Devoir de Philosophie

Nietzsche: L'homme comme animal oublieux

Publié le 16/04/2009

Extrait du document

nietzsche
Cet animal nécessairement oublieux, pour qui l'oubli est une force et la manifestation d'une santé robuste. s'est créé une faculté contraire, la mémoire, par quoi, dans certains cas, il tiendra l'oubli en échec, - à savoir dans les cas où il s'agit de promettre : il ne s'agit donc ement de l'impossibilité purement passive de se soustraire à l'impression une fois reçue, ou du malaise que cause une parole une fois engagée et dont on n'arrive pas à se débarrasser, mais bien de la volonté active de garder une impression, d'une continuité dans le vouloir, d'une véritable mémoire de la volonté : de sorte que, entre le primitif « je ferai » et la décharge de volonté proprement dite, l'accomplissement de l'acte, tout un monde de choses nouvelles et étrangères, de circonstances et mêmes d'actes de volonté, peut se placer sans inconvénient et sans qu'on doive craindre de voir céder sous l'effort cette longue chaîne de volonté. Nietzsche

• Comment peut-on penser que l'oubli est une force et la manifestation d'une santé robuste? • Dans quel(s) cas s'agit-il de « tenir l'oubli en échec «? — En quoi « tenir l'oubli en échec « peut-il être pensé comme « la manifestation d'une santé robuste «? — A quelle(s) condition(s) ? • Importance du couple activité-passivité pour comprendre la pensée de Nietzsche. • « Mémoire de la volonté « s'oppose-t-il à mémoire involontaire?

nietzsche

« pour l'homme? Un objet de risée et une honte douloureuse.

Et c'est exactement ce que sera l'homme pour lesur-homme : un objet de risée et une honte douloureuse.

»C'est donc bien une force qu'oublier : c'est sur de nouvelles bases qu'il faut ordonner et planifier l'avenir.Cependant, et dans certains cas, « il tiendra l'oubli en échec ».

Il n'y a donc pas complète négation de lasomme du passé et Nietzsche s'explique : « dans les cas où il s'agit de promettre.

» A la fin de cetteintroduction, nous nous apercevons donc de la progression de l'auteur.

Il faut rechercher l'oubli (« signe d'unesprit robuste », pourrait-on dire) mais il ne faut pasaller jusqu'à se renier soi-même.

C'est sur cette constatation que s'achève la première partie qui voitNietzsche poser les premières pierres d'un édifice qui, à ses fondations, rejette déjà certaines idées de lapensée classique (on se souvient sans peine de l'apostrophe « Pourquoi le vrai plutôt que le non-vrai? » duGai Savoir).

Alors que Jean Delay plus tard considérera l'oubli comme une maladie (régression entraînant laperte de mémoire, du moins pour les oublis « graves ») et donc reconnaîtra à la mémoire le rôle primordial,Nietzsche au contraire la transforme en exception, en nécessité dans « certains cas ».La deuxième partie débute donc par une denégation et une remise en question d'idées reçues : « il ne s'agitnullement de l'impossibilité purement passive de se soustraire à l'impression une fois reçue ou du malaise quecause une parole une fois engagée et dont on n'arrive pas à se débarrasser ».

Nietzsche, dès la premièrenégation, affirme qu'il ne se situe pas sur le plan scientifique.

En effet, certains faits marquent l'individu,c'est-à-dire qu'une image entraîne une réaction, i.e., en employant un langage pavlovien, un réflexeconditionné.

Les exemples sont pléthore dans la vie courante.

La simple vision d'une personne, et ceci grâceà une suite d'idées, fait que l'on a résurgence d'une dette non payée ou d'une invitation oubliée.

Dans cecas en effet, la promesse remonterait au niveau du conscient grâce à la mémoire.

D'autre part, Nietzscheréfute ontologiquement la mémoire, car il ne s'agit pas de devoirs à accomplir (il se situerait à ce moment làsur le plan moral, dans le sens où une personne dont je peux préciser le nom, la profession...

m'a rendu unservice et donc, la bienséance m'oblige à le lui retourner).

Comme le précise l'auteur lui-même, il s'agirait làd'attitudes passives où l'homme subirait par contre-coup un acte dont ii n'est pas l'instigateur.

On peutrapprocher cette conduite de ce que G.

Deleuze nommait l'opposition actif-réactif.

Le réactif, c'est Socratepar excellence(« ce juif de Socrate », comme le méprisait Nietzsche).

