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L'expérience immédiate est-elle source de vérité ?

Publié le 29/10/2009

Extrait du document

L'expérience désigne le contact formateur du moi grâce aux choses, contact s'opérant, fondamentalement, grâce à la connaissance sensible, acquise par les sens. De cette notion d'expérience qui est loin d'être univoque, nous retiendrons ici essentiellement cette idée de passivité et de contact (sensible) subi avec le réel. Quant à l'adjectif immédiat, il renvoie à ce qui s'opère sans intermédiaire, sans médiation, sans chaînon, sans succession d'éléments, mais, bien au contraire de façon directe, par coïncidence parfaite avec l'objet. La source représente une « eau sortant de terre « et, par analogie, un principe. Cette source jaillissante peut, métaphoriquement, nous suggérer quelque origine où s'alimenterait la vérité, conçue comme ce qui est conforme au réel et à l'être.  L'intitulé du sujet est donc bien délimité. Il ne s'agit pas de savoir si le contact sensible avec le réel forme le vrai, mais de bien comprendre s'il est principe et origine du vrai. Le contact sensible et immédiat avec le réel, sans aucun intermédiaire, constitue-t-il une matrice de la vérité, une source jaillissante de ce qui est réellement et fondamentalement? Tel semble être le sens de la question en tant que telle.  Or, cette question pose problème et ne va nullement de soi. En effet, l'immédiateté (sensible) en tant que telle n'est même pas médiatisée par le langage, puisqu'elle se donne à moi de façon directe. Elle n'est donc pas saisissable et a fortiori transmissible à autrui. Or, la vérité, conformité au réel, contient à la fois stabilité et universalité. Le problème est donc de comprendre comment, de ce contact direct, insaisissable et intransmissible parce qu'individuel, peut jaillir une vérité stable et universelle.

« choses sans aucune médiation, n'est-ce pas se référer au pur néant des impressions psychologiques, disparuesaussitôt que nées? La conscience qui croit atteindre l'absolu et le vrai dans la singularité et l'immédiateté, enrejetant le logos, le discours, n'est-elle pas dupe d'une illusion.

L'expérience de l'être immédiat nous communiquebien vite le contraire de cet être, à savoir le néant, car au fond, l'immédiat, insaisissable, apparaît vide etindéterminé.

Quand la conscience, lasse ou trop savante, désireuse de retrouver l'immédiat et le vécu, préfère lesilence où elle coïncide avec l'Absolu, ne peut-on dire qu'elle se dissout et se perd dans l'anéantissement le plustotal? En préférant le silence, elle s'abîme dans une fuite indéfinie d'un vécu psychologique évanescent.

N'atteignantque le néant, elle ne saurait alors parvenir au vrai.

L'expérience immédiate, dans ces conditions, n'est pas la sourcede la vérité, mais le vide de l'âme qui se perd en croyant s'atteindre.Ainsi, quand la conscience, lasse du fardeau de la médiation et des concepts, veut se tourner intégralement versl'expérience sans nulle médiation, vers ce que Bergson appelait les « données immédiates de la conscience », alorselle parvient à quelque intuition ineffable et peut avoir alors l'illusion qu'elle coïncide profondément avec le courantde la vie et de l'existence, avec le noyau le plus concret de l'être, mais il ne s'agit précisément que d'une illusion.

Sil'expérience immédiate semble le chemin le plus sûr vers le vrai, en fait ce que la conscience rencontre alors en saquête, c'est, non point l'arbre d'or de la vie, mais le néant pur.

Non, l'expérience immédiate n'est pas la sourcejaillissante de la vérité.

Le vécu pur, c'est le vide, il ne signifie rien.

L'immédiat, loin d'être l'origine et la source duvrai, se révèle indéterminé et creux.

La singularité immédiate, n'étant que dissolution, ne peut nous amener vers levrai et vers l'être. C) Synthèse. Ainsi avons-nous vu que l'expérience immédiate n'est pas source du vrai, la vérité ne s'origine pas dans l'immédiat.Mais elle ne s'origine pas davantage dans la pure médiation coupée du vécu pur et de l'expérience en tant que telle.La vérité ne saurait être cherchée que dans l'unité du médiat et de l'immédiat : l'expérience immédiate, intégréedans le médiat, voici, en effet, la source du vrai et de l'être, comme Hegel l'a montré avec éclat. L'origine et le principe du vrai, c'est l'immédiat, c'est-à-dire le vécu concret, qui accepte la médiation du discours etqui, par là même, devient ainsi un terrain pour l'expression.

Quand les données immédiates ne renoncent ni à lamédiation ni au logos, alors elles forment une matrice pour le discours et le vrai.

L'expérience immédiate, contactavec les choses mêmes, est le terreau de toute création, si du moins elle accepte d'être enserrée parl'entendement, les mots et les médiations.

Ainsi peut-elle devenir source du vrai, si elle se réconcilie avec lesconcepts.

Ceci se vérifie en chaque domaine, qu'il soit scientifique, philosophique, esthétique.

Ainsi le poète ad'abord affaire à une infinie multiplicité, immédiate, à un ineffable.

Cet ineffable doit être médiatisé et déployé dansle discours qui lui donne un sens précis.

Car ce qui n'est pas encore médiat est sens polymorphe, infinité designifications, et ne peut donc être vérité.

Ainsi, ce qui est source du vrai, c'est l'immédiat se développant dans lemédiat.

Si l'intuition immédiate demeurait en nous, repliée et muette, nous n'aurions qu'à nous regarderéternellement dans un miroir, comme le remarque Jankélévitch. 3) Conclusion A la question posée, nous répondrons donc par la négative : l'expérience immédiate à elle seule n'est pas à l'originedu vrai.

Elle ne peut l'être car elle est alors insaisissable.

Mais elle devient la source jaillissante de ce qui estréellement si elle accepte d'être médiatisée par le langage et les concepts. L'union entre le médiat et l'immédiat est seule féconde, seule elle est semence du vrai.

Il faut rendre l'immédiatmédiat, opérer une transformation incessante de l'immédiat et du médiat l'un dans l'autre.

Cette transformationincessante est le seul itinéraire possible vers le vrai et l'Être.. »

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