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Peut-il exister un universel ?

Publié le 12/10/2009

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L'homme peut-il à juste titre supposer l'existence d'un universel ? A examiner le cheminement de l'histoire, il semble que ce soit là une hypothèse le plus souvent tenue pour vraie. Mais le travail du temps est aussi celui de la critique : si bien que pour l'époque moderne, c'est véritablement une question taraudante que l'existence ou la non-existence de l'universel.  Aussi l'interrogation peut-elle prendre plusieurs formes. Il existe un monde qui entoure l'homme : est-il possible d'en élaborer une connaissance qui lui soit parfaitement adéquate ? Il existe des valeurs à l'œuvre dans l'action : sont-elles communes à tous les hommes ? On considérera le problème sous plusieurs angles : l'universel peut-il être objectif ou subjectif ? Ou bien est-il possible de postuler soit une réconciliation de l'objectivité et de la subjectivité, soit une rupture complète ?   

« conséquence de l'objet lui-même, mais synthétique a posteriori, c'est-à-dire qu'elle établit une relation en laconstatant empiriquement.

Hume engage ainsi un mouvement qui tout à la fois critique l'idée même d'uneuniversalité objective, et ouvre la voie à une pensée de l'universalité subjective.

Or il est possible de se demander sice n'est pas justement l'existence d'une universalité subjective qui tout à la fois rend possible la science physique -en tant qu'étude des relations de cause à effet -, et explique que cette même science, au XXIe siècle, apparaisse,avec moins de variabilité peut-être, soumise aux mêmes possibilités de remise en cause que pouvait l'être laphilosophie en son temps, et qu'elle ne soit pas, en fait, parvenue à une vérité objective, universelle et constante.C'est le travail critique de Kant qui prend cette hypothèse comme élément premier.

Les catégories de la sensibilitéet de l'entendement produisent une image du monde qui est le phénomène.

Ce phénomène est à la fois lié et distinctde la chose en soi, le noumène : il est ce que l'on perçoit du noumène, sans qu'il soit possible de connaître cedernier pour ce qu'il est véritablement.

Or les catégories de la sensibilité et de l'entendement sont, pour Kant,communes à tous les hommes : l'idéalisme kantien permet ainsi la construction d'une universalité subjective del'espèce qui peut à tout le moins assurer une connaissance humaine commune - ce qui revient à un réalisme de fait.Aussi, si la théorie kantienne de la connaissance légitime la science en tant que cette dernière a un objet qui lui estfourni par la sensibilité (le nombre et l'étendue, comme la relation de cause à effet, sont des données du temps etde l'espace), elle n'en fait pas une connaissance de la chose en soi.

L'universel existe, mais il est limité à la sphèrede l'entendement humain, qui laisse en dehors de lui tout ce qui n'est pas d'expérience.

Or ce qui semblait être,précisément, l'universel avant la critique kantienne, c'est précisément ce que cette dernière interdit de penser :Dieu, l'âme, le monde comme totalité, les choses en soi que sont les noumènes.

Dès lors est-il encore possible deparler d'universel ? Un universel subjectif ne constitue-t-il pas, quand bien même il serait partagé par tous leshommes, un renoncement à l'idée de véritable connaissance universelle ?C'est bien ce que souligne la morale kantienne lorsqu'elle établit un universel pratique qui ne peut être questionné.Dans la morale, la raison commande par ce qui, en elle, est raison pure : or ce qui est raison pure est la faculté del'universel.

Elle n'est pas connaissance, elle est pratique, c'est-à-dire simplement orientée vers l'action.

Or c'estprécisément dans la morale que les idées synthétiques a priori de la métaphysique - Dieu, l'immortalité de l'âme -trouvent leur véritable fonction comme postulats de la raison pratique.

Ces postulats ne sont pas susceptibles d'êtredes objets de démonstration, ce qui aboutit - et c'est ce que Kant appelle le « primat de la raison pratique » - àplacer l'universel en dehors de la connaissance et de le restreindre au champ de la valeur.

Mais est-ce là uneposition tenable ? il semble que les deux critiques établissent une sorte de statu quo fragile, un partage du mondeimpossible à tenir.

