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Quel sens et quelle valeur peut-on accorder à l'expérience ?

Publié le 29/10/2009

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ANALYSE DU SUJET. CONSEILS. REMARQUES DE MÉTHODE • Devant l'intitulé de la question, vous vous interrogerez de prime abord sur le sens des concepts : sens = signification; valeur = caractère qui fait qu'on estime quelque chose et qu'on admet sa supériorité. Mais le concept qui va poser immédiatement problème est celui d'expérience. La difficulté va tenir pour vous avant tout à la multiplicité de significations du mot expérience ; en effet, il y a l'expérience au sens très empirique et tout à fait concret du terme, mais il y a aussi l'expérience scientifique, conçue comme expérimentation et organisation méthodique des phénomènes et, enfin, en simplifiant encore beaucoup les choses, il y a, au-dessus de ces expériences, celle où s'unissent l'individuel et l'universel, du type expérience esthétique ou métaphysique. • Dès lors, devant la multiplicité de sens du mot expérience, vous avez avantage à adopter le plan progressif, par approfondissement des notions, de manière à établir une structure logique répondant pleinement à l'intitulé précis du sujet. Le plan dialectique, par thèse, antithèse et synthèse ne paraît pas ici en mesure d'intégrer vos différents éléments de connaissance et de réflexion. Poitiers • Quelle que soit la signification du terme expérience, celle-ci se présente comme l'épreuve relativement subie d'une réel étranger. Comment une épreuve extérieure au sujet peut-elle avoir sens et valeur? Tel est le problème posé par l'intitulé du sujet. DISSERTATION 1. Introduction L'intitulé de la question nous met, tout d'abord, face au concept de sens, qui est d'une étonnante diversité. Ici, nous nous ne retiendrons ni le sens comme fonction psychophysiologique ni le sens comme jugement, mais conserverons l'acception courante du mot sens comme signification. Quant au terme de valeur, définissons-le ici comme un caractère des choses, consistant en ce qu'elles méritent plus ou moins d'estime. C'est le terme d'expérience qui pose problème, à cause de la multiplicité de sens de ce mot. L'expérience désigne ce qui nous est donné sensiblement et empiriquement, mais aussi l'expérimentation, l'action d'expérimenter (faire des expériences scientifiques) et, enfin, un troisième type d'expérience (métaphysique, esthétique, etc.), où semble s'incarner l'universel, où vient peut-être à jour l'absolu.

Néanmoins, à ces trois niveaux et malgré cette diversité, le terme d'expérience gagne à être unifié. Dans tous les cas, il semble bien qu'il y ait, dans l'expérience, un élément de passivité et de réceptivité, comme si en elle quelque chose était donné qui n'est pas entièrement constitué par le sujet. Parler d'expérience, c'est signifier que nous faisons l'épreuve d'un réel étranger. L'intitulé de la question témoigne de quelque méfiance vis-à-vis du concept d'expérience, tel que nous venons de le définir. Aussi, en mettant l'accent à la fois sur le sens du terme expérience (élément de passivité présent dans toute connaissance humaine) et sur le verbe pouvoir (quelle valeur peut-on accorder, est-il légitime d'attribuer...) nous dirons que le problème qui surgit est le suivant : si l'expérience désigne le fait d'éprouver (plus ou moins passivement) quelque chose, comment cet élément de réceptivité peut-il être formateur et signifiant et n'y a-t-il pas quelque difficulté à valoriser la pure réception d'un donné? En somme si l'expérience renvoie éventuellement à quelque « table rase « où s'inscriraient en nous les choses, comment peut-elle véhiculer réellement signification et valeur ?

« naïvement affirmée, Hegel oppose son néant effectif.

L'expérience sensible immédiate ne peut dire son objet(puisqu'elle ne peut introduire aucune médiation).

Elle l'éprouve donc comme ineffable.

Mais cet ineffable est, enréalité, ce qu'il y a de plus pauvre ! Si l'expérience sensible immédiate s'apparaît à elle-même comme infinimentprofonde et infiniment riche, en fait, sa réalité est inconsistante, pur néant, pure vacuité, absence totale de sens etde valeur.Quel sens et quelle valeur peut-on accorder à l'expérience sensible immédiate? On ne peut tirer de ce néant nullesignification vraie puisqu'il se dérobe à nous.

Quant à sa valeur, elle semble elle aussi se transmuter en non-valeur.L'immédiat est ce qu'il y a de plus pauvre.

Aussi l'élément de pure réceptivité et de pure passivité ne saurait êtrevalorisé.

En vérité, l'expérience sensible ne pourra acquérir de sens et de dignité que si elle est unifiée par l'Esprit,organisée par le moi.

Alors les données fragmentaires, évanescentes et diverses accèdent progressivement à l'unité.Nous parvenons à la perception et à l'unité de la conscience. Ainsi l'expérience sensible se ramène-t-elle finalement au sujet.

Le sensible n'a de sens et de valeur que par rapportau sujet et à l'esprit.

Ainsi les sensations nous renvoient-elles à un sujet qui est leur fondement.

A ce niveau, il n'ya pas d'expérience pure en tant que telle, mais un sujet unifiant une multiplicité.

