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Sciences & Techniques: William Harvey : la circulation sanguine

Publié le 22/02/2012

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Depuis l'Antiquité, on sait que le sang se déplace, mais l'on pense qu'il chemine dans deux réseaux quasi indépendants. Jusqu'à ce que William Harvey, à la surprise générale, installe le coeur au centre d'un système unifié… Lorsque vers 1618-1619, William Harvey découvre la circulation du sang, il est le premier surpris, voire choqué par ce qu'il vient de trouver. A tel point qu'il va pendant plus de neuf ans, répéter devant ses collègues du Collège royal de médecine de Londres, les démonstrations de sa découverte sur des animaux vivants. Les membres du Collège manifestent leurs doutes, soulèvent des objections auxquelles il répond, jusqu'à ce que le président du Collège tranche finalement en sa faveur. Harvey consent alors à publier le Compte rendu de sa découverte.

« en question sont les artères, car les veines, croit-on à l'époque, ne viennent pas du cœur mais du foie.

Aristote fait du cœur le siègede ce qu'il appelle "l'âme végétative" .

Harvey, à l'instar d'Aristote, le considère comme le plus important de tous les organes des animaux.

Il l'appelle "le fondement de la vie, le prince de chaque animal, le soleil du microcosme". Comme il étudie les mouvements du cœur et des artères non seulement chez l'Homme, mais chez tous les animaux, y compris ceux qui n'ont pas de poumons , il ne se pose aucune question sur cet organe.

Cela donne à sa recherche un caractère unique.

Ses expériences, conduites aussi bien surdes animaux à sang chaud qu'à sang froid - poissons et serpents compris - lui révèlent les détails des mouvements cardiaques, lesbattements ralentis chez les animaux à sang froid ou mourants. C'est ainsi qu'au terme de plusieurs années, Harvey est parvenu à établir la contenance des cavités du cœur, la fréquence cardiaque,la compétence des valves à l'entrée et à la sortie de ces cavités, celle des valvules veineuses qu'avaient découvertes Fabricius.

Enfin,il s'est aussi penché sur la taille relative des vaisseaux sanguins.

Un bilan qui place en fait Harvey au pied du mur : en effet, il le force(c'est le mot qu'il emploie) à conclure que le sang doit se déplacer "comme s'il était dans un cercle" (quasi in circulo). Mais cette conclusion le gêne tellement qu'il ne s'y rend qu'après maintes tergiversations.

"Ces choses, écrit-il, sont si nouvelles et inédites, que non seulement je redoute les maux qui me viendront de la malveillance des autres, mais je crains de même que chaque homme soitmon ennemi, pour autant qu'une coutume et une doctrine une fois reçues et enracinées en profondeur prédominent chez chacun." Pourquoi cette conclusion le choque-t-elle ? Harvey n'a fini par l'admettre que parce qu'il s'est senti obligé de se soumettre auxpreuves de ses expériences et de ses sens.

Cette conclusion - le sang doit circuler (comme dans un cercle) - explique la forme, lemouvement et les fonctions des différentes parties du cœur des artères.

Il a donc découvert ce qu'en jargon aristotélicien, on nommeleur "cause finale", à savoir les raisons pour lesquelles ces parties et leurs mouvements sont comme ils sont.

Mais il n'a pu découvrirla cause finale de la circulation elle-même : la raison pour laquelle le sang circule.

En tant qu'aristotélicien, il a donc échoué à laquestion la plus importante, et il est tout à fait conscient du caractère incomplet de son compte rendu. Pour la plupart des autres, les raisons du scandale sont ailleurs.

Avant qu'Harvey ne publie les résultats de son travail, la médecine a pour fondements physiologiques les explications fournies par Galien, un médecin grec qui a vécu à Rome au IIe siècle après J.C.

Ellesconstituent tout ce qu'ont appris les étudiants en médecine, et également ce que la culture populaire a assimilé.

Or Galien a décritdeux systèmes sanguins, presque complètement distincts l'un de l'autre. Le premier, le système veineux, transporte du sang fabriqué dans le foie à partir des aliments.

