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Nisard a dit que « l'admiration pour le XVIIe siècle était une des forces morales de notre pays ». Expliquez et essayez de motiver ce jugement. ?

Publié le 30/03/2009

Extrait du document

  • Début. — Le XVIIe siècle peut être considéré comme le bastion intellectuel et moral de la France. Les critiques et le public cultivé l'ont toujours reconnu. On en voit trois principales raisons :
  • 1° Le XVIIe siècle, en littérature, nous donne sur l'homme et sur la société les lumières essentielles; il est largement humain.

Admirer l'héroïsme cornélien, c'est se mettre à l'école de la grandeur d'âme. La vérité racinienne nous apprend à nous connaître et ne peut nous égarer en dépit de sa hardiesse dans la peinture des passions. La « mâle gaieté « de Molière nous instruit et nous divertit sainement. La Fontaine nous transmet la sagesse des siècles et surtout celle de notre race, il est « notre Homère «. Pascal jette sur la vie humaine des lumières décisives. « Bossuet incarne le génie chrétien, qui a pénétré l'esprit de l'époque et l'a faite si grande. De Boileau l'essentiel des préceptes littéraires est encore valable aujourd'hui. La Bruyère, peintre des mœurs, sait unir l'agréable et le sérieux dans ses peintures de l'homme, en évitant l'indifférence morale de tant de satiriques.

  • 2° Le XVIIe siècle incarne supérieurement les qualités essentielles de l'esprit français : raison et bon sens, goût, universalité, d'où le rayonnement de notre littérature classique à travers le monde.
  • 3° Il constitue l'un des plus parfaits monuments de notre langue.
  • Conclusion. — Le XVIIe siècle littéraire est le plus riche trésor de notre patrimoine national.

 

« naître que chez nous.Pascal, le plus grand génie peut-être que le XVIIe siècle ait produit, le plus complet surtout, est bien pour notrerace un trésor unique de forces morales.

Aucun auteur n'a peut-être aujourd'hui conservé comme lui toute sonactualité, parce qu'aucun n'a percé d'un regard plus aigu les mystères de l'âme humaine, ni prononcé des mots plusdécisifs : grandeur, misère...

misère, grandeur de l'homme.

Qui donc, de nos jours, n'est revenu à cette formule sansen sentir la poignante vérité? Une génération, qui a connu toutes les extrémités des choses humaines, tout ce quel'homme peut faire et souffrir, tenter dans le bien et dans le mal ; le désarroi de l'homme sans Dieu et la vanité denos pensées, ce mystère du désordre intérieur et du désordre universel qui fait notre malheur et notre humiliation,une telle génération ne peut que se tourner vers Pascal et reconnaître en lui un des maîtres de l'esprit, comme iln'en paraît pas un par siècle.Bossuet le complète et, pour certains esprits, apporte avec plus de sérénité les mêmes lumières.

C'est tout le géniechrétien éclairant la vie humaine, jugeant les grandes existences (Oraisons funèbres), avec une haute impartialitéd'historien et de prêtre, jetant sur l'histoire universelle un regard qui élève la signification des événements en yfaisant transparaître la grande force invisible qui domine le monde : Dieu.Que dire de La Fontaine, « notre Homère », qui a tracé de l'homme et de la vie sociale de son temps un portrait sivrai et si plaisant, qui « instruit en badinant » et fait tenir dans ses Fables toute la sagesse des siècles avec le bonsens populaire hérité de nos ancêtres gaulois, nous transmettant l'héritage du moyen âge, enrichi par la raisonclassique ?Pour Boileau, il a été la conscience littéraire de son siècle; il a, pour ainsi dire, tenu le bâton du chef d'orchestre; ila conduit le choeur des grands artistes de l'époque, ce qui, dans son genre, est un très grand art.La Bruyère ajoute à leurs œuvres une galerie de portraits où le solide le dispute à l'agréable.

La Bruyère, c'est^l'honnête homme, dans tous les sens du terme, qui exerce sa clairvoyance sur ses contemporains, sans jamaisoublier (ce qui n'est pas le cas de beaucoup de peintres des mœurs aux siècles suivants) de stigmatiser le vice, outout au moins de laisser percer sa désapprobation, son mépris ou son dégoût.

