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Nietzsche et les trois métamorphoses de l'esprit

Publié le 22/04/2005

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nietzsche
Je vais vous dire trois métamorphoses de l'esprit : comment l'esprit devient chameau, comment le chameau devient lion, et comment enfin le lion devient enfant. Il est maint fardeau pesant pour l'esprit, pour l'esprit patient et vigoureux en qui domine le respect sa vigueur réclame le fardeau pesant, le plus pesant. Qu'y a-t-il de plus pesant? Ainsi interroge l'esprit robuste; et il s'agenouille comme le chameau et veut un bon chargement. Qu'y a-t-il de plus pesant? (...) n'est-ce pas cela : s'humilier pour faire souffrir son orgueil? (...) déserter une cause au moment où elle célèbre sa victoire ? (...) Ou bien est-ce cela : aimer qui nous méprise et tendre la main au fantôme lorsqu'il veut nous effrayer? L'esprit robuste charge sur lui tous ces fardeaux pesants : tel le chameau qui sitôt chargé se hâte vers le désert, ainsi lui se hâte vers le désert. Mais au fond du désert le plus solitaire s'accomplit la seconde métamorphose : ici l'esprit devient lion, il veut conquérir la liberté et être maître de son propre désert. Il cherche ici son dernier maître : il veut être l'ennemi de ce maître, comme il est l'ennemi de son dernier dieu ; il veut lutter pour la victoire avec le grand dragon. Quel est le grand dragon que l'esprit ne veut plus appeler ni dieu ni maître? « Tu dois », s'appelle le grand dragon. Mais l'esprit du lion dit : « Je veux ». (...) Créer des valeurs nouvelles le lion même ne le peut pas encore : mais se rendre libre pour la création nouvelle - c'est ce que peut la puissance du lion. (...) Il aimait jadis le « Tu dois » comme son bien le plus sacré : maintenant il lui faut trouver l'illusion et l'arbitraire, même dans son bien le plus sacré, pour qu'il fasse, aux dépens de son amour, la conquête de la liberté : il faut un lion pour un pareil rapt. Mais dites-moi, mes frères, que peut faire l'enfant que le lion ne pouvait faire? (...) L'enfant est innocence et oubli, un renouveau et un jeu, une roue qui roule sur elle-même, un premier mouvement, une sainte affirmation. Oui, pour le jeu divin de la création, ô mes frères, il faut une sainte affirmation : l'esprit veut maintenant sa propre volonté, celui qui a perdu le monde veut gagner son propre monde. Nietzsche

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« situation n'est pas un manque à combler ; bien au contraire, elle est la seule condition de l'affirmationspontanée réellement libre.

Il est « une roue qui tourne sur elle-même » : l'enfant n'est pas chargé par lefardeau de l'histoire : sans souvenirs, sans passé, il est également sans regrets, sans nostalgie ; tout auprésent, il affirme sans crainte d'un remords à venir.

Il n'apprécie pas ses actes en fonction de leursconséquences : il ne se règle pas sur les leçons qu'il faudrait tirer de l'histoire : il pourrait donc vouloirtoujours ce qu'il a voulu une fois.Il est ainsi libre et léger : il peut vouloir sa propre volonté et non un objet délimité dont il ne serait pasl'auteur. Ces figures animales représentent les trois métamorphoses de l'esprit.

Ce sont les premières paroles du nouveauprophète imaginé par Nietzsche, Zarathoustra.

Objectif: en finir avec la culpabilité. Qu'annonce Nietzsche ? Que Dieu est mort.

« On peut mourir d'être immortel.

» Dieu est ce à partir de quoi l'hommese définissait.

Mais le retrait de Dieu ne peut s'accomplir que si l'homme se défait de l'image de lui-même qu'il aconstruite à travers Dieu : l'idée chrétienne du péché originel, l'angoisse inutile et néfaste liée au sentiment de laculpabilité de l'existence.

Il faut donc vouloir la mort de Dieu en nous, et pas simplement la constater.

Commentvaincre cette pesanteur et parvenir à dépasser la morale ? Le chemin de la sagesse selon Nietzsche comporte troisétapes.

Comme il ne s'agit pas seulement d'un raisonnement ou d'un discours argumentatif, mais aussi d'uncheminement spirituel, Nietzsche l'expose sous la forme d'une fable.

Ainsi parlait Zarathoustra (18831885) est unlivre à la fois poétique, philosophique et prophétique.

Lorsque Zarathoustra, personnage qui représente pourNietzsche l'annonciateur des temps nouveaux, descend de la montagne et commence à parler aux hommes, sondiscours s'ouvre sur une page devenue très célèbre, qui traite des « trois métamorphoses de l'esprit», symboliséespar le Chameau, le Lion et l'Enfant. Première étape :il faut d'abord éprouver la pesanteur du négatif, surenchérir sur le respect des valeurs morales, aller jusqu'àl'ascétisme — se priver non seulement du superflu, mais aussi du nécessaire.

La figure du Chameau, qui s'agenouilleet réclame qu'on le charge de choses pesantes, manifeste le triomphe de la force réactive, celle dont toute l'actionest réaction à ce dont elle s'accable : le devoir, les valeurs morales, Dieu.

L'homme est volonté, mais veutsa force dans la négation de la nature.

Pour Nietzsche, l'ascétisme est le vrai sens de la morale : il faut aller jusqu'àcette mutilation de la vie.

Deuxième étape : il faut briser en soi la soumission, oser réagir contre la force réactive,combattre contre le Dragon «Tu dois», dont chaque écaille représente une valeur morale.

Le Lion est cette force quicombat la soumission aux valeurs, qui les nie toutes par système.

Avec le Lion, on quitte la communautépour entrer dans le désert, car qui prend le contre-pied des valeurs communes se retrouve seul contre tous.

Lamétamorphose de l'esprit en Lion,c'est la figure du nihilisme.

Troisième étape : au-delà du bien et du mal.

L'esprit, en plein désert, ne peut plusqu'affirmer.

N'ayant plus de quoi réagir, il vase donner dans le vide de sa propre affirmation.

L'homme n'est plus humilié par l'idée d'un mécanisme du monde, il ale sentiment joyeux d'être au premier jour de sa propre existence.

L'Enfant — comme l'Aurore et la Danse —est ici lafigure de cette force active qui est à même de tout affirmer, de créer de nouvelles valeurs.

«Innocence est l'enfant,et un oubli et un recommencement, un jeu, une roue qui d'elle-même tourne, un mouvement premier, un saint direOui.

» Le prophète Zarathoustra, qui annonce la mort de l'homme, son dépassement dans le Surhomme, n'est pas encorelui-même le Surhomme, mais sa promesse.

Pour Nietzsche, l'homme est malade de l'homme, car la morale est maladiede la vie.

Dans les pensées morales ou éthiques de Kant et de Hegel, Nietzsche voit l'idée d'un primat du négatif,une définition de l'humanité de l'homme comme puissance de négation de la nature.

À cette morbidité de lacivilisation, Nietzsche oppose une philosophie de la joie, de part en part affirmative.. »

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