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A quoi bon donner à chacun ce qui lui revient ?

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« Introduction « Donner » signifie ici « rétribuer », donner en échange de quelque chose.

Ce qui « revient », c'est ce à quoi l'on a droit, au titre de rétribution pour ce qu'on a soi-même procuré.

Distinguons trois cas : a) celui où un individu procure un objet (une marchandise) à un certain prix ; b) celui où un individu fait quelque chose ; il peut s'agir d'un travail, méritant salaire, d'un service, appelant une récompense, d'une faute appelant une peine ; c) celui enfin où un individu se contente d'être ce qu'il est, méritant par là, si l'on veut, un certain type de considération. Deux questions se posent.

D'abord celle-ci : comment fixer ce qui « revient » à l'individu (un prix, un salaire, une récompense, une peine, une considération) (I) ? Ensuite : pourquoi donner à chacun ce qui lui revient, ou encore agir justement (on traite alors également deux individus qui se trouvent dans deux situations semblables) ? A quoi bon être juste (II) ? I — Comment fixer ce qui revient à chacun ? a) Dans le cas d'un échange de biens (troc ou achat), la justice paraît résider dans l'égalité des valeurs échangées. b) Dans le cas de la rétribution d'un faire, il paraît juste d'adopter le principe de la proportionnalité.

Pour plus de travail, un salaire supérieur ; pour un service plus important, une récompense plus importante ; pour une faute plus grave, une peine plus lourde.

La règle est la même pour tous, et elle conduit à donner autant à deux individus qui ont agi semblablement ; en ce sens, elle est égalitaire ; mais l'application de la formule conduit à donner plus à celui qui a fait plus, en ce sens, elle est inégalitaire. Cette conception n'est pas la seule possible.

En matière de salaire, par exemple, certains trouveront plus juste de partir des besoins, et de donner autant à chacun, ou même plus à ceux dont les besoins sont supérieurs. c) Pour ce qu'il est, on pourra trouver que l'individu mérite plus ou moins d'admiration, d'estime, de mépris, etc., selon la manière dont il se situe par rapport aux autres.

En tant qu'il est porteur d'une valeur dont les autres sont également porteurs, dans la mesure où tous sont des êtres humains, il mérite le respect. II - Pourquoi donner à chacun ce qui lui revient ? 1 - Arguments en faveur de cette pratique a) Il faut donner à chacun ce qui lui revient, pour éviter l'apparition d'un sentiment d'injustice, du sentiment que les choses ne sont pas dans l'ordre.

Personne ne comprend qu'on ne tienne pas compte de la valeur de ce qu'il procure, ou qu'on le désavantage par rapport à un autre.

Du mécontentement d'ailleurs pourraient naître des manifestations de colère, qui seraient autant de nouveaux facteurs de désordre.

La pratique de la justice répond à une exigence d'ordre. b) La proportionnalité de la rétribution au mérite est un facteur de perfectionnement : la perspective d'une meilleure rétribution stimule, celle d'une peine plus lourde dissuade. 2 - Réserves critiques a) La notion de mérite n'est pas d'un maniement aisé.

Ce qu'un individu fait ou est s'explique partiellement par le mérite, mais aussi par le don naturel (ou l'absence de don), et encore par la chance fournie par un certain type de situation sociale (ou la malchance).

Comment distinguer entre les parts du mérite, du don et de la chance ? Comment mesurer des mérites ? b) Le souci permanent de la juste rétribution peut s'apparenter à une manie mathématique (je donne tant à un tel parce qu'il a fait telle chose, et tant à tel autre parce qu'à un tel j'ai donné tant), par laquelle il s'agit plus de comparer que de s'intéresser vraiment à la valeur des actes et des personnes (la justice n'est pas l'amour, la bienveillance, la charité...).

De même, réclamer la justice pour soi-même, en regardant comment sont traités les autres, est peut-être moins ambitieux que de chercher à bien faire. c) Bien qu'indispensable, la rétribution est perverse, dans la mesure où la motivation par le goût de la chose bien faite ou du perfectionnement de soi, peut se trouver remplacée par le désir d'une reconnaissance ou d'un avantage. Conclusion Il faut donner à chacun ce qui lui revient en appliquant les règles qui président à une juste rétribution, parce que ne pas le faire est pire.

Mais l'idéal de la juste rétribution a une valeur limitée.. »

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