Et quel trésor d'expérience contientson petit livre, bien fait pour rendre son lecteur attentif et perspicace.Quels éducateurs de l'esprit, quels maîtres incomparables que tous ces grands auteurs du XVIIe siècle, et cela sanspédantisme, ce que n'éviteront pas un Rousseau, parfois même un Voltaire, un Diderot, avec leur goût de lapropagande, un Victor Hugo, qui semble souvent parler du haut de la chaire ou prophétiser sur son trépied !Notre admiration pour le XVIIe siècle nous met aussi en contact avec les hommes de génie qui ont incarnésupérieurement les qualités essentielles de notre race.

De Descartes à Boileau, notre littérature, comme toute notrecivilisation, se développe sous le signe de la raison.

Comme la raison en science, en politique, en morale préside àl'activité humaine sous toutes ses formes, elle préside à la conception et à l'exécution de l'œuvre d'art.

La raison està la base du théâtre de Corneille, son héroïsme est une raison enthousiaste; Racine déclare que la tragédie doit êtreraisonnable, c'est-à-dire vraisemblable : un souci de vérité domine, en effet, toutes les œuvres de nos classiques,et par là ils nous donnent une grande leçon (Aimez donc la raison...

Rien n'est beau que le vrai...).

Cette leçon, bienque certaines générations (le romantisme) regimbent contre elle, finit toujours en France par s'imposer et chasserles chimères.Le goût est aussi une notion et, si l'on peut dire, une grâce particulière de l'esprit français, que les maîtres du XVIIesiècle ont portée à la perfection.

Ce sens de la mesure, de l'harmonie {rien de trop, rien de manque, disait Pascal)nous a donné alors des œuvres qu'on peut dire parfaites, parce qu'elles comblent l'attente de l'esprit, ne lui laissentrien à désirer, sans l'accabler sous un amas de richesses% étrangères : une tragédie de Racine possède l'eurythmied'une statue grecque une fable de La Fontaine, un sermon de Bossuet nous procurent cette même délectation, quene sentent pas toujours aussi bien les étrangers mais que les délicats chez nous, à toutes les époques, savourent.Les artistes modernes trouvent leur plus bel éloge dans ce jugement sur leur œuvre : « C'est vraiment classique! »Un certain caractère de généralité et même d'universalité qui est la marque de l'esprit français, se reconnaît aussidans les œuvres du XVIIe siècle.

La littérature est alors profondément, largement humaine, et nous ramène sanscesse, si nous étions tentés de nous en éloigner, vers les thèmes éternels qui intéressent, touchent la majorité desesprits.

C'est pourquoi cette littérature a connu au XVIIe siècle un tel rayonnement et pourquoi depuis lors on peutdire que le monde fait confiance à la France et se tourne toujours vers elle pour lui fournir les nourritures de l'esprit,de préférence à tout autre peuple.Enfin, nous avons une autre raison de tenir à notre littérature du XVIIe siècle.

C'est que nous trouvons en elle letrésor de notre admirable langue, avec ses qualités essentielles de clarté, de précision, de fines nuancescorrespondant à nos facultés d'analyse, de logique et de justesse dans l'observation.

Ces maîtres écrivains nous onttransmis là un héritage précieux.

Le négliger ce serait dégrader notre esprit même, rompre avec un passé glorieux,nous amputer intellectuellement, moralement.

Voltaire avait raison de dire de ces grands hommes du XVIIe siècle :Ils apprirent à la nation à penser, à sentir et à s'exprimer.

Ils sont les éternels instituteurs de la France.Le jugement de Nisard est donc juste.

Il venait à son heure.

Le romantisme, alors, expirait de ses excès.

Oncommençait à rendre justice au siècle classique, que le XVIIIe siècle lui-même avait délaissé en dépit de l'hommageque Voltaire lui avait rendu, dans son chapitre des Beaux-Arts du Siècle de Louis XIV.

L'œuvre de Sainte-Beuve fitencore plus que celle de Nisard, critique un peu étroit, pour ramener le goût du public vers notre XVIIe siècle.Depuis lors, les critiques de tendances les plus diverses ont presque tous reconnu et mis en valeur l'excellence denotre littérature classique : Anatole France, Brunetière, Faguet, Jules Lemaître.

Les programmes scolaires lui ont faitune large place.

Il est le plus riche trésor de notre patrimoine littéraire.. »

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