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Les mots apaisent-ils la souffrance ?

Publié le 27/02/2008

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On peut définir la souffrance comme la résonance affective et morale de la douleur dans la conscience du malade. Et en effet, on associe souvent la souffrance à un état qui peut évoluer vers la dépression. Le mot, ou les mots, quant à lui, est un signe d'une langue qui est utilisé pour signifier quelque chose : un état, ou dire une chose ; s'exprimer. Cependant, le not normalement ne s'entend que comme un terme écrit. Néanmoins, on peut dire aussi que la parole est constitué par des mots même si cela ne va pas de soit. En ce sens, nous n'userons pas du terme technique de « mot » ici comme on peut l'entendre spécifiquement en linguistique. Apaiser c'est réduire la souffrance mais cela signifie aussi que cette souffrance est encore présente, mais peut-être plus supportable. Or se poser la question « les mots apaisent-ils la souffrance ? » nous invite à nous interroger sur la valeur expiatoire ou plutôt exutoire, c'est-à-dire ce qui permet de soulager, en l'occurrence ici une souffrance. Mais dès lors c'est envisager un rapport possible entre un mot et un état de l'âme. La question de fond est alors qu'est-ce que le mot : a-t-il un rapport ou une action possible sur un état psychique ou n'est-il d'un moyen conventionnel pour dire les choses ? Et c'est à la lumière que cette question que l'on pourra saisir le rapport entre les mots et la souffrance, c'est-à-dire la valeur curative ou exutoire de l'expression écrite ou orale. C'est donc en étudiant la valeur du mot à l'aune d'une théorie linguistique que nous saisir le rapport entre le mot et la souffrance. Ainsi, si envisageant le mot comme une convention, nous établirons par principe l'impossibilité d'un rapport entre les mots et la souffrance (1ère partie), nous serons tout de même bien obliger de reconnaître une valeur aux mots dans l'apaisement de la souffrance comme l'est le témoignage ou le « talking-cure » (2nd partie) ce qui nous amènera à réinterroger la valeur et le fondement du signe par rapport au signifié (3ème partie).

« II – Valeur exutoire des mots sur la souffrance a) En effet, comme on peut le voir dans le récit de Primo Levi dans Si c'est un homme , l'écriture est un exutoire.

Il apparaît effectivement, comme il le dit lui-même, que l'écriture lui a permis de surmonter l'expérience des camps ouplus exactement, lui a permis de ne pas succomber tout de suite à l'envie du suicide face à ce non-sens qu'il a vécuet au sentiment de culpabilité d'être encore en vie.

Cette souffrance réelle et vécue a bien pu être apaisé pendantun temps.

Il ne s'agit que d'une apaisement qui ne fut que de courte durée puisque Primo Levi s'est bel et biensuicidé.

Or cette expérience de l'écriture comme apaisement de la souffrance n'est pas une expérience isolée et onpeut le voir aussi avec Martin Grey dans Au nom de tout les miens .

Sorti lui aussi des camps et ayant dû survivre à la mort de toute sa famille une fois dans les camps puis chez lui en Provence dans un incendie, il raconte quel'écriture est comme un médicament, il permet de mettre sur le papier, d'extérioriser une souffrance et ainsi del'apaiser même si elle ne disparaît pas.b) Or ce rôle du passage par les mots dans l'apaisement de la souffrance donc comme cure et exutoire et bien l'unedes méthodes utilisées notamment en psychanalyse comme on peut le voir avec Freud dans son Introduction à la psychanalyse .

En effet, comme le rêve est un exutoire de l'inconscient, il apparaît que les mots étant une manière de mettre en forme une souffrance, ils lui permet de se dévoiler, de prendre corps dans les mots et c'est biensouvent ce qui se passe dans l'utilisation de l'hypnose ou, dans un autre ordre d'idée, ce que l'on peut observerdans les groupes de soutiens psychologiques d'aide aux victimes par exemple.

Le premier stade pour atténuer cettesouffrance est l'extériorisation par des mots, à travers le dialogue avec autrui.

C'est amener à la conscience ce quin'est pas entièrement conscient car non-formulé.

En ce sens, les mots peuvent apaiser les souffrances mais biensouvent cela n'est justement qu'un apaisement et ne résout en rien la souffrance.

