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Baruch SPINOZA

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Il est extrêmement rare que les souveraines Puissances donnent des ordres d'une extrême absurdité, car, dans leur propre intérêt et afin de conserver leur pouvoir, il leur importe avant tout de veiller au bien général et de fonder leur gouvernement sur les critères raisonnables. (...) On sait que le but et le principe de l'organisation en société consistent à soustraire les hommes au règne absurde de la convoitise et de les faire avancer - autant que possible - sur la voie de la raison, de sorte que leur vie s'écoule dans la concorde et la paix. Aussitôt donc que ce principe cesserait d'être mis en œuvre, tout l'édifice s'écroulerait. Mais seule la souveraine Puissance a la charge d'en assurer le maintien, tandis que les sujets doivent exécuter les ordres reçus et ne reconnaître d'autre droit, que celui établi par les proclamations de la souveraine Puissance. Peut-être va-t-on prétendre qu'ainsi nous faisons des sujets des esclaves, car une opinion vulgairement répandue nomme esclave celui qui agit sur l'ordre d'un autre, et homme libre celui qui se conduit comme il le veut. Cette manière de voir n'est pas tout à fait conforme à la vérité. En fait, l'individu entraîné par une concupiscence personnelle au point de ne plus rien voir ni faire de ce qu'exige son intérêt authentique, est soumis au pire des esclavages. Au contraire, on devra proclamer libre l'individu qui choisit volontairement de guider sa vie sur la raison. Baruch SPINOZA

« Il est extrêmement rare que les souveraines Puissances * donnent des ordres d'une extrême absurdité, car, dans leur propre intérêt et afin de conserver leur pouvoir, il leur importe avant tout de veiller au bien général et de fonder leur gouvernement sur les critères raisonnables.

(...) On sait que le but et le principe de l'organisation en société consistent à soustraire les hommes au règne absurde de la convoitise et de les faire avancer - autant que possible - sur la voie de la raison, de sorte que leur vie s'écoule dans la concorde et la paix.

Aussitôt donc que ce principe cesserait d'être mis en œuvre, tout l'édifice s'écroulerait.

Mais seule la souveraine Puissance a la charge d'en assurer le maintien, tandis que les sujets doivent exécuter les ordres reçus et ne reconnaître d'autre droit, que celui établi par les proclamations de la souveraine Puissance.

Peutêtre va-t-on prétendre qu'ainsi nous faisons des sujets des esclaves, car une opinion vulgairement répandue nomme esclave celui qui agit sur l'ordre d'un autre, et homme libre celui qui se conduit comme il le veut. Cette manière de voir n'est pas tout à fait conforme à la vérité.

En fait, l'individu entraîné par une concupiscence personnelle au point de ne plus rien voir ni faire de ce qu'exige son intérêt authentique, est soumis au pire des esclavages.

Au contraire, on devra proclamer libre l'individu qui choisit volontairement de guider sa vie sur la raison.

” * les détenteurs de l'autorité. VOCABULAIRE SPINOZISTE Vérité: ce n’est pas seulement l’accord de l’idée et de son objet extérieur: c’est aussi et surtout l’accord de cette idée avec elle-même, et l’évidence intérieure et immédiate d’une idée adéquate (index sui).

Les concepts «Dieu» et « vérité» sont identiques. Homme: réalité singulière, contingente, constituée par un corps et par l’idée de ce corps (esprit humain). L’existence d’un homme n’est pas logiquement nécessaire mais elle résulte du système des causes naturelles. Droit: possibilité légitime d’accomplir une action.

La puissance de fait des individus définit et légitime leur droit de nature (ou droit naturel), tandis que leur puissance délimitée réciproquement, par les individus contractant un Pacte social, définit le droit civil. Âme (anima): chez Descartes, principe substantiel lié au corps et formé de l’entendement et de la volonté; elle est indépendante du corps et immortelle.

Spinoza n’emploie pas ce terme pour désigner l’individu humain singulier : il utilise le terme Mens (esprit). I - LES TERMES DU SUJET On notera surtout le caractère central du concept de raison.

Ce concept est d'abord pensé dans le cadre d'une réflexion politique : la finalité du pouvoir politique est de soustraire les hommes aux convoitises mutuelles issues de leurs passions et de veiller à l'intérêt des gouvernés.

La raison connote ici l'intérêt de chacun, et la paix sociale. Dans un deuxième moment, la raison intervient dans la définition de la liberté : est libre non celui qui fait ce qu'il veut, mais celui qui agit sous la conduite de la raison, fût-ce en obéissant. II - ANALYSE DU PROBLÈME Ce texte de SPINOZA est au croisement de deux types de problématiques, dont SPINOZA réussit à montrer l'articulation. Tout d'abord, quelle est la finalité de l'Etat, de l'organisation politique et du pouvoir politique ? Ensuite, peut-on être libre et obéir en même temps ? Comment déterminer l'idée de liberté : comme capacité de faire ce que l'on veut, ou comme capacité d'agir conformément à ce que la raison conseille ? L'enjeu de cette détermination de l'idée de liberté n'est rien moins que celui-ci : le citoyen peut-il être libre au sein de l'État ? En quoi consiste la liberté véritable ? III - LES GRANDES LIGNES DE REFLEXION On pouvait distinguer deux moments dans le devoir : celui de l'explication précise de la pensée de l'auteur dans cet extrait ; celui de la réflexion suscitée par la ou les problématiques que l'on vient de dégager. IV - UNE DEMARCHE POSSIBLE A - L'ETAT ET SA RATIONALITE SPINOZA souligne d'abord la rareté d'un pouvoir politique gouvernant de manière absurde ou à l'encontre de l'intérêt général.

SPINOZA ne pêche pas par optimisme : simplement, il s'appuie sur la rationalité propre au pouvoir politique qui lui commande d'agir dans son intérêt et celui de sa conservation. En effet, pour SPINOZA, le droit de gouverner est toujours suspendu à une force, et le gouvernement n'est pas toujours sûr d'être le plus fort : le rapport de force est toujours possible, et peut s'inverser en faveur du peuple, ce. »

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