Il se répanddans toutes les parties du corps, chacune en extrayant ce qu'il lui faut pour se nourrir.

Quant au second,les artères, Galien a soutenu qu'elles ne transportent qu'une partie très raffinée du sang, imbibée "d'espritvital", une "substance" issue de l'air qu'on respire et qui est incorporée au sang artériel dans le poumon.Ce sang a pour fonction d'animer ou de donner vie aux parties du corps.

Le système artériel est alimentéen sang d'origine veineuse, selon des quantités qui se limitent à en maintenir le niveau.

Médecins etanatomistes de l'époque croient qu'il passe des veines aux artères par de petits pores situés dans le septum, la paroi qui sépare le ventricule gauche (sang veineux) du ventricule droit (sang artériel).

Résumons : tout le monde sait que lesang se déplace, mais pense qu'il existe sous deux formes séparées qui chacune se déplace dans deux systèmes différents à finalitédistincte.

Telle est la doctrine sur laquelle repose toute la compréhension médicale. L'horreur des autres médecins face à la découverte de Harvey est dès lors compréhensible.

Si celui-ci a raison - si le sang ne formequ'un seul système et s'il est poussé dans la totalité du corps, des artères vers les veines, par l'action constante du cœur - c'est toutela médecine qui est menacée.

En particulier, la logique pluriséculaire de prescription de la saignée à des fins thérapeutiques (où vousfaites la saignée, dans quelle quantité, selon quelle fréquence, à quelle distance de la partie malade) perd toute sa réalité.

Telle est labase des objections de James Primrose, un médecin anglais qui prend la plume contre Harvey en 1630. En France, Pierre Gassendi soutient contre Harvey l'existence de pores dans le septum.

D'autresdétracteurs, quant à eux, tentent d'apporter une preuve expérimentale contraire à l'existence de lacirculation, ou de fournir des explications alternatives aux expériences de Harvey.

En général, ceux quis'opposent à Harvey sont exclusivement concernés par les conséquences de la circulation chez l'Homme,alors qu'Harvey lui-même a toujours étudié les phénomènes anatomiques chez tous les animaux. De tous les détracteurs, le plus important est Jean Riolan le Jeune, le seul auquel Harvey répond publiquement par écrit.

Riolan,succédant à son père, est doyen de la faculté de médecine de Paris, et de son propre chef un anatomiste très accompli.

Harveypense cependant qu'il ne fait que défendre la médecine dépassée de Galien et qu' " en conséquence, le rôle qu'il joue est plutôt celui d'un orateur qu d'un anatomiste compétent ." Bien que Riolan soit prêt à reconnaître certains aspects de la circulation, il ne peut admette que le sang passe de la partie gauche du cœur à la partie droite en faisant un détour par les poumons .

Harvey suggère alors à Riolan de procéder à des expériences qui, pense-t-il, le convertiront à la circulation.

Mais le destin de Riolan n'était pas d'êtreconverti. Certains médecins et professeurs de médecine se rallieront toutefois à la circulation, les uns tout de suite, les autres après desdoutes et des hésitations.

Citons, parmi les soutiens les plus convaincus, Herman Conring à Helmsted, Franciscus Sylvius etJohannes Walaeus à Leyde, Paul Schegel de Hambourg qui a suivi les cours de Riolan. Chez les Français, il en est un, appelé à devenir extrêmement célèbre et influent, qui embrasse la doctrine de la circulation sitôt qu'ilen entend parler.

C'est René Descartes .

En fait, il l'adopte moins dans les formes qu'Harvey lui a données, qu'il ne la coopte à ses propres fins.

En effet, tout en y adhérant, il la change.

Dans son Discours de la Méthode (1637), Descartes entend décrire le corps comme une machine.

L'une des façons d'y parvenir est de présenter le battement cardiaque comme un système automatique,expulsant vers le corps un sang qui lui-même assure automatiquement toutes les fonctions corporelles.

C'est ainsi qu'il transforme la. »

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