Bien sûr ici nous ne parlons pasde la souffrance sociale qui elle a du mal à s'apaiser simplement par des mots ou des discours bien que cela soitpossible.c) Mais dès lors il est convient alors de retravailler notre rapport entre le mot et l'affection de l'âme afin de fairecorrespondre ces mots.

Et c'est bien ce que l'on peut faire à travers la définition du langage chez Aristote tel que cela transparaît dans De l'interprétation I, I : « les sons émis par la voix sont des symboles des états de l'âme, et les mots écrits les symboles des mot émis par la voix ».

En ce sens, si le mot n'est pas sur le même plan ontologiqueque les états de l'âme dont fait partie la souffrance, il n'en reste pas moins que les mots ont la capacité d'agir surles états de l'âme.

Transition : Ainsi les mots peuvent apaiser les souffrances dans la mesure où ils permettent de la mettre en lumière unesouffrance qui est bien souvent plus un ressentiment assez inconscient et vécu qu'une souffrance pleine etconsciente d'elle-même.

Cela suppose alors qu'il n'y a pas une coupure radicale entre les mots et la souffrance doncavec les états de l'âme.

Mais dès lors n'est-ce pas mettre en perspective un lien entre le mot et la passion, voiredire que le mot a une vertu cathartique.

Il s'agit donc pleinement de saisir le fonctionnement des mots dans leur rôled'exutoire de la souffrance.

III – Fondement exutoire et apaisant des mots dans la souffrance : le mot comme action a) Effectivement, les mots peuvent bien apaiser la souffrance dans la mesure où les mots ont cette capacité à faireapparaître à donner un être à un ressenti.

Mais pour qu'il que les mots aient un tel rôle, il faut bien voir que le« dire » ou les mots doivent avoir une vertu à agir : ils ne sont pas simplement des structures vides de vécuspsychiques et psychologiques.

Si les mots ont la capacité parfois d'apaiser une douleur de l'âme c'est bien parcequ'ils peuvent mettre en mouvement l'âme.

Autrement dit, les mots ont alors un pouvoir d'action et d'agir quidépasse simplement le symbolique.

Et c'est en ce sens que l'on peut comprendre le titre même d'Austin : Quand direc'est faire.b) Or cela signifie alors que les mots, et langage ont un rapport encore plus étroit avec les affections de l'âmec'est-à-dire les passions.

Et c'est bien ce que montre Rousseau dans son Essai sur l'origine des langues : « On ne commença pas par raisonner, mais par sentir.

On prétend que les hommes inventèrent la parole pour exprimer leursbesoins ; cette opinion me paraît insoutenable.

[…] De cela seul suit que l'origine des langues n'est point due auxpremiers besoins des hommes […] Des besoins moraux, des passions.

Toutes les passions rapprochent les hommesque la nécessité de chercher à vivre force à se fuir.

[…] des accents, des cris, des plaintes.

Voilà les plus anciensmots inventés, et voilà pourquoi les premières langues furent chantantes et passionnées avant d'être simples etméthodiques.

» C'est pourquoi, le sens propre ne fut pas le premier puisqu'on ne parla d'abord qu'en poésie.c) C'est bien là le point essentiel : le langage est d'abord poétique et les mots ne sont alors que des tropes.

Et dansce cas, les mots sont une mise en scène ils ont un rôle cathartique tel qu'on le voir de la poésie et de la tragédiequi ne sont au fond qu'une suite de mots dans la Poétique d'Aristote .

Les mots sont une forme d'expression artistique et c'est bien ce que montraient les exemples de Primo Levi et Martin Gray.

Les mots sont en eux-mêmesartistiques et l'on peut voir aussi que d'autres formes de langage comme l'art de la peinture sont aussi un moyend'apaiser la souffrance, en se fondant sur la valeur cathartique du langage dont les mots sont une espèce.

Conclusion : Les mots peuvent donc apaiser les souffrances mais cela ne reste qu'une possibilité et nullement unenécessité intrinsèque à l'utilisation de ces derniers.

Néanmoins répondre par la possibilité implique des ces motsdoivent se comprendre en tant que mise en mouvement de l'âme pour réduire la souffrance et l'atténuer un peu.. »

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