Devoir de Philosophie

Vitus Béring

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

Si, sur une carte géographique, on tire une ligne du nord du Japon au sud de l'Oregon, on aura une idée approximative de la limite de ce qui était connu du Pacifique au début du XVIIIe siècle. Les régions au nord de cette ligne étaient encore enveloppées de ténèbres. Seuls les Russes avaient quelques notions du nord-est de l'Asie ; leurs connaissances en étaient cependant exclusivement d'ordre pratique, et fournies par les bandes de cosaques qui, dès 1580, y avaient pénétré de l'ouest par la Sibérie. Dès 1638, ils atteignirent l'océan, et en 1648, un cosaque, nommé Dejnev, fit voile de l'embouchure du Kolyma jusqu'à l'Anadyr. Ainsi le détroit de Béring a été passé bien avant l'expédition de Béring, mais il faut tenir pour certain que Dejnev, ni personne, n'eurent alors la moindre intuition de l'importance d'une telle entreprise. Tel était l'état de choses lorsque Pierre le Grand intervint. On a conservé le texte des instructions écrites de sa propre main. Avec un laconisme caractéristique, il ordonnait : "1. Construisez au Kamtchatka ou en quelque autre place de cette région un ou deux navires pontés. 2. Longez avec ces navires la côte qui s'étend vers le nord et qui semble (ses limites étant inconnues) appartenir à l'Amérique. 3. Déterminez où elle touche l'Amérique, et allez vers une colonie soumise à la juridiction européenne ; si vous rencontrez un navire européen, informez-vous du nom de la côte et notez-le, faites une escale pour obtenir de plus amples renseignements, dressez-en une carte et faites ensuite retour ici."

« nombre de participants.

Le compagnon et compatriote de Béring, Morten Spangberg, explora les îles Kouriles et lenord du Japon, tandis qu'un autre Danois, le jeune lieutenant Peter Lassenius, périt avec la plus grande partie deson équipage pendant son hivernage à l'embouchure de la Lena. Sept années s'écoulèrent entre le départ de Béring de Saint-Pétersbourg et son arrivée au Kamtchatka, où il fondala ville de Petropavlovsk.

Il avait alors presque soixante ans et portait les stigmates de nombreuses années deprivations.

Aux inévitables souffrances du voyage s'ajoutaient l'inimitié voilée et l'hostilité des autorités sibériennes.Il était d'ailleurs un explorateur de la vieille école et pour lui, l'établissement de cartes géographiques était l'Oeuvreprincipale.

A ce point de vue, il se trouvait en désaccord avec ses collaborateurs scientifiques.

Un petit incidentrévèle cette tragédie intime : lorsque, arrivé à la côte d'Alaska, tout le monde s'adonna aux réjouissances, il secontenta de lever les épaules, remarquant qu'on "était encore loin du but". Mais n'anticipons pas.

L'expédition dut hiverner une seconde fois avant l'exploration des eaux arctiques.

Les vivresayant fait défaut, Béring se vit contraint de renoncer à son plan initial d'accomplir le voyage en deux ans, y comprisun hivernage sur les côtes inconnues d'Amérique.

Lorsqu'il lui fut possible de mettre à la voile en 1741, il ne disposaitde provisions que pour six mois, et encore étaient-elles de qualité fort médiocre.

Béring, entre temps promucapitaine commandant, se trouvait sur le Saint-Peter, tandis que le lieutenant Tchirikov commandait le Saint-Paul. Rendu prudent par les critiques essuyées au retour de sa première expédition, Béring fit tout d'abord une croisièreau sud-est du Kamtchatka pour vérifier si les îles légendaires qu'on y supposait y étaient réellement.

Inutile d'ajouterqu'il ne trouva rien.

Mais en considérant le peu de temps dont il disposait, ce détour se traduisait par un sérieuxretard.

Peu après, par un temps bouché et brumeux, les navires perdirent contact.

Tchirikov navigua de l'est vers lenord et, le 15 juillet (ancien régime), il atteignit l'une des petites îles au large de l'île du Prince de Galles, dansl'archipel Alexandre.

De là, il suivit les îles vers le nord, mais quelques jours plus tard, il perdit une embarcation avecquinze hommes qui furent probablement pris et massacrés par les Tlinkit.

