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L'esprit est-il toujours la dupe du coeur ?

Publié le 28/03/2009

Extrait du document

esprit

 

I – La primat de l’esprit

 

II – Le cœur a ses raisons que la raison ignore

 

III – Parallélisme entre le coeur et l'esprit

 

 

 

 

Sujet formulé en référence à la maxime de François de La Rochefoucauld énonçant que « l’esprit est toujours la dupe du cœur «, il est nécessaire dès l’abord de considérer ici ce que signifie le cœur. Le cœur est traditionnellement le siège de la sensibilité et des passions. Dès lors le sujet nous oriente sur la question des rapports de puissance entre l’esprit ou l’âme et le cœur, le corps et ses passions, sa sensibilité. Etre la dupe de quelqu’un ou quelque chose c’est être le jouet de quelqu’un ou être manipulé sans s’en apercevoir. Le problème est alors de savoir si l’esprit quelque soit ses capacités peut quelque chose face à ses passions : les passions de l’âme. Ou si, malgré ses efforts, il reste incapable d’être le maître à bord. En ce sens, une tension se crée entre une pensée qui verrait l’esprit comme une puissance absolue de contrôle, comme un empire dans un empire, et une autre qui refusant ce primat par expérience verrait en l’homme le jouet de ses passions manifestant l’impuissance et l’humiliation de la raison.

            Si ce balancement peut constituer deux points essentiels de notre étude (1ère & 2nd partie), il n’en reste pas moins qu’il conviendra de s’interroger sur la légitimité de cette vision agonistique des facultés et des puissances en l’homme et pourquoi pas revenir sur ce dualisme traditionnel (3ème partie).

 

esprit

« peuvent qu'indirectement être changées par le corps, comme au contraire les dernières dépendent absolument desactions qui les produisent, et elles ne peuvent qu'indirectement être changées par l'âme, excepté lorsqu'elle estelle-même leur cause.

Et toute l'action de l'âme consiste en ce que, par cela seul qu'elle veut quelque chose, ellefait que la petite glande à qui elle est étroitement jointe se meut en la façon qui est requise pour produire l'effet quise rapporte à cette volonté ».

Ainsi, si par colère on peut lever la mai sur quelqu'un, la volonté peut la retenir ; demême pour la fuite (cf.

article 46).d) Cependant, s'il est possible que l'âme dispose des passions il faut bien remarquer que cette lutte est sans fin.

Eneffet, comme le note l'article 46 des Passions de l'âme de Descartes , la raison qui fait que l'âme ne peut disposer entièrement de ses passions est « qu'elles sont presque toutes accompagnées de quelque émotion qui se fait dansle cœur, et par conséquent aussi en tout le sang et les esprits, en sorte que, jusqu'à ce que cette émotion aitcessé, elles demeurent présentes à notre pensée en même façon que les objets sensibles y sont présents pendantqu'ils agissent contre les organes de nos sens ».

Au demeurant, il existe peu d'hommes comme le note Descartesdans l'article 49 qui soient si faibles ou si irrésolus qu'ils ne puissent rien à l'encontre de leurs passions.

Néanmoins,et c'est là tout le primat de l'esprit : la force de la volonté, c'est-à-dire la force ou la faiblesse de l'âme, n'estjamais suffisante pour combattre une passion si elle n'est pas accompagnée de la connaissance de la vérité (article49).

C'est en ce sens que l'on peut comprendre alors le dernier article, 50, de la première partie des Passions del'âme : « qu'il y a point d'âme si faible qu'elle ne puisse, étant bien conduite, acquérir un pouvoir absolu sur sespassions ».

Prenant alors l'exemple du chien, du chasseur et de la perdrix, Descartes note « Ainsi, lorsqu'un chienvoit une perdrix, il est naturellement porté à courir vers elle ; et lorsqu'il oit tirer un fusil, ce bruit l'incitenaturellement à s'enfuir ; mais néanmoins on dresse ordinairement les chiens couchants en telle sorte que la vued'une perdrix fait qu'ils s'arrêtent, et que le bruit qu'ils oient après, lorsqu'on tire sur elle, fait qu'ils y accourent.

Orces choses sont utiles à savoir pour donner le courage à un chacun d'étudier à régler ses passions.

Car, puisqu'onpeut, avec un peu d'industrie, changer les mouvements du cerveau dans les animaux dépourvus de raison, il estévident qu'on le peut encore mieux dans les hommes, et que ceux même qui ont les plus faibles âmes pourraientacquérir un empire très absolu sur toutes leurs passions, si on employait assez d'industrie à les dresser et à lesconduire ».

