

Il est question ici de savoir s'il est possible de fonder la méthode de connaissance par des critères extérieurs. L' étymologie du mot "méthode" indique l'idée d'un cheminement ou parcours de l'esprit dans la quête ordonnée d'un savoir.

De ce point de vue, une méthode est constituée par l'exposé progressif des étapes que l'esprit doit parcourir pour obtenir un résultat.

Plus particulièrement, on admet qu'une méthode est nécessaire lorsqu'on veut acquérir un savoir ou une connaissance. Nous pensons ici forcément à Descartes et Ses règles pour la direction de l'esprit ou son Discours de la méthode.

Spinoza essaie donc de montrer qu'il ne peut y avoir de critère qui justifie une méthode mais que dans un même temps, l'esprit sait se créer ses propres outils. 1.

La méthode de connaissance ne peut être fondée par un critère extérieur Pour démontrer son propos, Spinoza établit une comparaison entre la méthode philosophique( qui se définit par la "recherche de la vérité" et une méthode proprement technique( la construction du marteau). La méthode ne peut pas consister en la recherche d'un critère extérieur qui fonde la vérité de l'objet ou de la méthode même.

Il n'y a pas de points de départ absolu d'une méthode mais nous ne pouvons pas pour autant en conclure qu'il n'est pas possible d'atteindre la connaissance ou la vérité.

C'est ce que Spinoza prouve en utilisant sa comparaison.

La fabrication du marteau nécessite de même de remonter pour comprendre chaque étape de remonter à l'étape antérieure.

On ne peut cependant pas dire qu'il est impossible de fabriquer un marteau, puisque la réalité nous montre le contraire. Il n'y a donc pas de méthode universelle, ni de méthode pour suivre une méthode : l'intelligence humaine est toujours amené à puiser en elle-même les règles auxquelles elle veut se soumettre. 2.

Du plus simple au plus compliqué Il s'agit alors de savoir comment agi l'intellect.

Pour ce faire, Spinoza continue la comparaison commencée plus haut.

Il explique la logique qui est à l'œuvre dans la fabrication du marteau ou de tout objet.

L'homme se sert au départ de matériau naturel et arrive avec peine à faire des choses simples, puis avec des ces premières choses peut en faire des plus compliqués.

L'intellect fait de même, il utilise au départ des facultés simples et naturelles, pour construire "des instruments" qui servent eux-mêmes à en construire d'autres.

On n'accède ainsi à la connaissance par degré.

"il avance de degré en degré jusqu'à ce qu'il ait atteint le comble de la sagesse".

L'intellect ou l'entendement travaille donc par enchaînement du plus simple au plus complexe. Nous pouvons donner un exemple pour comprendre ce fait.

L'apprentissage fonctionne toujours de cette manière : quand nous apprenons le piano, nous apprenons d'abord à faire une seule note, puis plusieurs à la fois, jusqu'à pouvoir jouer des morceaux complexes et rapide.

A chaque étape, on acquiert une compétence nécessaire pour passer à l'étape suivante. 3.

La puissance naturelle de l'intellect Il faut remarquer dans la troisième partie que l'intellect possède des qualités, des facultés innées, c'est-à-dire qui précèdent toute expérience.

Spinoza rejoint donc Descartes sur ce point contre l'empirisme qui réduit toute possibilité de connaissance à l'expérience.

C'est donc dans l'intelligence que l'humain trouve la sécurité de la certitude dans la conscience de son activité intellectuelle. Il semble en effet que la connaissance chez Spinoza découle entièrement de l'activité de l'entendement, puisque la connaissance ne découle pas entièrement de l'accord entre l'idée et la chose mais bien dans l'enchaînement même des forces de l'entendement.

C'est pour cela que la dernière phrase indique que la sagesse, donc la connaissance absolue est possible.

Sans rejeter les ressources de l'expérience, Spinoza affirme que nous devons d'abord connaître l'entendement, afin d'être assurés que nous sommes sur la voie de la connaissance vraie. Ainsi, dans ce texte, Baruch Spinoza affirme qu'aucune méthode ne peut fixer la véracité d'une méthode, aucun élément extérieur ne peut la justifier ou alors il faut remonter toujours plus en avant, de manière infinie.

Mais cela ne prouve nullement que la connaissance est impossible, comme le met en avant l'exemple de la fabrication du marteau.

On peut se dire cependant qu'il y a bien un point de départ dans la fabrication qui n'existe peut-être pas dans la recherche de la vérité.

Spinoza répond que le point de départ est la puissance innée de l'entendement et que c'est par elle que l'homme se forme les outils intellectuels nécessaires à la connaissance.

L'intellect s'élève en effet petit à petit du plus simple au plus compliqué.. »

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