Devoir de Philosophie

Pouvons-nous apprendre quelque chose de nos erreurs ?

Publié le 23/03/2009

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- Cette question, au premier abord, paraît claire. Elle réclame pourtant un examen rigoureux, sous peine de confondre l’erreur et la faute. Une faute n’est pas une erreur. La faute est la transgression d’un interdit, d’une loi morale ou juridique, on parle alors d’ « infraction «, ou la transgression d’un loi religieuse, on parle alors de « péché «, ou encore la transgression d’une règle, comme par exemple la faute d’orthographe ou de grammaire, ou la faute au football qui peut valoir au fautif un carton jaune, voire rouge. L’erreur, elle, appartient au domaine de la connaissance. Elle consiste toujours en un faux savoir. Or, l’objet d’un savoir est toujours une vérité. Par conséquent, l’erreur est le contraire de la vérité. - Cette mise au point nous permet de mieux appréhender le sujet. Si l’erreur est le contraire de la vérité, alors il faut admettre qu’en elle-même et par définition, elle ne nous apprend jamais rien. Apprendre, c’est en effet acquérir un savoir, une connaissance, bref une ou des vérités. L’erreur, elle, ne nous fait pas avancer sur le terrain du savoir. Par-delà, si l’on se fie au sens commun, ce sujet appelle donc une réponse négative catégorique. Toutefois, après avoir exposé dans une première partie la distinction erreur-faute et la définition de l’erreur, il va falloir dépasser ce sens commun. - Dés-lors, la découverte ou la prise de conscience de l’erreur sera une notion déterminante pour traiter ce sujet. En effet, découvrir son erreur, c’est s’apercevoir que ce que l’on croyait vrai est en réalité faux. « Apprendre de ses erreurs « est une expression qui peut aussi signifier : apprendre de la prise de conscience de ses erreurs. Le sujet ainsi posé invite à découvrir un certain nombre d’enseignements, de vérités que pourrait révéler la découverte de l’erreur. Attention, ici, il ne faut pas tomber dans le piège de l’ « énumération «. On ne demande jamais, dans un devoir de philosophie, un catalogue de réponses. La règle est toujours la même : problématiser. Ici, l’alternative est la suivante : soit il n’y a rien à apprendre de nos erreurs, si ce n’est qu’elles sont possibles ; soit nos erreurs ont le mérite, par la rectification qu’elles appellent, de nous faire progresser sur le chemin de la vérité.  

Introduction

L’erreur est le contraire de la vérité. Une erreur, par définition, ne nous apprend donc rien. En revanche, nous avons sans doute quelque chose à apprendre de l’erreur démasquée. L’enseignement d’une telle découverte peut n’être que pratique : humilité, prudence, vigilance, etc. Nos erreurs ne nous révèleraient rien d’assuré mais seulement une possibilité, un risque de pouvoir encore nous tromper. Mais ne peuvent-elles pas nous apprendre davantage encore ? En fait, pouvons-nous  apprendre de nos erreurs, que peuvent-elles nous enseigner ? Toute erreur démasquée ne conduit-elle pas à la découverte d’autres erreurs ? La problématique commune à ses différents points de vue peut se résumer ainsi : la prise de conscience de l’erreur peut-elle entraîner un progrès de notre connaissance et par quel moyen ?  

 

« d'opinions contradictoires dont certaines auraient le privilège d'être choisies pour vérité ? C'est ce que réfute lapratique de l'entretien dialectique de Socrate où les opinions, une fois mises en commun dans le dialogue, perdentla singularité qui les rattachaient à leur émetteur.

Il importe peu que l'opinion qui coïncide avec la vérité proviennede Socrate ou de son interlocuteur car quelque soit son origine, elle est à la lettre, produite par le dialogue.

AinsiSocrate dans le Protagoras (337c-338 e) refuse de choisir un arbitre qui déterminera qui a raison : « l'entretien est à lui-même son propre arbitre ».

Par conséquent, c'est par le moyen du dialogue que la raison produit un accordentre les hommes. Cependant on peut douter que la raison soit susceptible de produire cet accord universel.

La raison est unefaculté dont jouissent tous les individus.

En effet chacun, lorsqu'il désire obtenir l'accord des autres en réduisantleurs opinions à la sienne, prétend avoir la raison pour lui.

Aussi la tentative même de produire un accord par laraison serait par nature vouée à l'échec. II La raison ne permet pas de mettre les hommes d'accord _ On peut douter de la possibilité de sortir du désaccord par la raison.

La raison est en effet une instance supraindividuelle, mais il n'est pas certain qu'elle vainc les résistances que lui opposent les individus.

Les hommes sontdes êtres rationnels, cela signifie qu'ils se distinguent des autres êtres par la raison.

Néanmoins la raison ne faitpas le tout de leur nature.

