Aide en Philo

Extrait du document

« L'ange empêche l'immolation d'Isaac de Rembrandt "Lorsqu'ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait dit, Abraham y éleva un autel et rangea le bois.

Il lia son fils Isaac et le mit sur l'autel, par-dessus le bois. Puis Abraham étendit la main, et prit le couteau pour égorger son fils. Alors l'ange de l'Éternel l'appela des cieux, et dit : Abraham ! Abraham ! Et il répondit : Me voici ! L'ange dit : N'avance pas ta main sur l'enfant et ne lui fais rien ; car je sais maintenant que tu crains Dieu, et que tu ne m'as pas refusé ton fils, ton unique." (Genèse 22, 10-12) Rembrandt a déjà peint ce sujet tiré de la Bible, mais dans sa jeunesse.

Cette toile, Le Sacrifice d'Abraham , fut peinte en 1635, Rembrandt n'avait pas 30 ans et peignait encore des oeuvres d'un style très baroque. Vingt ans plus tard, Rembrandt reprend le même thème, mais le traite à l'eau-forte.

Beaucoup moins démonstrative que le tableau, cette gravure s'attache aux terribles douleurs, aux doutes et à l'incompréhension d'Abraham.

On est loin de la surprise qui fige ses mouvement dans l'oeuvre précédente.

Ici, le visage d'Abraham est encore empli de peine lorsque l'ange le délivre de sa terrible mission.

L'angoisse n'a toujours pas quitté la face de l'homme qui s'apprêtait à immoler son fils.

L'ange, qui semble avoir de la tendresse pour le vieillard, couvre les yeux d'Isaac et retient le geste mortel de son père. La vie de Rembrandt est tendue par deux ambitions.

Jusqu'en 1642, Rembrandt n'a d'autre volonté que d'être le premier des peintres d'Amsterdam.

Jusqu'en 1669, année de sa mort le 4 octobre, Rembrandt veut être le premier des peintres de son temps.

Jusqu'en 1642, c'est à la fortune et à la renommée qu'il voue son oeuvre.

A partir de 1642, il ne rend plus de comptes qu'à la peinture.

Jeune peintre associé à Jan Lievens à Leyde, il ne songe à vingt ans qu'à prouver qu'il est peintre d'histoire et qu'il est capable de peindre des portraits qui répondent à l'attente de modèles sûrs de leur foi comme de leur fortune.

C'est que la peinture d'histoire est le premier des genres dans la hiérarchie que les guildes et les académies ont instaurées en Europe depuis presque deux siècles.

C'est que le portrait est le plus sûr moyen d'attirer à soi une clientèle bourgeoise qui veut tenir tête à la noblesse de l'Europe.

Dès 1631, Rembrandt est à Amsterdam.

Il a vingt-cinq ans.

La Leçon d'anatomie du professeur Tulp, qu'il peint un an plus tard somme que l'on reconnaisse immédiatement la puissance et la pertinence de sa peinture.

Cette toile est l'une des premières qu'il signe de son seul prénom, Rembrandt.

Signer ainsi c'est vouloir être confondu dans la gloire avec ceux que l'on nomme de la même manière par leurs seuls prénoms ou surnoms, comme Masaccio, Leonardo, Michelangelo, Rafaelo...

Rembrandt sait encore que seule la gravure, parce qu'elle circule à plusieurs exemplaires, est en mesure de faire connaître son oeuvre aux amateurs de toute l'Europe.

Aussi Rembrandt grave.

Pendant des années, posent devant Rembrandt des théologiens et des armateurs, des marchands et des banquiers, des couples aux pourpoints et aux robes parés de dentelles, des fonctionnaires de la Compagnie des Indes orientales.

Et dans son atelier, Rembrandt, peintre d'histoire, peint la Sainte Famille comme L'Enlèvement de Ganimède ou Le Sacrifice d'Abraham.

Et il peint encore des personnages qui ne sont ni des portraits ni des prophètes des Saintes Écritures mais des philosophes, mais des hommes coiffés de turbans, chargés de chaînes, personnages d'un Orient inventé... En 1642 il présente à ceux qui ont été ses modèles le tableau le plus vaste qu'il ait jamais peint qu'est La Compagnie du capitaine Frans Banningh Cocq (La Ronde de nuit).

Nul ne doute que la peinture qu'il vient d'achever soit un chef-d'oeuvre.

Mais les miliciens qui entourent Cocq et qui ont payé pour que la toile rende comme il convient hommage à leur civisme, ne peuvent admettre que les mouvements et les ombres cachent presque leurs visages.

Par cette toile Rembrandt congédie ses modèles, refuse que la peinture continue de ne servir que leur vanité.

En cette même année 1642, meurt sa femme Saskia. Quatorze ans plus tard, en 1656, la Haute Cour d'Amsterdam nomme un liquidateur judiciaire qui est chargé de vendre tous les biens du peintre.

Quatre ans plus tard, Rembrandt doit quitter la somptueuse demeure qu'il a pendant des années encombré de chefs-d'oeuvre et doit s'installer dans le quartier populaire du Jordaan, sur le Rozengracht.

Rembrandt, ruiné, ne cesse pas de peindre et de graver.

On sait dans toute l'Europe quelle exception il est.

Depuis Messine, l'amateur qu'est Don Antonio Ruffo lui commande un portrait d'Homère, un autre d'Alexandre.

Le grand duc de Toscane, de passage à Amsterdam, lui rend visite.

Mais les bourgeois d'Amsterdam, qui lui ont commandé pour leur nouvel Hôtel de ville une toile représentant La Conjuration de Claudius Civilis, qui se dresse contre le pouvoir de Rome,. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