C'est donc le sujet qui fonde lavérité et la valeur de l'expérience prise en sa première signification, comme expérience concrète. B) L'expérience au sens scientifique du terme : l'expérimentation. L'expérience désigne, nous le savons, non point seulement l'intuition empirique concrète, mais aussi l'interrogationméthodique et réglée des phénomènes.

Ici expérience est synonyme d'expérimentation, au sens scientifique duterme.

L'analyse philosophique de la notion d'expérience a donc maintenant pour objet un tout autre domaine queprécédemment.

Ce que nous appelons désormais expérience, c'est le travail d'interrogation des phénomèness'effectuant à travers un certain nombre d'opérations (mesure des paramètres, etc.).Quel sens et quelle valeur accorder ici à l'expérience conçue comme expérimentation? Elle renvoie, elle aussi, danssa visée effective et authentique, au sujet fondateur.

En effet, sa signification fondamentale est celle d'une activitéde l'esprit questionnant les phénomènes.

L'expérimentation consiste à laisser la raison prendre les devants pourinterroger la nature : tel semblent être le concept scientifique d'expérimentation et sa signification essentielle.Comme l'a écrit Kant : la raison ne voit que ce qu'elle produit elle-même d'après ses propres plans, elle doit obliger lanature à répondre à ses questions et ne pas se laisser conduire en laisse par elle.

Ainsi se présentel'expérimentation, dont le sens semble être d'abord de provoquer les faits et de les modeler, comme un juge forceles témoins à répondre aux questions qu'il leur pose.

Aussi l'expérimentation est-elle tout entière relative à l'initiativespirituelle qui y est contenue.

Elle n'est rien sans l'idée.

Sans cette dernière, le chercheur ne peut que se perdredans l'océan des phénomènes.

Toute la valeur de l'initiative expérimentale tient précisément à l'Idée, relationnouvelle que l'esprit aperçoit entre les phénomènes.

L'expérimentation ne possède donc de valeur que dans lamesure où elle présuppose une activité du sujet.

Bien plus encore que précédemment, l'empirisme s'avoue ici vaincu.Alors qu'il conçoit l'esprit comme une cire molle recevant une empreinte, la méthode expérimentale s'affirme lorsquel'esprit s'impose aux soi-disant faits.Ainsi c'est l'expérimentation active qui est le chemin sûr du savoir scientifique et qui possède la plus grande valeuret la plus grande dignité.

L'expérimentation conçue comme question posée mathématiquement à la nature possède àla fois sens (celui d'une activité rationnelle de l'esprit humain) et valeur (de construction, d'élaboration, d'invention).Nous ne pouvons accorder de sens et de valeur à l'expérience que si précisément elle n'est pas pure réceptivité,mais aussi et surtout invention de la raison, initiative spirituelle du sujet.

C'est toujours le sujet fondateur qui donnesens et valeur à l'expérience. C) L'expérience métaphysique. Nous avons vu que l'expérience peut s'entendre, soit au sens d'expérience sensible immédiate, soit au sensd'expérience scientifique et d'expérimentation.

Dans les deux cas, c'est le sujet qui apporte à l'expérience sa réalité,son sens et sa dignité.Mais au terme de toute réflexion sur l'expérience, expérience immédiate, expérimentation, mais bien d'autres aussisur lesquelles nous ne pouvons nous attarder, expérience morale ou esthétique par exemple, il semble que seprésente à nous une expérience ultime, fin et couronnement des étapes antérieures, les dépassant par son degré degénéralité : telle serait l'expérience métaphysique, toutes les autres renvoyant à un « quelque autre chose » qui lesfonde, quelque autre chose spécifique de cette « expérience métaphysique».

Quel sens faut-il donner à cetteexpérience? Il semble qu'il faille voir en elle une saisie de l'Absolu ou de l'Être, une sorte « d'expérience-limite » où sedonneraient à nous la totalité et l'unité de tout ce qui est.

Quel sens et quelle valeur peut-on accorder àl'expérience ainsi conçue?Si l'expérience métaphysique consiste en une saisie d'une réalité transcendante (Être, Dieu, Idée, etc.) donnantintelligibilité aux expériences antérieures, si sa signification essentielle est d'être une tentative d'appréhension dequelque absolu, elle n'est peut-être pas susceptible d'être créditée d'une valeur authentique, pourrait-on montrer,dans une perspective kantienne.

Nulle expérience possible de l'Absolu puisque nous pouvons seulement appréhenderdes phénomènes, à savoir une matière sensible empirique organisée par une forme (espace, temps, catégories...).L'expérience métaphysique est impossible et n'a pas de valeur réelle : la métaphysique joue seulement un rôlerégulateur dans la connaissance mais il n'y a pas d'expérience métaphysique à proprement parler.Néanmoins, ce renoncement ne nous paraît nullement aller de soi.

Notons que l'expérience métaphysique condamnéepar Kant retrouve d'ailleurs un sens avec les postkantiens et Hegel tout particulièrement, puisqu'elle se confondalors avec le devenir de l'Esprit se faisant, avec le mouvement même de l'Idée.

La métaphysique, c'est alors ladialectique spirituelle.

Dès lors, c'est le dynamisme de l'ldée qui donne sens et valeur à l'expérience métaphysique de. »

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