Les hommes sont des êtres rationnels qui ne sont constitués qu'en partie par la raison.Pour le reste, ils sont des être sensibles et surtout passionnels.

La passion qui les domine la plupart du temps estl'orgueil, c'est à dire l'excès de l'amour de soi.

Ainsi les hommes sont tellement déterminés par l'orgueil qu'ilspeuvent reconnaître en leur for intérieur la vérité d'une opinion, mais la nier ouvertement parce qu'elle nes'accorde pas avec celle qu'ils ont eux-mêmes professé.

Mais c'est peut-être encore faire preuve de tropd'optimisme que de penser que ce qui empêche les hommes de s'accorder se réduit à leur mauvaise volonté.

Eneffet la plupart du temps, la détermination de la raison par les passions comme l'orgueil n'est même pas aperçuepar la raison.

Ainsi au fragment 983 de ses Pensées en édition Lafuma, Pascal écrit : « les raisons me viennent après, mais d'abord la chose m'agrée ou me choque sans en savoir la raison ».

Si la raison est en retard sur lespassions, elle peut être déterminée par l'orgueil sans même le savoir.

Ainsi même les hommes de bonne volontépeuvent se croire en désaccord pour de bonnes raison quand leur désaccord résulte de l'orgueil inaperçu. _ Plus encore que l'investissement affectif plus ou moins conscient déterminant les opinions, c'est l'usage même dela raison qui empêcherait l'accord entre les hommes.

En effet, quand chacun cherche à défendre son opinion, ilclame pour lui avoir la raison.

Qu'est-ce à dire ? Les hommes sont souvent conscients que d'avancer leur opinionsous un aspect personnel et singulier est une stratégie défectueuse qui ne peut que provoquer le désaccord desautres individus.

Il s'agirait alors d'adopter une stratégie oblique en parant son opinion individuelle du voiled'universalité dont jouit la raison.

L'utilisation malhonnête de la raison jette alors le discrédit sur elle et nousamène à douter qu'elle puisse nous faire accéder à la vérité.

Nous pensions que la raison était capable de mettreles hommes d'accord parce qu'elle permettait un accès à la vérité, surpassant par nature les contradictions desopinions individuelles.

Néanmoins est-il certain que la raison puisse nous faire accéder à une quelconque vérité ?C'est ce que nie Montaigne qui dans ses Essais (II, 12) l'appelle « couche pleine de fausseté, d'erreur, de faiblesse et de défaillance ».

La raison prétend connaître les choses, mais les choses sont dans un mouvement et un chaosperpétuel qui empêche leur connaissance.

De plus aucun homme ne peut prétendre connaître les choses car onignore si la connaissance fait partie de la définition de l'homme.

L'homme ne se connaît pas lui-même : « qui nes'entend en soi, en quoi se peut-il entendre ? ».

En ce sens la raison se réduit à une prétention de l'espècehumaine, un « cuider » illégitime provoquant le désaccord des hommes entre eux. _ La raison, loin de mettre les hommes d'accord entre eux, est l'origine fondamentale de leur désaccord.

C'estparce que les hommes ont une confiance aveugle dans le pouvoir de la raison qui leur donnerait un accès privilégiéà la vérité qu'ils la revendiquent tous pour eux-même.

Ils prétendent alors illégitimement obtenir l'accord desautres hommes sans qu'aucune instance leur permette de produire cet accord.

En l'absence d'une vérité quimettrait d'accord les hommes entre eux, les opinions se contredisent et provoquent un désaccord entre leshommes et la raison fait office de masque derrière lequel se cachent des entreprises de légitimation de soi ?Chacun cherche au fond au nom de la raison à absolutiser sa propre singularité en vérité, et c'est par là que toutaccord est impossible.

Si c'est l'utilisation de la raison qui est au fondement du désaccord, il s'agirait alorsd'abandonner la prétention à emporter l'adhésion des autres individus pour annuler ce désaccord.

Ainsi Montaigneécrit « nous sommes chrétiens au même titre que nous sommes périgourdins ».

Si la confession a la même origineque la provenance géographique, elle ne peut prétendre constituer une vérité religieuse absolue.

Ainsi la conditiond'un accord entre les hommes ne serait pas la raison, mais au contraire la connaissance de la faiblesse de la raisonet de la possibilité d'avoir une opinion contraire à la mienne.

C'est parce qu'on a renoncé à la raison en tant quepouvoir d'accéder à la vérité que l'on pourra s'accorder sur la possibilité d'une pensée plurielle, infiniment variée etdiverse sans qu'elle produise un désaccord.

On voit par là que l'universel n'est plus du côté de la raison, mais de lacondition humaine fondée sur la faiblesse de la raison : « Chaque homme porte en lui la forme entière de l'humainecondition » (III, 2). »

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