S'il existe un universel, il doit concerner toute chose ; s'il n'en existe pas, tout doit être relatif. [Partie III : le monde Esprit et comme représentation] Prenons la première hypothèse.

La Critique de la raison pure a interdit le champ de la métaphysique pure àl'entendement.

Mais il est toujours possible de chercher dans le déroulement même du monde une essence quil'empêche d'apparaître comme un pur désordre, un universel immanent, en quelque sorte.

C'est l'Esprit hégélien quiremplit cette fonction.

Si en effet à la fois l'histoire de la conscience, de la nature et de la logique suivent unedialectique qui se révèle la même, et si c'est l'histoire même de l'humanité qui vérifie cette dialectique, si donc laraison et le réel se rencontrent, on est en mesure de supposer un universel.

Mais celui-ci ne revêt pas la formed'une essence statique transcendante au monde qui y participe ou qui en est un reflet dégradé, comme dans l'idéeplatonicienne ou dans la théologie médiévale.

Cet universel, rationnel et réel, union de la faculté de connaître et del'objet à connaître, du sujet et de l'objet, est un processus toujours semblable à lui-même.

Cette répétition duschéma pourvoit l'histoire de lois - cela même qui fait l'universel, selon Kant.

Le temps fait partie intégrante de cetteessence sans pour autant que ce temps soit un facteur de désordre et d'incohérence.Cet universel est aussi de nature politique.

Les théories du socialisme scientifique, issues des hégéliens de gauchedont Marx est le plus illustre représentant, expriment la cohérence intime de tous les éléments de l'histoire :économie, politique, philosophie, art, tout est lié, tout manifeste le même sens, et c'est cette cohérence même quiassure que le sens est bien trouvé et que l'universel existe, dans la lutte des classes, en l'occurrence, qui gouvernel'histoire des rapports sociaux depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours.

Ce temps domestiqué qui devient un universel enmarche obéit à des lois - comme celle de la baisse tendancielle du taux de profit - et ceci permet même auxsocialistes d'anticiper sur l'avenir, comme le ferait un physicien devant le mouvement régulier des comètes.

Le tempsest un système, dernière forme possible de l'universel.Mais la belle construction achoppe sur ce point précis.

Le temps n'est jamais clos, et c'est ce qui empêche lathéorie de Marx, avec l'annonce de la fin de l'histoire par la résorption de la lutte des classes, et celle de Hegel, quisemble voir aboutir toute l'histoire de l'humanité à Berlin où il se trouve lui-même, comme le dit Nietzsche avecironie, d'être autre chose, une fois sorties du domaine de l'expérience possible, celle du passé, que de lamétaphysique de l'ordre même dont Kant dénonçait l'impossibilité radicale.

Il n'y a pas, là non plus, universel, maisliaison a posteriori qui veut se transformer en une liaison a priori.

Que reste-t-il comme hypothèse que celle quiavancerait l'inanité de l'idée même d'universel ? Et si le monde était effectivement désordre, chaos, laideur,incohérence totale et que l'universel n'était que la pauvre tentative de l'homme pour détourner les yeux de l'abîmeet du vide ? La position nietzschéenne postule ce mensonge absolu de la métaphysique qui identifie la valeur, lafiction utile, au réel et lui donne ainsi le nom de vérité.

L'universel n'est pas la réalité, c'est une valeur.

Or la valeurest une interprétation du réel, qui, lui, échappe toujours dans son mouvement incessant de fuite.

Elle permetl'organisation et la domination.

Elle choisit, réunit un certain nombre de faits en fonction de ses besoins et permetl'interprétation - une parmi d'autres, entièrement relative à celui qui l'énonce, dans le moment où il l'énonce.

Lafiction spécifique de l'universel - qui assimile logique et être - est celle qui choisit d'oublier ce qu'est une valeur.Pour ce faire, elle oblitère le monde sensible soumis au devenir incessant - seul véritable - et élabore l'idéal d'unarrière monde stable et fixe, qu'il serait possible de connaître et qui serait le seul vrai.

C'est le mythe du maître etde l'esclave, qui fonde la culture sur un mensonge.

Et cette vision de la nature de l'universel, qui existe, certes,. »

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