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Lettre à Morus, 5 février 1649 - René DESCARTES

Publié le 22/04/2010

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« De tous les arguments qui nous persuadent que les bêtes sont dénuées de pensées, le principal, à mon avis, est que bien que les unes soient plus parfaites que les autres dans une même espèce, tout de même que chez les hommes, comme on peut voir chez les chevaux et chez les chiens, dont les uns apprennent beaucoup plus aisément que d'autres ce qu'on leur enseigne ; et que bien que toutes nous signifient très facilement leurs impulsions naturelles, telles que la colère, la crainte, la faim, ou autres états semblables, par la voix ou par d'autres mouvements du corps, jamais cependant jusqu'à ce jour on n'a pu observer qu'aucun animal en soit venu à ce point de perfection d'user d'un véritable langage, c'est-à-dire d'exprimer soit par la voix, soit par les gestes quelque chose qui puisse se rapporter à la seule pensée et non à l'impulsion naturelle. Ce langage est en effet le seul signe certain d'une pensée latente dans le corps ; tous les hommes en usent, même ceux qui sont stupides ou privés d'esprit, ceux auxquels manquent la langue et les organes de la voix, mais aucune bête ne peut en user ; c'est pourquoi il est permis de prendre le langage pour la vraie différence entre les hommes et les bêtes. «

Le thème : La différence de l'homme et de l'animal au regard du lien langage, pensée.  La thèse : L'homme est le seul être vivant pensant car il est le seul être vivant parlant.  Les enjeux : La présence du langage témoigne de la présence de la pensée, spécificité de l'homme. Il faut donc envisager le sens de la coexistence du langage et de la pensée, ainsi que le sens du langage comme propre de l'homme.  La structure : Le premier mouvement du texte instruit l'idée selon laquelle l'animal ne pense pas parce qu'il ne parle pas (« De tous les arguments... impulsion naturelle «).  Le deuxième mouvement du texte montre que le langage est le propre de l'homme (« Ce langage... les hommes et les bêtes «).  La partie critique sera constituée d'un approfondissement de la thèse de Descartes.

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« communication n'est pas un langage.

Benvéniste analyse ces travaux et constate que le message des abeilles,message gestuel constitué de danses, ne peut avoir lieu que le jour.

En outre, ces messages appellent desconduites et non des réponses : il n' y a aucun dialogue.

Les contenus des messages se limitent à la présence denourriture et aux données spatiales permettant d'y accéder.

Le langage humain ne connaît pas ces limitations.

Lacommunication animale est constituée par un code de signaux, le langage humain est une représentation symboliquedu réel à l'aide de signes.

Ainsi le « véritable langage » relève-t-il de la pensée.Le langage est donc le propre de l'homme, c'est ce que Descartes nous montre dans le deuxième mouvement dutexte. d) Le langage est la vraie différence entre l'homme et l'animalL'animal n'est qu'un corps sans pensée, c'est pourquoi même lorsqu'il semble pouvoir parler (comme le mainate),lorsqu'il est pourvu d'organes de la voix, il ne parle pas, car sa voix est un mouvement du corps sans pensée, c'estun mouvement automatique.

L'animal est analysé par Descartes sur le modèle mécaniste de l'automate.

On peutconstruire un automate qui imite parfaitement l'animal, rien ne distinguerait l'automate-animal de l'animal.

Enrevanche, on verrait immédiatement la différence entre un automate voulant reproduire un homme et un homme,cette différence est la pensée et, par là, le langage.

Même dans l'hypothèse d'une machine parlante, cette parolene serait pas du langage.

Ainsi la vraie fonction du langage est la création.

Pour l'animal comme pour la machine, il n'y a que répétition.

Ce n'est donc pas la présence d'organes de la voix qui fait la parole.

Cette analyse est présenteégalement chez Rousseau, qui nous montre que la parole ne dépend pas des organes.

Les animaux, nous dit-il, ensont pourvus et ne parlent pas.

Descartes nous dit que les hommes « même ceux qui sont stupides » parlent, etRousseau semble lui faire écho quand il écrit que l'on peut donner à l'homme « une organisation aussi grossière » qu'ilnous plaira, cela ne l'empêche pas de parler.

L'homme muet parle.

Le parallèle des thèses de Rousseau et Descartespeut être poursuivi.

Ainsi, Rousseau prend l'exemple des castors et des abeilles pour indiquer la présence en euxd'une langue naturelle pour communiquer mais cette langue est un code inné incapable de progrès, incapable decette fonction propre au langage qui est la création.

« L'invention de l'art de communiquer nos idées dépend [...]d'une faculté propre à l'homme » (Essai sur l'origine des langues, Rousseau). Transition : Le texte nous montre que le langage, signe de la pensée, est le propre de l'homme.

L'intérêt philosophique peut s'énoncer à travers la question suivante : en quel sens le langage est-il le propre de l'homme ettémoigne-t-il de l'acte de penser ? Deuxième partie Le langage est le propre de l'hommeMontrons en quoi le langage n'est pas une faculté humaine parmi d'autres mais véritablement le propre de l'hommeparce qu'elle est indissociable de l'aptitude à la pensée et à la création.

L'homme ne possède pas simplement lafaculté de la parole parmi d'autres facultés.

Le langage est l'essence de l'homme.

C'est cette analyse que conduitHeidegger dans Acheminement vers la parole.

Il montre que l'homme parle de manière incessante même lorsqu'il rêveou qu'il se tait.

La lecture comme l'écriture ne sont pas que des paroles lues ou écrites mais de la parole.

L'hommevit dans le monde du langage, il est ce monde.

D'une certaine manière nous n'habitons que le monde que nousparlons.

Ainsi, selon Heidegger, « l'homme est homme en tant qu'il est celui qui parle.

»Langage et pensée sont intimement liés, la pensée est inséparable de son expression.

Il n'y a pas d'antériorité de lapensée sur le langage, le langage ne traduit pas la pensée.

Ainsi Merleau-Ponty nous montre que pour que la parolesignifie, il faut que le sens et le mot soient donnés en même temps.

L'acte de la parole est la pensée.

Nous parlonssur fond de langage.

L'homme est homme parce qu'il pense, c'est-à-dire parce qu'il parle.Cette parole est fondamentalement créatrice.

Le langage se définit par ses possibilités infinies de création et cecidépasse toute organisation physiologique.

L'homme invente sans cesse de nouveaux énoncés. ConclusionCe texte instruit l'idée selon laquelle l'homme parle parce qu'il pense.

Thèse qui a de nombreux échos dans toutel'histoire de la pensée.

La physiologie, l'anatomie, la linguistique viennent confirmer ce partage entre les êtresvivants.

L'homme est cet être particulier doté d'une pensée-langage, qui lui confère des devoirs envers le reste del'univers.. »

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