Il s'agit de l'individu qui réagit parrapport à un autre individu ou à une situation sans pour autant proposer de solutions.

Il ne semble pas quececi plaise à Nietzsche qui voit là une attitude mesquine, digne représentante des « faibles ».

Donc, lasituation de réaction par rapport à une impression reçue ou à un engagement à remplir est trop passive, trop« servile ».

Nietzsche préfère replacer la mémoire dans un cadre actif, plus en accord avec ses idées.

Il ladécrit donc comme « la volonté active de garder une impression ».

Il y a opposition subtile (car il y atoujours cette « impression ») entre la première négation et cette proposition.

En effet, autant le terme «soustraire » indique une tâche malaisée, qui ennuie profondement l'individu, autant le verbe « garder »indique un choix effectué en connaissance de cause du fait de son libre-arbitre.

La différence est de taillé.Dans le premier cas, « l'impression reçue » semble imposée à l'esprit.

Cette attitude typiquement passivepropre aux non-créateurs s'oppose à la volonté active de garder une impression.

Active aussi cette «continuité dans le vouloir » car elle figure bien les différentes étapes de ce vouloir, phases dont l'individu estparfaitement maître.

L'expression même de « continuité » montre bien l'homme au début et à la fin duprocessus, à savoir la promesse.

Nous sentons donc les sentiers vers lesquels nous projette Nietzsche.

Lavolonté de l'individu de maîtriser les tenants et les aboutissants, « l'alpha et l'omega », c'est en fait samémoire qui lui en donne la possibilité.

C'est cette « chaîne de volonté » que Nietzsche évoquera plus tardqui est donc le but de cette « mémoire de la volonté ».

Volonté est bien pris dans le sens de « je veux »,i.e.

de l'homme maîtrisant sa « destinée » sans intervention divine bien entendu (du moins pour Nietzsche),et cet homme est donc l'image de la volonté de puissance.

Cette deuxième partie a donc mis en relief uneconception de la mémoire que nous n'étions pas près d'attendre.

L'aspect théorique étant mis enlumière, Nietzsche, tout à fait normalement, va nous montrer l'application « pratique » de sa conception.Cela va être le sujet de la troisième et dernière séquence.L'application de sa conception de la mémoire de la volonté sépare de façon claire la promesse (« le primitif «je ferai » ») et l'accomplissement (« l'acte »).

Il ne semble donc pas possible qu'il y ait à la fois promesse et« décharge de volonté ».

Ce point va en fait permettre de faire la lumière sur ce qui se déroule entre cesdeux moments extrêmes.

D'après Nietzsche donc, il peut s'écouler un temps relativement long entre cesmoments.

Durant cette période, il est tout à fait probable que l'individu ne sera pas inactif.

Or d'aprèsNietzsche, il se peut que « tout un monde de choses nouvelles et étrangères, de circonstances et mêmed'actes de volonté » occupe la vie de l'individu.

Cela est dans un certain sens logique, puisque la promessedont nous nous occupons est noyée parmi d'autres.

Il est donc possible qu'une action soit en contradictionavec une promesse, action qui n'aura pas de lien avec la promesse mais qui pourrait choquer par sonextérieur, à savoir son côté visible par tous.

Nietzsche donc, en présentant sa mémoire de la volonté, «remet la philosophie sur ses pieds » comme pourrait le dire Karl- -Marx (qui fait partie, avec Nietzsche, de ce que certains contemporains ont appelé l'ère du soupçon).

Enclair, lorsqu'une promesse est faite, peu importe le temps qui s'écoulera entre sa réalisation et le moment oùjustement elle a été prononcée.

Peu de cas doit être fait d'un massacre si la promesse était de rendre lepeuple heureux et que celui-ci l'est après une immense boucherie.

Il s'agit là bien sûr d'un cas extrême, maisdans la ligne de pensée nietzschéenne.

Il n'est donc pas « à craindre de voir céder sous l'effort cette longuechaîne de volonté En effet, l'interaction de promesses d'action, écheveau apparemment complexe, ne peutque s'ordonner avec le temps, le résultat corroborant exactement la promesse initiale.

De cette fin depassage transparaît un optimisme certain, à savoir qu'avec le temps cet équilibre promesse-résultat ne peut,grâce à la « mémoire de la volonté », qu'exister.

Il nous faut cependant apporter quelques restrictions à cepassage, et faire apparaître les limites du texte.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles