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Sciences & Techniques: La "bosse des maths" existe-t-elle ?

Publié le 22/02/2012

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La polémique fait rage chez les spécialistes du fonctionnement du cerveau : la maîtrise des mathématiques est-elle innée ou acquise ? Certains savants pensent, expériences à l'appui, qu'un bébé de 5 mois sait déjà compter. D'autres le contestent farouchement. En réalité, la faculté du raisonnement met en jeu tout notre corps, et nos émotions... S'il est un point - peut-être le seul - sur lequel l'humanité s'entend, c'est bien que 1 + 1 = 2. Les spécialistes du fonctionnement du cerveau cherchent par tous les moyens à élucider les arcanes de cette faculté à la fois si singulière et si universelle, le raisonnement mathématique. L'enjeu est en effet de taille : il s'agit d'essayer de reproduire cette fonction cérébrale supérieure dans des machines de plus en plus sophistiquées. Il ne se passe pas de semaine sans qu'un nouveau " progrès " survienne.

« lamelles pour étudier leur cerveau.

Les questions que soulève l'expérience de Wynn sont nombreuses : s'agit-il de calcul ou deraisonnement ? Est-ce un phénomène inné ou acquis ? La première question n'est pas facile à trancher, car, au niveau cérébral, calcul et raisonnement sont deux phénomènes distincts maisfortement interconnectés. Pour ce qui est du calcul chez l'adulte, la manipulation des nombres serait issue, selon le linguiste Noam Chomsky, de nos facultés linguistiques et de notre capacité à manipuler des objets et des collections d'objets.

De concrètes, ces manipulations auraient suivi unmouvement vers l'abstraction et l'efficacité, aboutissant aujourd'hui à deux systèmes qui se côtoient : les nombres parlés ( " sept ") etles nombres arabes ( " 7 "). Faites une expérience : tentez de calculer le produit " trente-cinq fois dix-sept " (en toutes lettres) sans recourir aux nombres arabes.Impossible.

En revanche, " trois fois huit ", rien de plus simple.

Pourquoi cette différence ? Dans le premier cas, vous ne pouvez faireappel à votre mémoire, il vous faut donc utiliser les chiffres arabes.

Dans le second cas, votre mémoire réactive le souvenir des tables de multiplication (qui vous ont tant fait souffrir) stockées sous forme verbale, sans faire appel à la symbolique des nombres arabes. Ainsi, pour les cognitivistes, le calcul met en jeu au moins deux systèmes " symboliques ": le système verbal ( " sept ") et le systèmevisuel ( " 7 "). L'existence de ces deux systèmes a été prouvée par l'étude de nombreux cas de lésions cérébrales.

Voici deux exemples empruntésà Laurent Cohen, neurologue au service de neurologie de l'hôpital de la Salpêtrière, et Stanislas Dehaenne, chercheur au laboratoire desciences cognitives et de psycholinguistique du CNRS.

Le premier est celui d'une patiente présentant à l'évidence un déficit de sonsystème verbal.

Mme D.A.S.

avait de grandes difficultés à résoudre des additions ou des multiplications simples.

Pour l'addition, ellese servait de ses doigts ; pour la multiplication, elle était incapable de trouver le résultat correct.

En revanche, lorsqu'on lui présentaitdes additions et des multiplications à plusieurs chiffres, elle montrait une connaissance parfaite des procédures de calcul, alignaitcorrectement les chiffres et décomposait le calcul complexe en sommes de calculs simples.

Hélas, elle ne pouvait aller au-delà, carelle était incapable d'effectuer les calculs simples (du type 5 x 8 = 40). A l'opposé, M.

B.

était capable d'accomplir toutes les additions et les multiplications à un chiffre, car il puisait dans les tables demultiplication de sa mémoire à long terme.

Cependant, il avait perdu la connaissance des procédures complexes.

Ainsi, lorsqu'il devaitcalculer le produit 142 x 5, il faisait 2 x 5 = 10, 4 x 5 = 20 et 1 x 5 = 5, d'où le résultat absurde 142 x 5 = 52 010. Il existe enfin un troisième système.

Car l'homme ne se contente pas de calculer.

Il " approxime ".

Il y passe même le plus clair deson temps.

Un exemple : si j'écris 23 x 25 = 52, vous allez presque instantanément me démentir, sans pour autant pouvoir me donner le bon résultat. Est-ce que 2 + 2 = 5 ? Voici un exemple encore plus parlant : il s'agit d'un cas de lésion cérébrale entraînant une aphasie sévère (perte de certaines facultésliées au langage ) et une acalculie (perte de la faculté de reconnaître et d'utiliser les nombres) : M.

N.A.U.

avait perdu toute connaissance exacte des nombres et des opérations arithmétiques.

Mais il pouvait traduire les nombres en quantités numériquesapprochées et les traiter comme tels.

Il était incapable de calculer 2 + 2, et ne pouvait rejeter 2 + 2 = 5 comme faux.

Cependant, ilétait capable de reconnaître rapidement que 2 + 2 = 9 était impossible, car il savait que 9 était bien supérieur à 2 + 2.

Ainsi, plus la "distance " entre les nombres était élevée, plus il arrivait à les différencier. Ce cas, parmi bien d'autres, a inspiré aux auteurs l'existence d'un troisième système, de type " analogique ".

Ce système,contrairement aux deux autres (verbal et visuel), manipule non pas des symboles ( " sept " ou " 7 ") mais des quantitésapproximatives.

Le système analogique fait appel à une " technologie " bien plus primaire, voire primitive.

La différence est du mêmeordre que celle qui existe entre la machine à calculer mécanique (de Pascal) et nos calculettes d'aujourd'hui.

Alors que lescalculatrices électroniques manipulent des symboles (0 ou 1), les machines analogiques, elles, manipulent des quantités physiques.Les voltmètres, balances ou thermomètres en sont des exemples.

Notre système analogique de calcul va transformer immédiatementles nombres en grandeurs physiques, en leur associant une longueur (mentale) qui sera traitée sur une ligne numérique.

A partir de là,une addition entre deux nombres prendra la forme de deux segments sur la ligne mis bout à bout, une comparaison entre deuxnombres sera représentée par deux segments mis côte à côte.

L'avantage d'un tel système travaillant en parallèle avec les deuxautres, c'est d'être bien plus rapide.

son inconvénient, c'est qu'il est bien moins précis. Dans le modèle appelé " triple code " par ses créateurs, Laurent Cohen et Stanislas Dehaene, les trois systèmes interagissentconstamment.

Lorsque vous séchez lamentablement devant votre feuille d'impôts, votre système visuel (chiffres arabes) va traiter lescalculs en les décomposant en additions et multiplications élémentaires qui feront appel à des chaînes de votre mémoire verbale ( "trois fois quatre égale douze "), tandis que votre système analogique d'approximations vous abritera de toute erreur grossière - pouvantvous coûter cher dans le cas des impôts !. »

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