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Sciences & Techniques: Les forces dans la nature

Publié le 22/02/2012

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Rien de plus simple, en apparence, que la notion de force. Rien, en réalité, de plus compliqué à cerner, de plus incertain, voire de plus magique. A tel point que les physiciens ont conçu mille façons de s'en passer. Nous vivons dans un monde mouvant. Voilà un constat bien banal. Dire pourquoi il en est ainsi n'est en revanche pas très simple. Pendant deux millénaires, les meilleures explications sur l'origine des changements ou des mouvements des objets qui nous entourent ont reposé sur les mêmes bases. Celles des conceptions élaborées par Aristote (-385 env.-322). Le philosophe avait constitué une physique parfaitement cohérente et très proche de notre expérience quotidienne de l'espace et du mouvement. Ainsi était postulée en particulier l'existence de lieux naturels et de directions privilégiées. Il y avait, en bas, la Terre avec ses vicissitudes et ses lois. Il y avait, en haut, le ciel et son ordonnancement impeccable. Dans le ciel, les corps se déplaçaient naturellement en cercle, image même de la perfection, sur Terre, une direction privilégiée, la verticale, définissait ce que pouvait être le mouvement naturel (ou non contraint). Les corps ordinaires ne pouvaient alors que tomber au sol et le feu, qui est un peu spécial, ne pouvait que monter.

« Newton (1642 -1727) formulera le principe d'inertie en des termes plus précis, avec sa première loi : " Chaque corps persévère dans son état de repos ou de mouvement uniforme en ligne droite, sauf dans lamesure où il est contraint de changer cet état par des forces imprimées .

" Et si ce n'est pas exactement ainsi que s'exprimeront les physiciens qui viendront après lui (les forces imprimées en particulier ne sontpas les forces tout court), l'idée centrale est bien là.

L'expérience quotidienne montre cependant que tousles corps ne réagissent pas avec la même bonne volonté à nos tentatives pour modifier leur " état demouvement ".

Vous aurez beaucoup moins de mal à déplacer votre stylo qu'à pousser une voiture, et vous pourrez dire que stylo et voiture présentent une inertie très différente! Une grandeur physique a été introduite pour rendre compte decette variété de comportements, c'est la masse, ou plutôt la masse inertielle des corps.

Un corps, par exemple, dont la masse est dedix kilogrammes résiste à une cause donnée dix fois plus qu'un corps dont la masse est de 1 kilogramme… La masse d'un corps, cependant, ne suffit pas à rendre compte de tout ce que l'on observe lorsque l'on modifie l'état de mouvement dece dernier.

Quand vous poussez une voiture, vous êtes certes confronté à son inertie.

Mais vous percevez aussi que l'effort que vousdevez fournir dépend également de la vitesse à laquelle vous allez finalement parvenir à faire rouler votre véhicule.

Afin de rendrecompte de ce double aspect et ainsi définir complètement un état de mouvement, les physiciens ont dû, à partir de Newton, introduireune nouvelle notion : il s'agit de la quantité de mouvement, qui est tout simplement le produit p de la masse inertielle m d'un corps parsa vitesse v (p = m.

v). La deuxième loi de Newton Pour Newton, on l'a déjà suggéré, tout ce qui est à l'origine d'une variation de quantité de mouvement s'appelle une force.

Et c'est larelation fondamentale de la dynamique (ou deuxième loi de Newton) qui fournit le lien mathématique entre une telle variation dequantité de mouvement et la force qu'elle implique.

La force est définie simplement comme le taux de variation dans le temps de laquantité de mouvement (f = dp/dt).

Dans le cas où la masse peut être considérée comme constante (ce qui est faux par exemple pour une fusée , qui au cours de son ascension perd de la masse), la formule se simplifie, et la force correspond au produit de la masse inertielle m par le taux de variation dans le temps de la vitesse, c'est-à-dire par l'accélération a : (f = m.a).

On le voit, une force estfinalement quelque chose de très abstrait, voire d'assez insaisissable, y compris par la physique elle-même! Abstraite, insaisissable et peut-être même magique, pour tout dire.

On n'est pas très avancé, en effet, quand on se contente deremarquer que si l'on observe tel ou tel changement (dans un contexte de mouvement inertiel), c'est que quelque chose, appelée uneforce, en est la cause.

