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Les hommes ont-ils le droit de se juger et de se punir mutuellement ?

Publié le 14/06/2009

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Les hommes ont-ils le droit de se juger et de se punir mutuellement ? Pour quelles raisons peuvent-ils se croire autorisés ou fondés à le faire. La question est complexe et comporte plusieurs aspects. a) Le drame de la responsabilité. Nous avons déjà reconnu les difficultés de la responsabilité, ses conditions, ses limites. La responsabilité pénale en est la forme la plus aiguë. Des films célèbres comme Les Inconnus dans la maison et surtout l'oeuvre de CAYATTE.  Nous sommes tous des assassins ont posé la question de façon saisissante, Il est certain qu'on ne peut se contenter d'individualiser la responsabilité d'un crime au mépris des conditions sociales ou inter-individuelles qui ont pu jouer dans sa genèse sinon dans son accomplissement. Il serait trop facile de se disculper radicalement, de prétendre n'être pour rien dans les fautes des hommes que nous aurions peut-être pu préserver de leur chute, soit par une meilleure organisation sociale, soit par l'assistance individuelle d'ordre moral ou matériel que nous devons au prochain. Les existentialistes, reprenant la théorie traditionnelle, ont rappelé que chacun est responsable de tout devant tous. De plus on ne peut méconnaître que les situations de juge et d'accusé sont interchangeables. Nul ne doit présumer de l'avenir et s'imaginer être à jamais préservé des fautes qu'il est chargé de sanctionner. Enfin il est indéniable que Dieu seul, s'il existe, peut déterminer avec exactitude et rigueur la responsabilité authentique de l'agent moral. Il n'en reste pas moins qu'on ne peut et ne doit retirer aux hommes la qualité d'être responsables car elle est essentielle à leur dignité, à la justification de leur existence.

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« c'est sa réalité qui est problématique.

» Qu'elle ne fût point cependant et on peut se demander ce que deviendraitl'exigence de justice intégrale qui est en nous, le désir de bonheur également.

La faiblesse humaine est telle en cequi concerne l'évaluation exacte et profonde de la responsabilité, que seul l'Être qui sonde les reins et les coeursselon l'image de l'Écriture serait capable d'y suppléer de façon décisive.

Au lieu de dire : si Dieu existe la justicerègne, mais encore faudrait-il qu'il fût pour que cela soit, on pourrait dire:si nous voulons que la justice soit, parfaite et souveraine, cela même suppose et révèle l'existence du SouverainJuge sans laquelle nous ne saurions avoir pareille exigence d'absolu.

La même dialectique est à faire ici que celle quenous avons esquissée à propos du mot de DOSTOÏEVSKI : si Dieu n'existe pas, tout est permis.

C'est du moins àcela que peut accéder la réflexion philosophique, sans cesser pour autant de poser le problème. e) Valeur morale des sanctions. Les sanctions, quelles qu'elles soient, se justifient-elles au regard de la morale ? Certains philosophes ers doutent etnotamment GUYAU dans son Esquisse d'une morale sans obligation ni sanction. La critique des sanctions. La légitimité des sanctions est discutée, surtout pour ce qui concerne les sanctions extérieures, légales, pénales ousociales.

Le principal argument de GUYAU est que la sanction est immorale puisqu'elle conduit à agir par intérêt,qu'on veuille obtenir une récompense ou éviter un possible châtiment.

GUYAU pense que c'est bien là le mobileinavoué du croyant dont la conduite est dominée par le désir du ciel et la crainte de l'enfer.De plus il fait observer que la sanction est inefficace.

Pour qu'il y eût réparation du mal commis il faudrait que lecoupable acceptât le châtiment et se l'infligeât à lui-même par un mouvement intérieur.

S'il n'y consent point, rienn'est fait, la punition reste inopérante et la réparation n'est pas obtenue car le mal véritable c'est l'attachement dela volonté au mal. Les sanctions morales ou intérieures : remords et repentir. On ne saurait discuter de la valeur des sanctions sans spécifier l'espèce considérée et sans étudier plusspécialement les sanctions intérieures à la conscience morale.

Il suffit de les considérer pour voir tomber lesobjections de GUYAU qui visaient d'ailleurs surtout les sanctions extérieures ou objectives.

Mais s'il advenait que lessanctions intérieures fussent les seules authentiques que resterait-il de la thèse de l'illégitimité des sanctions engénéral ?La conscience morale est un juge installé au fond de nous-mêmes.

En ce sens tout se juge du dedans à conditiontoutefois que l'on tienne la conscience morale pour une autorité universelle parlant au nom de la dignité humaine etnon pour une évaluation personnelle relative à chacun.Pour préciser, bornons-nous à définir : le regret, le remords et le repentir, reproches venus de l'autorité intérieure.Le regret n'implique pas forcément l'impression de faute ou de culpabilité.

C'est simplement le déplaisir causé par lesouvenir de ce qu'on a fait ou manqué de faire, joint au désir que le passé ait été différent.

On peut faire duremords et du repentir deux variétés du regret ou bien les en distinguer radicalement si l'on a égard aux dispositionspsychologiques et au climat moral qui les conditionnent.

Mais le problème est de savoir en quoi ils se différencientl'un de l'autre à partir du sentiment de faute ou de culpabilité.

Malgré la dualité des termes, le vulgaire confondcommunément deux choses bien distinctes.Nous nous permettons de renvoyer ici à notre ouvrage Le Suicide, chapitre III, pages 51-54.

Les deux attitudes,remords et repentir, présupposent le sentiment d'une faute commise mais les intentions psychologiques en sontdifférentes.Dans le remords on considère la faute comme impardonnable, inexpiable, sans appel.

Poursuivi par cette hantise del'irréparable, l'homme du remords a l'impression de subir une malédiction, d'être la victime d'une implacable fatalitéqui déjà le poussait à cet acte dont le souvenir maintenant l'obsède.

Il souffre qu'il ait été commis mais il nereconnaît pas suffisamment sa culpabilité, sa responsabilité.

Il est à la fois malheureux et de mauvaise foi.

Satragédie intérieure risque d'avoir pour issue le désespoir et le suicide : tel JUDAS après sa trahison.Dans le repentir, la disposition est tout autre.

On sait qu'il est possible de se racheter ou tout au moins on l'espère.L'homme du repentir n'a pas le sentiment de l'irrémédiable, ni l'impression d'une fatalité qui l'accable.

Il assumepleinement la responsabilité de sa faute.

Il s'humilie pour en obtenir le pardon.

Il accepte l'expiation nécessaire, et lasouffrance qu'il éprouve, cessant d'être stérile, devient en lui purificatrice.

MAX SCHELER l'a dit justement : lerepentir a une force régénératrice qui nous fait un coeur nouveau.

Par le repentir le moi se libère, retrouve la dignitéperdue, après la mort de la faute il connaît la résurrection : tel saint PIERRE repentant après son reniement.Ces considérations sont de nature à nous confirmer dans l'idée que les vraies sanctions sont bien celles de laconscience morale.

Pour le Raskolnikov de Crime et Châtiment, il en est bien ainsi.

Le héros de DOSTOÏEVSKI sedécide finalement à se dénoncer à la police et la justice le condamne à quelques années de bagne en Sibérie, mais ilsait que le vrai châtiment est ailleurs, qu'il vient de l'intérieur et que la souffrance morale purificatrice est seulecapable de faire de lui un homme nouveau, une homme heureux, retrouvant cette loi d'amour du prochain qu'il ad'abord transgressée dans son orgueil. Légitimité des sanctions pénales. Les sanctions pénales ou légales ont cependant leur raison d'être.

D'abord parce que tous les hommes ne sont pascapables d'un repentir sincère et profond, ensuite parce que l'ordre social a ses exigences, enfin parce qu'on nepeut s'assurer du dehors des dispositions authentiques de la conscience du coupable.

Une faute qui intéresse la. »

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