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Sciences & Techniques: La mort programmée des cellules : l'apoptose

Publié le 22/02/2012

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Alors que vous lisez tranquillement, des millions de cellules s'autodétruisent dans votre corps. Pourquoi ce carnage épouvantable ? Qui, dans notre organisme, autorise ces suicides ? Les biologistes mènent l'enquête. Chronique de l'apoptose, la mort annoncée des cellules. Trente, quarante, cinquante… milliards de suicides tous les jours! Un milliard de victimes au bas mot toutes les heures et je parie que vous n'en savez rien! Pourtant, nom d'un petit bonhomme, vous devriez être au courant! Car vous êtes concerné au premier chef! Pourquoi ? Parce que cette épouvantable tuerie se déroule dans votre propre corps! Mais oui : ces centaines de millions de morts sont des cellules. Les vôtres. Celles qui forment votre foie, vos reins, votre peau, que sais-je encore, vos intestins ou vos poumons. Pareille hécatombe a de quoi faire peur, n'est-ce pas? Votre destin, notre destin à tous, est-il donc de finir un jour en passoire, criblé de petits trous? Non, bien sûr. D'abord, toutes ces disparues ne représentent qu'une petite fraction des 40000 à 60000 milliards de cellules qui constituent le corps humain. Et puis surtout, chaque décès est immédiatement compensé par une ou plusieurs naissances.

« Exemple type : les lymphocytes.

Ils sont chargés d'éliminer les virus et bactéries qui s'introduisent en fraude dans l'organisme.

Ils sereproduisent alors par millions pour submerger et vaincre l'ennemi.

Mais une fois la victoire remportée, que faire de ces ancienscombattants, désormais inutiles? L'organisme, peu charitable, leur ordonne de se donner la mort.

En bons soldats obéissants, leslymphocytes passent l'arme à gauche sans état d'âme.

Au final, il n'en subsistera qu'une poignée qui gardera précieusement lesouvenir de l'adversaire au cas où d'aventure celui-ci tenterait une nouvelle offensive. Comment les ordres sont-ils transmis? Comme souvent, par des signaux chimiques.

Dans le petit peuple des cellules, on passe sontemps à s'envoyer des messages.

Pour se reproduire, se déplacer, apprendre un nouveau métier, travailler en équipe,… et plusétrange encore : pour vivre! Hé oui! Aussi bizarre que cela puisse paraître, toutes les cellules sont programmées pour mourir si rien neles encourage à rester en vie! Ainsi, chez les femmes, les cellules de la paroi de l'utérus se suicident en masse tous les mois.

Pendant une vingtaine de jours enmoyenne, elles ont proliféré sous la houlette d'une hormone sexuelle, l'œstradiol, qui stimule leur division.

Devenue semblable à uneéponge, la paroi est prête désormais à accueillir le minuscule embryon.

Mais si l'ovule n'a pas été fécondé, autrement dit s'il n'y a pasde petit en route avant la fin du mois, la concentration d'œstradiol s'effondre.

Privées de ce signal qui les garde en vie, les cellulesutérines se donnent alors la mort et leur élimination par les voies naturelles est à l'origine des règles. Aujourd'hui, les biologistes commencent tout juste à comprendre comment la suppression des signaux de vie entraînent l'apoptose.L'autodestruction de la cellule est un processus compliqué qui met en jeu un grand nombre de molécules.

Et, comme toute mécanique délicate, celle-ci connaît aussi quelques ratés.

Ces défaillances — autre découverte capitale des années 90 — sont àl'origine d'un grand nombre de maladies.

Beaucoup de cellules cancéreuses, par exemple, refusent mordicus de se suicider alorsqu'elles en reçoivent l'ordre exprès des cellules saines! Pour l'organisme en effet, il y a péril en la demeure : une cellule cancéreuse est une cellule dont les gènes ont muté.

Résultat : elle retourne en enfance et cesse d'accomplir le travail pour laquelle elle a étéconstruite.

Non contente de déserter son poste, elle se divise sans arrêt pour donner des cellules filles aussi fainéantes que leur mère.Cette division anarchique finit par former une masse volumineuse, la tumeur, qui perturbe le fonctionnement normal de l'organe atteintet peut à terme provoquer la mort. Un "suicide" nécessaire Normalement, quand tout fonctionne bien, une protéine particulière, la p53, enclenche l'apoptose dès quela cellule détecte des modifications trop importantes dans son patrimoine génétique.

Mais dans la moitié des cancers , les cellules de la tumeur ont perdu la faculté de se suicider.

La raison? La même que dans le cas du petit ver nématode.

Le gène qui fabrique la protéine en question a subi une mutation.

Résultat : nepeut plus provoquer l'apoptose. A l'inverse, certaines cellules se suicident sans raison valable.

Les maladies de dégénérescence du système nerveux auraient pour origine une apoptose aberrante.

Certains neurones se suicideraient par millions aboutissant ou bien à une paralysie, comme par exemple dans l'amyotrophie spinale, une forme de myopathie; ou bien, si le cerveau est touché, à la perte progressive des facultés de mémoire, de compréhension et de logique de la personne atteinte comme c'est le cas dans les maladiesd'Alzheimer et de Parkinson. Les chercheurs fondent de grands espoirs sur la possibilité de guérir ces malades en fournissant aux cellules les signaux chimiquesappropriés.

Biologistes et médecins ont compris récemment que nombre de traitements utilisés dans les maladies où l'apoptose joueun rôle essentiel empêchaient en fait le suicide ou au contraire le déclenchait.

C'est le cas des différentes drogues et rayons utiliséspour soigner les cancers.

Il y a dix ans encore, on était persuadé qu'ils empêchaient la multiplication des cellules cancéreuses ouqu'ils les détruisaient.

En réalité, ils provoquent l'apoptose dans les cellules de la tumeur en épargnant la plupart des cellules sainesqui sont autour. Et alors? Quelle différence cela fait-ilde le savoir? Énorme! Hier, on soignait sans comprendre, en constatant simplement que certainstraitements donnaient des résultats et pas d'autres.

Aujourd'hui, on sait qu'en sous-main, l'apoptose tire les ficelles.

Voilà qui devraitpermettre de forger des signaux anti ou pro suicide encore plus efficaces.

Et peut-être de vaincre enfin demain des affections aussiterribles que le cancer, les myopathies ou les maladies qui détruisent les cellules du système nerveux. Remerciements à Jean-Claude Ameisen et Jérôme Estaquier (Inserm Unité 13, Hôpital Bichat), et à Thierry Soussi (Inserm Unité 301).. »

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