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Qu'est-ce qu'un être vivant ?

Publié le 22/02/2012

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          En posant cette question, on pose une question d'essence, c'est-à-dire une question portant sur les caractéristiques immuables d'un objet. On appelle une définition, en l'occurrence, la définition de ce qu'est un être vivant. Deux hypothèses s'offrent à nous : A- L'adjectif "vivant" vient-il spécifier le terme d' "être" ? La question porterait alors sur une espèce d'être, un être qui serait, notamment "vivant", de même que, par exemple, il y a des tapis qui sont, notamment, bleus. B- Ou bien "être" et "vivant" sont deux termes qui s'appellent réciproquement et être vivant serait à considérer comme un genre. On est rapidement conduit à suivre cette deuxième voie si l'on considère ce que l'on qualifie par être vivant. En effet, portent le nom d'êtres vivants, les végétaux, aussi bien que les animaux et les êtres humains. Devant cette multiplicité d'êtres vivants, la question " Qu'est-ce qu'un être vivant ?" interroge le genre commun à tous ces êtres.

« I.

Quel que soit l'axe de recherche, n'y a-t-il pas des caractéristiques de l'être vivant communément reconnues ? A- Si nous ne sommes pas en mesure de dire ce qu'est la vie, peut-être pouvons-nous établir ce que la vie n'estpas.

Ainsi le terme qui semble immédiatement opposé à la vie est la mort.

Or, qu'est-ce que la mort ? Tout d'abord, il ne peut être de mort que pour un être qui a vécu.

Il n'y a mort que s'il y a eu naissance.

Donc encaractérisant la mort, on caractérise déjà la vie.

De la naissance à la mort, l'être vivant naît, croît ou mûrit, dépéritet meurt.

Pendant ce processus , l'être vivant se nourrit.

Il y est contraint pour vivre.

Cela lui est nécessaire ; il ne peut en être autrement.

A l'exception de quelques êtres dont on dit qu'ils "vivent pour manger" (expression ironiqueopposant désir et besoin), tous les êtres vivants doivent "manger" pour vivre.

Certes, les plantes ne "mangent" pas.Pour éviter cet anthropomorphisme, disons que tout être a besoin pour vivre et croître de matière, soit recherchée,soit produite par lui-même.

La plante procède en effet à la photosynthèse et produit ce dont elle a besoin, tandisque les animaux et les hommes doivent rechercher leur alimentation.

Ainsi Bergson distingue-t-il le monde végétal dumonde animal dans L'évolution créatrice : " On sait que le végétal emprunte directement à l'air, à l'eau et à la terre les éléments nécessaires à l'entretien de la vie , en particulier le carbone et l'azote : il les prend sous leur forme minérale.

Au contraire, l'animal ne peut que s'emparer de ces éléments que s'ils sont déjà fixés pour lui dansdes substances organiques par les plantes ou par des animaux, de sorte qu'en définitive, c'est le végétal qui alimente l'animal ".

Au-delà de la distinction faite ici par Bergson entre végétaux et animaux, il y a un élément commun : "les éléments nécessaires à l'entretien de la vie".

Le passage par la mort a donc permis de dégager la viecomme processus.

Entre les différents règnes, il n'y a qu'une différence de degré. L'idée de substance nutritive nécessaire à l'entretien de la vie nous met ainsi sur la voie d'un dénominateur communaux êtres vivants, mais l'adjectif "organique" n'est pas anodin et ne semble pas devoir passer sous silence. B- Le terme " organique " ouvre la voie d'une détermination positive de la vie.

Le passage du texte de Bergson indique en filigrane qu'il n'y a de vie que là où il est question d'organique.

nous sommes donc amenés àconsidérer la notion d'organisme.

En effet, ici la " substance organique " se caractérise par son opposition au terme " minéral ".

La notion d' "organisation" serait-elle alors le maître mot de la vie, quelle que soit sa forme ? Qu'est-ce alors qu'une "organisation" ? Par exemple, une organisation syndicale est une structure hiérarchisée danslaquelle chaque membre syndiqué concourt à la même fin, en interaction avec les autres syndiqués.

En d'autrestermes, toutes les parties concourent simultanément au tout qui est l'organisation syndicale.

Par analogie, unorganisme se caractérise comme ce dont chaque partie ne prend sens que par rapport aux autres parties del'organisme.

A ce titre, l'organisme est un système.

N' y a-t-il d'organisme que vivant ? Si l'on compare une pierreet une fleur, la pierre, le caillou est un fragment de roche.

La fleur n'est pas un fragment ; elle est à elle toute seuleun tout.

La pierre n'est pas vivante, n'a ni naissance, ni mort, tout au plus une transformation par l'érosion.

Elle neforme pas un tout autonome.

A contrario , ce qui forme un tout autonome est vivant. Mais alors si l'on tire les conséquences de la notion d'organisme, de système, on pourrait presque en venir à affirmerqu'il y a plus d'espèces d'êtres vivants que celles posées précédemment (végétal, animal, humain).

En effet, s'ilsuffit d'être un tout dans lequel chaque partie est en interaction avec les autres, alors le monde lui-même est unêtre vivant, pour peu que l'on soit leibnizien ! En effet, dans La Théodicée , Leibniz considère que notre monde est bien un tout au sein duquel chaque partie, chaque événement, est déterminé par rapport aux autres événement,conditionné par les autres événements qui ne sont pas contradictoires avec lui, selon le plan de l'histoire du mondecréé par un Dieu sage qui aurait choisi certains événements et, du coup, banni d'autres événements incompatiblesavec la suite logique des premiers, et conservé la possibilité des événements compatibles entre eux.

Le monde etson histoire apparaît ainsi, à un regard divin qui perçoit l'enchevêtrement systématique des parties d'un tout, commeun système où tout se tient, où tout fait sens.

Pour Leibniz, le monde est un système, une gigantesque combinaisonorganisée selon un savant calcul divin pour que ce système comprenne le plus d'éléments bons possibles.

C'est le"meilleur des mondes possibles" ; c'est l'optimisme leibnizien.

Une organisation faisant sens et en laquelle tout setient, tel est le monde pour Leibniz, conçu comme un système où tous les événements sont en interaction pourproduire, au final, un monde comprenant la plus grande somme de bien possible. La notion d'organisation permet ainsi de conceptualiser la notion de monde.

Mais ce terme ne doit pas nous égarertrop loin.

Certes, la philosophie peut envisager le monde et l'histoire du monde comme un système, un tout formé departies en relation qui se conditionnent mutuellement.

Mais en ce qui concerne le vivant, une de sescaractéristiques est l'autonomie.

Or, un monde leibnizien peut-il être entendu comme autonome dans la mesure où il est sous la dépendance de la sagesse divine qui l'élit parmi les autres mondes possibles ? La notion d'autonomie,en revanche, appelle les notions d'autoconstruction, d'autorégulation… Elle nous est fournie par les découvertesnotamment génétiques qui font apparaître l'idée d'un programme interne à chaque organisme vivant.

En effet, l'organisme vivant réalise ce qu'il est presque indépendamment des circonstances extérieures, en fonction de sonprogramme génétique.

C'est ainsi que l'organisme peut être différencié d'une simple machine créée par l'homme oud'un monde où les événements, les faits singuliers, seraient tellement imbriqués en vue d'une même fin, que cetteconception organiciste de la création ferait appel à l'idée d'un dieu architecte.

Cette caractéristique du vivant enrevanche, l'autonomie, on peut la nommer avec Jacques Monod, ainsi qu'il le fait dans Le hasard et la nécessité , une. »

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