Et après tout, identifier la force au taux de variation de la quantité de mouvement ne semble être qu'une façonbien creuse de donner deux noms différents à une même chose.

On pourrait parfaitement remplacer le mot force par celui d'" âmemotrice ", pour reprendre l'expression de Giordano Bruno, ou même d'ange.

Au XVIIe siècle, l'idée que les forces qui meuvent lesplanètes autour du Soleil soient en fait des anges n'a d'ailleurs pas été absente des débats scientifiques.

Et c'est bien cette difficultéqu'il y a à définir complètement ce qu'est une force qui explique la prudence de Newton quand il affirme " ne pas feindre [imaginer] d'hypothèses ". Ce, d'autant plus que la physique inaugurée par Newton présente un deuxième volet qui semble lui aussi en appeler à quelque chosede miraculeux.

Il s'agit de cette étonnante propriété qu'indépendamment de leur inertie possèdent tous les corps de réagir à laprésence d'autres corps dans leur voisinage.

Autrement dit, tous les corps exercent les uns sur les autres une force bien mystérieuse: l'attraction universelle ou force de gravitation.

Si l'on considère deux corps quelconques – par exemple, un stylo et une voiture, deuxplanètes, ou une planète et le Soleil – cette force dépend de leur distance (en raison inverse du carré de celle-ci : f ~ 1/d 2).

C'est déjà en soi très intriguant. Comme le soulignait le physicien Richard Feynman, la loi d'attraction universelle signifie-t-elle donc qu'" une planète regarde le Soleil,voit à quelle distance il est, calcule l'inverse carré de cette distance et décide de se déplacer en conséquence "? Mais ce n'est pastout.

La force d'attraction dépend aussi d'une caractéristique propre à chacun des corps concernés, leur masse gravitationnelle. A priori, la masse gravitationnelle n'a rien à voir avec la masse inertielle.

La première évoque une étrangeforce qui s'exerce à distance, la seconde une résistance des corps à modifier leur état de mouvement.

Unedes expériences les plus troublantes jamais imaginées par les physiciens suggère pourtant l'existenced'un rapport intime entre ces deux caractéristiques des corps.

Cette expérience, Galilée l'a évoquée en imaginant que l'on lâche du sommet de la Tour de Pise deux objets de masses gravitationnellesdifférentes, comme un boulet de canon et une balle de mousquet, par exemple.

Que peut-on attendre dansce cas? Si l'on s'en tient à ne considérer que la gravitation, c'est simple : la force qui attire vers le sol chacun des corps, autrement dit son poids, est différente.

Un boulet pèse plus qu'une balle… donc, imaginera-t-on, à force plusgrande, accélération plus importante : le boulet devrait parvenir au sol avant la balle de mousquet (exactement comme l'affirmaient lesaristotéliciens).

Mais pas du tout! Les deux corps parviennent au sol en même temps, du moins si l'on veut bien mettre de côté lefreinage occasionné par le frottement de l'air.

La raison de ce comportement inattendu, c'est bien sûr, l'inertie.

Le boulet, qui a unemasse gravitationnelle plus importante que la balle de mousquet, a aussi une masse inertielle plus importante.

Le poids est supérieur,mais la réticence à accélérer aussi.

Et le fait que des corps aussi différents qu'un boulet ou une balle, qu'un marteau ou une plume, ouencore qu'un stylo et une automobile (!) tombent toujours ainsi en des temps égaux signifie – si l'on s'en tient à l'expérience, car s'il existe bien une théorie pour prendre acte de ce fait (la relativité générale d' Einstein ), il n'y en a toujours aucune qui puisse l'expliquer – que la masse inertielle d'un corps est toujours proportionnelle à sa masse gravitationnelle… Tout cela est donc très bizarre.

En fin de compte, au point où nous en sommes arrivés, la seule chose qui pourrait encore sauver lanotion générale de force, c'est qu'elle est susceptible de s'accorder avec des formulations mathématiques particulières.

Ainsi, laformule f = m.

a (où m désigne la masse inertielle) ne voudrait certes pas dire grand chose si l'on ne pouvait poser, par exemple, à. »

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