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Platon: Exercice du pouvoir et lois

Publié le 02/05/2005

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platon
Si un médecin qui entend bien son métier, au lieu d'user de persuasion, contraint son malade à suivre un meilleur traitement en dépit des préceptes écrits, quel nom donnera-t-on à une telle violence? Tout autre nom que celui de la faute contre l'art ou l'erreur fatale à la santé, n'est-ce pas? Quand on a fait, contre les lois écrites et l'usage traditionnel, des choses plus justes, meilleures et plus belles qu'auparavant, ne sera-t-on pas autorisé à tout dire plutôt que de prétendre que les victimes de ces violences ont subi des traitements honteux, injustes, mauvais? De même que le pilote, attentif au bien du vaisseau et des matelots, sans écrire un code mais en prenant son art pour loi, sauve ses compagnons de voyage, de la même façon des hommes capables de gouverner d'après ce principe pourraient réaliser une constitution droite, en donnant à leur art une force supérieure à celle des lois. Platon

L'homme politique peut, pour le bien de la cité, passer outre les lois. Il est même question d'une "contrainte".

L'homme politique peut, pour le bien de la cité, passer outre les lois. Il est même question d'une "contrainte". Il est aussi relativement facile de critiquer cette idée qui ouvre les portes à tous les abus.

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« l'esprit de la tradition, c'est la transgresser dans sa lettre.

Dit autrement, l'art politique, qui est à l'origine des lois,ne saurait leur être soumis.— Cette dévalorisation de l'écrit explique aussi pourquoi l'homme politique ne prend pas la peine d'écrire une loinouvelle. 3.

Contrainte et persuasion.Il est question d'une contrainte.

L'homme politique ne cherche pas à persuader les citoyens qu'il a raison d'agircomme il le fait.

Il impose ses réformes sans tenir compte de la volonté des personnes.

Souvent les individusn'agissent pas pour leur bien : le malade refuse de se soigner; dans leur panique, les naufragés y vont chacun deleur solution, et le pilote doit passer outre ces avis.

Et dans l'ignorance où ils se trouvent, les hommes peuvent-ilsdésirer des réformes dans la cité?— La référence à la persuasion est susceptible d'une double lecture :• Pour ceux qui dénoncent dans cette contrainte une violence, le politicien devrait convaincre le peuple qu'il araison d'agir comme il le fait.

La persuasion s'oppose ici à la contrainte.• Mais quand on connaît la critique constante de Platon à l'égard des sophistes, le mot de « persuasion » nous meten éveil : cette prétendue conviction que le politicien suscite pourrait bien être une violence pire que la contrainte :le sophiste manipule en effet les esprits, en mélangeant habilement le vrai et le faux.

On ne peut donc manquerd'accueillir avec ironie les récriminations des démocrates et des sophistes, quand on sait qu'ils n'ont que lapersuasion à opposer à la contrainte I— Peut-on établir une relation entre cette contrainte et l'opposition de l'art politique aux lois? On pourra recherchercette relation dans deux directions :• d'abord, mettre en cause les lois écrites ou traditionnelles, c'est menacer un droit qui protège le peuple des abusdu pouvoir ;• ensuite, s'opposer aux anciennes pensées, c'est heurter les esprits façonnés par elles. 4.

Une action dirigée vers le bien.Cette contrainte et l'opposition à la loi sont légitimes car elles s'exercent au nom du bien.

Ce n'est que par unsophisme que l'on peut nommer mal et violence ce qui apporte du mieux.

L'amère ironie du texte dénonce cesamalgames :• il n'est pas vrai que la contrainte suffise à créer la violence;• il n'est pas vrai que, parce qu'on s'oppose aux lois qui fixent le juste et l'injuste, on est injuste.

Ce serait identifierle fait et le droit, faire de la justice une convention fixée par les lois positives.

Si l'homme politique transgresse leslois en vigueur, c'est qu'il les juge au nom d'une idée non conventionnelle de la justice.

Ce qui l'autorise à placer sonart au-dessus des lois, c'est que la norme universelle qui dirige son art n'est pas identifiable avec les normesreconnues.

C'est parce qu'il a ce savoir de ce qui est juste en soi, par-delà les conventions, que le philosophe doitêtre roi. B.

Commentaire 1.

Cette conception conduit à la tyrannie.Quand donc c'est pour le bien de la cité, on peut passer outre les avis et les lois.

Mais cette idée ne risque-t-ellepas de conduire à la tyrannie, puisqu'un seul impose sa vue à tous? Tout garde-fou objectif est supprimé (lois,traditions, suffrage populaire).

Certes, si cet homme est effectivement le « philosophe-roi » imaginé par Platon, toutva bien.

Mais comment le distinguer du tyran qui en prend l'apparence? Quel dictateur n'a pas prétendu agir pour lebien général ? A qui appartient-il de décider s'il s'agit d'un vrai politique ou d'un imposteur? On ne peut donc s'enremettre à la prétendue clairvoyance d'un seul.

Des institutions doivent contrôler l'accès au pouvoir et son exercice.Mais quelles seront-elles si précisément les lois tendent à devenir des obstacles à l'art politique, et si le public estignorant de son propre bien?On doit donc se doter de lois, d'institutions, mais celles-ci risquent de pervertir l'intention qui présidait à leurcréation : les institutions n'existent plus que pour elles-mêmes, leur pouvoir est confisqué, les lois sont tournées, oudépassées, ou apparaissent injustes.

Il faut donc qu'elles soient sans cesse reprises, renouvelées de l'intérieur.

Maisqui en a le droit, si tout le monde est soumis à la loi? Seul celui qui donne autorité à la loi peut s'y soustraire.

Laquestion est donc : quel est ce souverain?De même, s'il y a une liberté du gouvernement à l'égard des lois, cette liberté elle-même doit être fixée par les lois(par exemple le pouvoir de dissoudre une assemblée). 2.

Le peuple a seul pouvoir de faire les lois.L'autorité des lois ne peut provenir de leur fondement rationnel sur l'idée de justice.

Celle-ci n'est pas manifeste,mais elle est toujours l'idée telle qu'elle apparaît à quelqu'un.

Il faudrait donc admettre non seulement l'autorité del'idée, mais encore celle de celui à qui elle apparaît.

Il ne reste donc plus qu'un critère formel : a de l'autorité ce quiest reconnu par tous.

Le souverain, c'est le peuple.

La possibilité de transgresser les lois que Platon accorde àl'homme politique n'appartient qu'à lui.En effet, qu'est-ce qui légitime une contrainte? Le bien qu'elle vise? Mais c'est supposer qu'un homme puisse déciderpour les autres.

Imposer sa volonté à autrui, fusse pour son bien, n'est-ce pas malgré tout une violence? Si l'individuest libre, c'est qu'il ne saurait reconnaître de contrainte que celle qu'il se donne à lui-même.

Dira-t-on qu'il a abdiquésa liberté une fois pour toutes? Quelle étrange liberté que cette liberté dont le seul acte est de se détruire ! Cettedémonstration accomplie par Rousseau dans le Contrat social ne laisse pas d'autres possibilités : le peuple ne sesoumet qu'à lui-même.

Lorsque les intérêts particuliers se déchirent, la seule façon dont l'individu peut sauver saliberté est d'y renoncer au profit du bien général.

II la retrouve alors, non comme une liberté sauvage qui cherche à. »

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