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Sartre: Autrui représente-t-il une menace pour le sujet ?

Publié le 12/03/2005

Extrait du document

sartre
Je viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, je ne le juge ni ne le blâme, je le vis simplement, je le réalise sur le mode du pour-soi. Mais voici tout à coup que je lève la tête : quelqu'un était là et m'a vu. Je réalise tout à coup toute la vulgarité de mon geste et j'ai honte. Il est certain que ma honte n'est pas réflexive, car la présence d'autrui à ma conscience, fût-ce à la manière d'un catalyseur, est incompatible avec l'attitude réflexive : dans le champ de ma réflexion je ne puis jamais rencontrer que la conscience qui est mienne. Or autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même : j'ai honte de moi tel que j'apparais à autrui. Et, par l'apparition même d'autrui, je suis mis en mesure de porter un jugement sur moi-même comme sur un objet, car c'est comme objet que j'apparais à autrui. Mais pourtant cet objet apparu à autrui, ce n'est pas une vaine image dans l'esprit d'un autre. Cette image en effet serait entièrement imputable à autrui et ne saurait me « toucher Je pourrais ressentir de l'agacement, de la colère en face d'elle, comme devant un mauvais portrait de moi, qui me prête une laideur ou une bassesse d'expression que je n'ai pas ; mais je ne saurais être atteint jusqu'aux moelles : la honte est, par nature, reconnaissance. Je reconnais que je suis comme autrui me voit.

-          l’homme n’est pas fait pour vivre seul. Il a besoin des autres, non seulement dans l’entraide et la coopération, mais au moins aussi sûrement pour partager le sentiment d’exister. C’est précisément ce que tend à montrer Sartre dans cet extrait.

-          Son jugement, ses découvertes, ses émotions n’ont de signification et de valeur que si d’autres peuvent aussi les éprouver ou les confirmer, si d’autres peuvent en être les témoins ou les garants. Aussi la communication avec autrui apparaît comme le premier besoin et sens doute le plus impérieux de tous. Qu’elle soit possible suppose qu’il existe entre les hommes quelque communauté et qu’autrui ait été reconnu comme mon semblable.

-          Autrui est en effet le même et l’autre ; et c’est cette double structure qui le caractérise. Il y a par conséquent deux façons de méconnaître la relation à autrui : on peut nier qu’il soit différent, ou nier qu’il soit semblable, ce qui, au fond, revient au même. mais autrui n’est ni autre que moi, ni identique à moi. Il est alter ego, c’est-à-dire à la fois un autre moi et autre que moi. Proximité et distance, familiarité et étrangeté qualifient mon rapport à l’autre. C’est justement la définition de la relation à autrui, en tant qu’elle conditionne la relation que j’entretiens à moi-même, qui constitue le soin de l’attention de Sartre.

 

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« Objet du texte Il s'agit de mettre au jour la nature de la relation à autrui et ses mécanisme à la fois complexes etparadoxaux.

Mais, derrière la recherche de la nature de cette relation entre moi et autrui, c'est en réalité la manièredont je peux prendre une conscience objective de moi-même qui se joue dans ce texte.

Autrui apparaît comme lemédiateur indispensable entre le moi purement subjectif qui attend la confirmation de son existence effective dansla relation à la fois réifiante puis libératrice que constitue toute relation à autrui. Problématique De quelle manière, par quel mécanisme tout à la fois complexe et composé de moments dialectiques – nieren dépassant – autrui apparaît comme l'intermédiaire indispensable pour que je puisse prendre, réflexivement,conscience de moi-même en tant qu'être effectivement existant et non pas simplement en tant que s'éprouvantsubjectivement ? C'est donc à la fois la nature de la relation à autrui qui est ici mise à la question, que la relation à moi-même commeconscience objective. Mouvements du texte Pour ce faire, Sartre déploie son analyse en trois principaux moments : - 1er Moment : Ce 1 er moment s'étend du début du texte jusqu'à « la conscience qui est mienne ».

Dans ce 1 er moment, Sartre expose l'épreuve qu'une conscience fait de soi quand elle est seule.

Il introduit, comme s'il en analysait la genèse, le regard d'autrui pour étudier ce qui en découle. - 2e Moment : Ce 2 e moment s'étend de « Or autrui est le médiateur » jusqu'à « que j'apparais à autrui ». De là, il apparaît clairement qu'autrui est celui à partir duquel, par l'intermédiaire duquel la conscience de sois'objectivise et devient conscience de soi-même.

Mais cette relation a pour conséquence première laréification de soi dans le regard de l'autre. - 3e Moment : Ce 3 e moment s'étend de « Mais pourtant cet objet », jusqu'à la fin de l'extrait.

Sartre va s'employer à préciser la nature de cette réification en montrant en réalité que je n'existe pas comme autruime voit seulement dans son regard, non, je me reconnais moi-même comme étant tel qu'autrui me voit et parla je me libère de cette réification première en me reconnaissant moi-même.

En ce sens, il apparaîtclairement que l'expérience de la honte apparaît comme l'exemple synthétique à partir duquel se découvrentles mécanismes d'objectivation de la conscience de soi en conscience de soi-même à travers la relation àautrui. Explication détaillée - 1er MOMENT « Je viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, je ne le juge ni ne le blâme, je levis simplement, je le réalise sur le mode du pour-soi.

Mais voici tout à coup que je lève la tête : quelqu'un était là etm'a vu.

Je réalise tout à coup toute la vulgarité de mon geste et j'ai honte.

Il est certain que ma honte n'est pasréflexive, car la présence d'autrui à ma conscience, fût-ce à la manière d'un catalyseur, est incompatible avecl'attitude réflexive : dans le champ de ma réflexion je ne puis jamais rencontrer que la conscience qui est mienne.

» Le niveau d'analyse auquel se situe la philosophie n'a rien à voir avec celui de l'anthropologie, ni surtout de lapsychologie.

Le philosophe n'énonce pas l'origine historique des conditions de réalisation du sujet dans larelation à autrui mais comment, pour une conscience déjà existante et qui pourtant serait neuve à elle-mêmeet à l'autre, la relation à l'autre est fondatrice d'une relation à soi.Bien évidemment, aucune conscience n'existe comme telle, aucune conscience n'émerge sans être déjà celled'un sujet ayant préalablement connu une construction psychique, que précisément la psychologie étudie pasà pas.

cela n'enlève rien au caractère fondamental de l'analyse philosophique qui étudie dans l'absolu ce qui serévèle vrai dans tous les cas, à savoir cette médiation que l'autre représente dans la quête de son propre être.Et pour Sartre, l'expérience de la honte est figurative de cette constitution objective de soi-même par l'autre.L'essence de la conscience, pour Sartre est liberté.

Cette liberté a pour autre nom le néant, le non-être.

Laliberté c'est en effet la négation de ce qui est.

Elle n'est possible que par l'existence en moi d'un espace vide,d'un jeu entre les déterminations de l'être.

C'est précisément parce que je ne suis pas quelque chose que jepeux changer, que je peux évoluer, que je peux me créer autrement.

Ce néant, ce manque d'être propre à laconscience s'appelle, en positif, la liberté.

Il s'exprime d'abord sous la forme des négativités que sont les. »

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