Transition : Ainsi l'esprit n'est pas toujours la dupe du cœur, il a la capacité de prendre le contrôle de ses passions.

Pourtant, nefaut-il pas remettre en cause le primat de l'esprit : ce pouvoir de la volonté.

En effet, l'expérience ne nous montre-t-elle pas que l'esprit est toujours la dupe du cœur ? II – Le cœur a ses raisons que la raison ignore a) Effectivement, et pour s'en convaincre nous pouvons reprendre l'exemple que fournit Pascal dans les Pensées , reprenant l'exemple de Montaigne dans les Essais et l'apologie de Raymond Sebond.

« Le plus grand philosophe du monde sur une planche plus large qu'il ne faut, s'il y a au-dessous un précipice, quoique sa raison le convainque desa sûreté, son imagination prévaudra.

Plusieurs n'en sauraient soutenir la pensée sans pâlir et suer.

Je ne veux pasrapporter tous ses effets ; qui ne sait que la vue des chats, des rats, l'écrasement d'un charbon, etc, emportent laraison hors des gonds ».

Le cœur et ici l'imagination a donc plus de force que l'esprit.

L'expérience de penséereproduite est celle d'un philosophe suspendu dans le vide par des planches entre les tours de Notre-Dame.

Sachantqu'il n'a aucune chance de s'écraser, connaissant donc la vérité sur sa situation, ses passions comme la peur duvide ne devrait pas lui venir.

Dès lors comment expliquer qu'il se crève les yeux ? N'est-ce pas dire alors que l'espritest la dupe du cœur.b) En effet, l'imagination est cette puissance en l'homme qui le domine.

Comme il le note dans les Pensées , Pascal écrit : « C'est cette partie dominante dans l'homme, cette maîtresse d'erreur et de fausseté, et d'autant plus fourbequ'elle ne l'est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité, si elle l'était infaillible du mensonge.

Mais, étantle plus souvent fausse, elle ne donne aucune marque de sa qualité marquant du même caractère le vrai et le faux.Je ne parle pas des fous, je parle des plus sages, et c'est parmi eux que l'imagination a le grand droit de persuaderles hommes.

La raison a beau crier, elle ne peut mettre le prix aux choses ».

L'esprit n'a pas de prise surl'imagination : elle gouverne le monde.

Elle est cette « folle du logis », cette « folle qui joue à être folle » commedira Alain.

Dès lors le primat de l'esprit ou de la raison est vain et inexistant : « Cette superbe puissance ennemie dela raison, qui se plaît à la contrôler et à la dominer, pour montrer combien elle peut en toutes choses, a établi dansl'homme une seconde nature ».c) Bien plus, « la dernière démarche de la raison est de reconnaître qu'il y a une infinité de choses qui la surpassent.Elle n'est que faible si elle ne va jusqu'à connaître cela ».

En effet, pour Pascal dans les Pensées comme pour La Rochefoucauld « l'esprit est toujours la dupe du cœur ».

Cependant, cela ne signifie pas que toute puissance de connaissance soit réduite à néant, bien au contraire : « nous connaissons la vérité, non seulement par la raison,mais encore par le cœur ; c'est de cette dernière sorte que nous connaissons les premiers principes, et c'est envain que le raisonnement, qui n'y a point de part, essaye de les combattre […] Et c'est sur ces connaissances ducœur et de l'instinct qu'il faut que la raison s'appuie, et qu'elle y fonde tout son discours.

(Le cœur sent qu'il y atrois dimensions dans l'espace et que les nombres sont infinis ; et la raison démontre ensuite qu'il n'y a point deuxnombres carrés dont l'un doit le double de l'autre.

Les principes se sentent, les propositions se concluent ; et le toutavec certitude, quoique par différentes voies.) Et il est aussi inutile et ridicule que la raison demande au cœur despreuves de ses premiers principes, pour vouloir y consentir, que le cœur demandât à la raison un sentiment detoutes les propositions qu'elle démontre, pour vouloir les recevoir.

Cette impuissance ne doit donc servir qu'àhumilier la raison, qui voudrait juger de tout, mais non pas à combattre notre certitude, comme s'il n'y avait que laraison capable de nous instruire ».

Et c'est en ce sens aussi que l'on peut comprendre que le cœur a ses raisons que. »

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