Devoir de Philosophie

Pour philosopher vaut-il mieux être savant ou suffit-il d'avoir des opinions ?

Publié le 27/02/2008

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Mais si le philosophe est un savant, que faut-il alors connaître pour philosopher et qu'est-ce que ces connaissances auraient de spécifique, qu'est-ce qui les opposerait au savoir ordinaire, courant que chacun peut prétendre avoir sur l'existence et les choses ? Par ailleurs, si l'on admet que les discours philosophique réclame un savoir spécifique, cela signifie-t-il pour autant qu'il doive exclure, rejeter l'opinion ? Cela ne serait-il pas paradoxal dans la mesure où ce discours traite de questions qui bien souvent intéressent l'opinion, émergent même en elle, même si elle ne les formule pas de la même manière ? Ne faut-il donc pas, à l'intérieur même du champ philosophique, reconnaître une certaine légitimité à l'opinion ? Quelle serait alors sa place ? Comme on le voit, nous sommes conviés à nous interroger sur la nature de l'activité philosophique et plus précisément sur les rapports entre philosophie, science et opinion. Dans un premier moment nous verrons donc en quoi il est possible et même nécessaire d'opérer un rapprochement entre la philosophie et l'opinion, mais constatant que cette dernière semble constituer un obstacle au véritable questionnement philosophique, nous en viendrons à admettre que le philosophe doit s'en écarter d'une manière ou d'une autre et que la philosophie est bien une affaire de spécialiste. Pour autant nous verrons que contrairement au discours scientifique, le discours philosophique ne vise pas l'accumulation de connaissances et que de ce point de vue il ne saurait être assimilé au discours du savant : le philosophe ne serait ni dans l'opinion ni dans la science.

« Transition Ainsi, le fait que le discours philosophique trouve ses objets dans l'opinion elle-même nous inciterait à penser que cediscours philosophique ne saurait être celui d'un savant, que l'opinion lui est à tout le moins nécessaire, voiresuffisante.

Cependant, l'opinion a-t-elle réellement la capacité à s'interroger sur ces objets, et si c'est le cas, cetteinterrogation est-elle authentiquement philosophique ? Deuxième partie Cette question va ici nous amener à montrer que si la philosophie ne saurait effectivement se passer de l'opinion,pour autant, l'activité philosophique exige un dépassement de l'opinion, dépassement qui est tel que le discours duphilosophe ne peut s'assimiler au discours courant et spontané, qu'il se rapproche donc du discours d'un savant encela qu'il s'élabore selon des règles, des principes l'amenant à rompre au moins en partie avec le discours del'opinion.En effet, l'opinion ne se caractérise pas seulement comme avis spontané, comme discours ordinaire et courant surles choses : ce qui la définit justement en tant que discours spontané et courant c'est sa difficulté, sinon sonincapacité à s'interroger, à mettre en question.

Ainsi pour elle tout semble aller de soi, tout tend à devenir familier,évident : rien ne lui pose véritablement problème.

Ou si quelque chose pose question, cette question doit êtreeffacée et est effacée le plus rapidement possible par une réponse sans ambiguïté, une réponse finalementrassurante qui ne déstabilise pas l'ordre établi et la vision du monde dans laquelle on est ancré, de telle sorte qu'onpuisse immédiatement se consacrer à nouveau à nos occupations habituelles.

Ce qui caractérise donc égalementl'opinion c'est l'adhésion spontanée, « naturelle » à ce qui est établi.

Opiner c'est dire oui.Or le propre du discours philosophique, comme le reconnaît l'opinion elle-même, c'est qu'il « cherche la petite bête »,qu'il voit des problèmes là ou l'opinion n'en voit pas.

Pourquoi serait-il donc nécessaire de « chercher cette petitebête » pour philosopher ? Précisément parce que pour commencer à réfléchir sur ces différents éléments del'existence humaine, dont on a parlé précédemment, comme s'y emploie la philosophie, il faut déjà qu'ils suscitent ennous des interrogations, qu'ils nous posent problème (sinon pourquoi perdre notre temps à réfléchir ?).

En cela, ladémarche philosophique est bien proche de celle du savant : dans les deux cas, ce qui est premier c'est bien lequestionnement.

A la différence que pour le savant il s'agit d'interroger des faits, alors que les objets sur lesquelsportent le questionnement du philosophe sont plutôt des idées : les idées qu'on a sur la mort, le bonheur, le désir, lamorale etc., idées qui sont en général liées les unes aux autres et qui forment ce qu'on peut appeler desconceptions du monde.

En effet si l'opinion ne s'interroge pas véritablement, c'est qu'elle contient déjà en elle mêmedes réponses toutes prêtes, des idées toutes faites sur l'existence en général, sur la mort, le désir, la morale etc.,idées et réponses qui semblent si évidentes qu'il n'est plus utile de les expliquer, de les expliciter et donc d'yréfléchir : ces idées ne sont même pas pensées par l'opinion, elles ne font pas l'objet d'un savoir.

Elles sontinaperçues.

Si donc philosopher c'est se questionner sur l'existence, cela implique qu'il faut d'abord commencer parquestionner l'opinion elle-même de manière à faire émerger ces idées, ces conceptions qu'elle véhicule et à faireévanouir leur évidence.

En conséquence, la philosophie se veut par principe paradoxale et critique.

Ce qui signifiebien que même si elle ne peut se passer de l'opinion, elle ne peut pour autant se confondre avec elle : elle n'est pasl'opinion, mais le discours qui interroge l'opinion de manière à réfléchir et à penser ce que cette dernière ne pensepas véritablement (ce qui implique bien de la dépasser).

Dans ce sens très précis, peut-être même pourrait-onprésenter la philosophie comme une science de l'opinion. TransitionAinsi l'opinion n'étant par nature pas suffisante pour philosopher, il pourrait sembler que le philosophe puisse seprésenter comme un savant et donc la philosophie comme une science.

Mais alors comment rendre compte de lacoexistence de différentes philosophies, du fait même que chaque philosophe prétende avoir sa propre philosophie,fait qui en plus ne nous semble pas particulièrement surprenant alors que nous trouverions profondément choquantou absurde le fait qu'un physicien affirme élaborer sa propre science physique ? Troisième partie Dans ce dernier moment nous défendrons donc plutôt l'idée que la philosophie ne saurait pas plus s'assimiler à lascience qu'à l'opinion : le fait qu'elle ne puisse se constituer comme le discours d'un spécialiste sur son domaineréservé ne permet pas d'affirmer qu'elle n'est qu'une affaire d'opinion, mais d'un autre côté le fait qu'elle implique undépassement de l'opinion ne permet pas pour autant de la considérer comme connaissance achevée.En effet, ce qui la distingue aussi bien de l'opinion que du discours du savant, c'est qu'elle refuse de conclure sonquestionnement par une certitude, soit de remplacer une opinion par une autre opinion du même type, c'est-à-direimpliquant le même genre d'adhésion (le philosophe n'est pas là pour délivrer « clés en main » des recettes pour bienvivre, des solutions pratiques aux problèmes de l'existence), soit de présenter le résultat de ses réflexions commeune vérité positive, c'est-à-dire vérifiée, transmissible telle quelle et validée à ce titre par une communauté. »

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