L'experience de la vie peut-elle se transmettre ?

« est rendue possible et certaine, mais cette connaissance ne fait pas partie de cette expériencepremière et indubitable qu'est la conscience que je suis et que j'existe.

Toute expérience de la vieest alors individuelle et il n'est aucunement possible de la transmettre, dans la mesure où laconscience est ce qu'il y a de plus interne et de plus intime au sujet en tant qu'individu singulier. Mais cependant, la vie et l'expérience qu'on en a peuvent-elles se réduire à la conscience ? Ne sommes nous pas enperpétuel contact avec autrui, qui nous apprend et nous fait partager des expériences ? L'expérience de la vie comme nécessaire transmission de savoirs : le besoin d'un guide dans la vie de l'homme.

§ L'homme semble ne pouvoir avancer dans la vie que s'il est guidé.

Et en effet, n'est-ce pas par notreéducation que nous pouvons agir et penser, et de fait avoir une expérience de la vie.

L'expérience dela vie ne serait plus alors purement interne au sujet mais dépendrait de notre savoir et donc de notreéducation.

C'est ainsi l'éducation, comprise comme transmission de savoirs qui permettrait à l'hommede pouvoir bien vivre et l'expérience de la vie devrait alors être transmise pour assurer à tous lesconnaissances nécessaires à la vie bonne.

C'est en outre ce que met en lumière Socrate dans laRépublique : l'éducation est en effet selon lui primordiale et nécessaire à la réalisation de la cité juste notamment.

Ainsi toute la vie, c'est-à-dire le comportement des hommes tient à leur éducation etc'est au philosophe-roi notamment de leur donner cette éducation.

Dès lors, cette éducation vise àêtre une transmission, de savoirs, de compétences, que la philosophe à lui-même acquis et qui sontnécessaires à la vie en communauté et individuelle.

C'est donc bien son expérience de la vie,objectivable à travers des connaissances et des conduites précises, que le philosophe transmet auxindividus de la cité.

L'expérience de la vie est donc objective et universalisable en tant qu'elle estbasée sur un certain nombre de connaissances à avoir et de comportements à suivre.

Elle peut doncet doit donc se transmettre, afin que la vie en communauté comme le bien-être individuel soientpossibles.

Cette transmission est donc ce guide dont l'homme a besoin pour bien vivre et pour que lacité juste soit possible, c'est-à-dire pour que le vivre ensemble soit harmonieux et juste. § La transmission de l'expérience de la vie s'avère donc nécessaire à l‘homme, ans la mesure où seul ceguide lui permet de savoir comment s'orienter dans la vie.

Ainsi, dans son opuscule Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique , prop.

6, Kant énonce cette idée selon laquelle « l'homme est un animal qui a besoin d'un maître ».

En effet, l'homme a besoin de cette transmission del'expérience de a vie d'un maître, dans la mesure où sans cela, il se laisserait aller à son penchantégoïste, se cloitrant dans une impasse individuelle, là où il doit aller vers la voie de l'universalité.

Lemaître doit donc forcer l'homme à obéir à une volonté universelle.

Cependant se posent deuxproblèmes majeurs à l'idée selon laquelle les hommes auraient besoin d'un maître qui leur transmetteleur expérience de la vie afin de les mettre sur le droit chemin : tout d'abord, où trouver ce maître ?Si celui-ci doit provenir des hommes, ne sera-t-il pas lui aussi dans le besoin d'avoir un maître pour leguider.

On remontrait donc toujours plus pour trouver un homme juste par nature et capable de bienvivre de lui-même, sans jamais le trouver.

Le second problème est celui de la liberté et del'autonomie.

En effet, si l'homme a besoin d'un maître, comment faire qu'il soit libre et autonome, s'ilest dépendant de quelqu'un d'autre ? L'éducation comme transmission de l'expérience de la vie, ayantpour fin de mettre l'homme dans le droit chemin de la vie, s'avèrerait alors être une aliénation del'homme.

On aurait donc d'un côté une vie trop subjective pour être transmissible et d'un autre uneéducation transmissible mais aliénante, devant permettre la vie mais empêchant la liberté. Mais l'expérience de la vie n'est-elle pas toujours déjà transmissible parce qu'universelle ? L'expérience de la vie est universelle, et ne nécessite aucune transmission, étant toujours déjà partagée par tous.

§ La conscience est apparue de prima abord comme étant le propre du sujet individuel, de la viepersonnelle et intime et de l'identité particulière.

Cependant, si Descartes fait de la conscience, entant qu'expérience de la vie, une intériorité intime et profonde du sujet, il n'en reste pas moins que laconscience est aussi ce qi fait l'identité spécifique de l'homme et de la vie, en tant qu'elle est lamarque de ce que tout homme possède en propre.

La conscience, comme ce par quoi chacun faitl'expérience de la vie, est alors ce qu'il y a de commun entre tous les hommes.

La conscience est cequi fait le propre de l‘homme et dès lors, l'expérience de la vie à travers la conscience est universelleen tant qu'elle est propre à tout un chacun.

L'expérience de la vie apparaît alors comme étanttoujours déjà la même en chaque individu.

Il y a donc des différences et des singularités au niveaudes ressentis, des affects des hommes, mais l'expérience objective de la vie est identique, en tantqu'elle passe par la conscience, présente en tous.

L'expérience de la vie n'a donc pas besoin d'êtretransmise en tant qu'elle est présente de manière universelle dans tous les hommes : elle est toujoursdéjà partagée par eux et ‘a donc pas besoin d'être transmise.. »