Enfin, longeant la côte méridionale del'Alaska et la chaîne des îles Aléoutiennes, il atteignit le Kamtchatka en octobre. De son côté, Béring découvrit une terre le même jour que Tchirikov.

Une contrée sauvage et montagneuse, avecdes sommets couverts de neige, s'élevait au-dessus des flots.

C'était, en fait, l'une des régions les plus élevées del'Amérique du Nord, aux alentours du mont Saint-Élie.

Quelques jours plus tard, il jeta l'ancre au large d'une petiteîle, connue actuellement sous le nom d'île Kayak, à l'est du détroit du Prince William.

Que lui fallait-il faire dès lors ?Une exploration ne pouvait guère être fructueuse, le temps disponible étant trop court.

Le second et quelqueshommes de l'équipage, parmi lesquels le naturaliste allemand G.-W.

Steller, auteur de l'unique description connue dece voyage, se rendirent à terre pour une rapide reconnaissance.

En même temps, l'équipage se réapprovisionnait eneau douce.

Après quoi, Béring donna l'ordre du départ. Steller, furieux, demanda si le but complet de l'expédition ne tenait qu'à transporter en Asie de l'eau d'Amérique !Les préparatifs avaient coûté dix ans de travaux, et l'on n'avait voué que dix heures à la tâche principale ! Mais encette occasion, Steller est évidemment injuste.

Béring avait en effet d'excellentes raisons pour rentrer.

Le problèmedes approvisionnements était des plus sérieux, et puisque Béring était autorisé à repartir au cours de l'été suivant, iln'avait aucune raison de s'exposer à des risques sérieux.

En outre, le scorbut, cet ennemi constant des anciensmarins, avait fait son apparition, et la santé même de Béring était si ébranlée qu'il ne pouvait que rarement se leverde sa couchette.

La maladie se propagea ; il y eut un premier décès aux îles Shumaghin. Deux mois durant, le Saint-Peter côtoya la chaîne des îles Aléoutiennes, dans des conditions de plus en plusterribles.

Les tempêtes se succédaient et emportaient les voiles à demi pourries, les réserves d'eau s'amenuisaient.Une moitié de l'équipage était malade et l'autre souffrait des privations.

Le 5 novembre, ils découvrirent une côte etprésumèrent qu'ils touchaient le Kamtchatka.

Ils s'aperçurent cependant bientôt qu'ils étaient devant une îleinconnue et inhabitée, qu'ils dénommèrent Béring.

Il apparut évident que le navire ne résisterait pas à une nouvelletempête.

Aussi l'équipage décida-t-il de l'abandonner et d'hiverner sur cette île.

Ce séjour fut une suiteininterrompue de souffrances.

On dut s'accommoder de huttes primitives, creusées dans le sable et couvertes dedébris de bois, qui ne protégeaient que fort imparfaitement leurs hôtes des tempêtes de neige et du froid terrible ;le scorbut continuait ses ravages parmi les hommes épuisés. La faune y était abondante ; ce fut là que Steller trouva le fameux rhytina, mammifère aquatique herbivoreappartenant au genre des veaux marins et qui fut exterminé dans les vingt-sept ans seulement qui suivirent sadécouverte.

Les renards polaires étaient si nombreux et si audacieux qu'ils devinrent bientôt une vraie plaie ; nonseulement ils volaient tout ce qui était à leur portée, mais ils attaquaient même les hommes sans défense. Par un heureux hasard, le navire fut finalement jeté sur la plage au cours d'une tempête, de sorte que l'équipage putmettre en sûreté les provisions ainsi que du matériel ; mais la situation empirait.

L'un après l'autre, les maladessuccombaient au scorbut, et le 8 décembre, Béring lui-même mourut. Trente et un hommes périrent au cours de ce voyage fatal ; les quarante-six survivants atteignirent le Kamtchatkaau mois d'août suivant sur un petit navire construit avec les épaves du Saint-Peter. Le sort de Béring a été tragique.

En butte à la méfiance du monde scientifique, il a en outre été surchargé detâches exclusives par un gouvernement qui ne lui conféra pas en même temps l'autorité nécessaire à leuraccomplissement.

Il ne rencontra que de l'hostilité chez les magistrats ivrognes et corrompus avec lesquels il fut. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles