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Les différences entre les hommes sont-elles toutes des inégalités ?

Publié le 27/02/2008

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Observant nos congénères, nous constatons qu'ils sont différents de nous; bien vite nous établissons la comparaison en termes de plus et de moins, de supérieur ou d'inférieur ; pour s'opposer à ce penchant, le discours prônant la tolérance affirme avec force que les différences ne sont pas des inégalités. Que peut-on donc penser de ce principe ? Nous examinerons dans un premier temps la façon dont peut s'effectuer le passage du constat de la différence à l'affirmation de l'inégalité ; puis nous verrons que la volonté d'établir concrètement l'égalité passe souvent par une négation des différences ; enfin nous nous interrogerons sur les difficultés et l'ambition du pari du pluralisme.

« Jusqu'où faut-il aller dans ce processus ? Bien des régimes politiques, notamment ceux qui s'inspiraient du marxisme-léninisme, ont voulu imposer d'un seul coup l'égalité parfaite, en abolissant tous les signes extérieurs de différence ;mais le résultat d'une telle « révolution culturelle » n'est plus l'égalité mais l'uniformité.

L'égalitarisme risque donc denuire à la liberté sans renforcer la fraternité. Les difficultés de la justice proportionnelle. Comment peut-on alors établir l'égalité sans abolir les différences ? Il faudrait passer de la justice « arithmétique »(à chacun la même chose, de façon égale) à la justice « géométrique » ou proportionnelle (à chacun selon sonmérite et selon ce qu'il est, selon sa différence propre).

La première établit l'égalité, la seconde vise l'équité.

Laseconde est plus satisfaisante pour l'esprit, mais aussi bien plus difficile à mettre en oeuvre sans aboutir à de gravesinjustices: Platon disait que seuls les dieux sont capables d'une évaluation assez fine pour pratiquer une tellejustice. "De la justice particulière et du juste qui y correspond, unepremière espèce est celle qui intervient dans la distribution deshonneurs, ou des richesses, ou des autres avantages qui serépartissent entre les membres de la communauté politique (cardans ces avantages il est possible que l'un des membres ait unepart ou inégale ou égale à celle d'un autre), et une secondeespèce est celle qui réalise la rectitude dans les transactionsprivées (...).

Cette forme du juste a un caractère spécifiquedifférent de la précédente.

En effet, le juste distributif des bienspossédés en commun s'exerce toujours selon la proportion dontnous avons parlé' (puisque si la distribution s'effectue à partir desrichesses communes, elle se fera suivant la même proportion quia présidé aux apports respectifs des membres de la communauté ;et l'injuste opposé à cette forme du juste est ce qui est dehors dela dite proportion).

Au contraire, le juste dans les transactionsprivées, tout en étant une sorte d'égal, et l'injuste une sorted'inégal, n'est cependant pas l'égal selon la proportion de tout àl'heure, mais selon la proportion arithmétique.

Peu importe, eneffet, que ce soit un homme de bien qui ait dépouillé unmalhonnête homme, ou un malhonnête homme un homme debien, ou encore qu'un adultère ait été commis par un homme debien ou par un malhonnête homme : la loi n'a égard qu'au caractère distinctif du tort causé, et traiteles parties à égalité, se demandant seulement si l'une a commis, et l'autre subi, une injustice, ou sil'une a été l'auteur et l'autre la victime d'un dommage.

Par conséquent, cet injuste dont nous parlons,qui consiste dans une inégalité, le juge s'efforce de l'égaliser : en effet, quand l'un a reçu une blessureet que l'autre est l'auteur de la blessure, ou quand l'un a commis un meurtre et que l'autre a été tué,la passion et l'action ont été divisées en parties inégales ; mais le juge s'efforce, au moyen duchâtiment, d'établir l'égalité, en enlevant le gain obtenu.

" ARISTOTE. Dans ce célèbre passage, Aristote distingue deux formes de justice ou d'égalité : l'égalité géométrique, qui estune proportion, et l'égalité arithmétique.

La première renvoie à la justice, considérée comme ordre social, laseconde à la justice entre individus. POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE La justice, c'est l'égalité.

Soit, mais l'égalité elle-même peut se comprendre de deux manières.

L'égalitéarithmétique est l'égalité entre deux termes.

L'égalité géométrique est l'égalité entre deux rapports.

L'image dugâteau peut aider à comprendre cette distinction.

Deux parts de gâteau peuvent être égales, d'une égalitéarithmétique.

Mais on peut aussi considérer que l'égalité est réalisée si les parts distribuées sontproportionnelles au mérite (ou au poids...) de ceux entre lesquels il doit être partagé.

L'égalité ici sera ditegéométrique.Aristote considère que, dans le cas de la justice distributive, c'est-à-dire de l'égalité géométrique, il est normalde donner plus à ceux qui contribuent le plus, par leur mérite, par leurs fonctions ou par leurs biens, au bonfonctionnement de la société.

Mais cela peut être discuté.Dans le cas de la justice corrective, c'est-à-dire de la justice qui réalise l'égalité arithmétique, on ne tient pascompte des apports des individus à la société ni de leur mérite.

Ils sont considérés comme des individusabstraits.

Aristote appelle cette forme de justice « corrective » parce qu'elle rétablit un équilibre, plus qu'ellen'établit un ordre.

Qu'il soit, par ailleurs, riche ou pauvre, bon père de famille ou dévoyé, celui qui cause un tortà autrui doit le réparer.

Cela aussi peut être discuté.Soit qu'on tienne compte du mérite, ou de tout autre facteur, soit qu'on n'en tienne pas compte, dans les deuxcas il semble bien que la justice ne soit jamais tout à fait réalisée.Le mérite de ce texte d'Aristote est de montrer, en tous cas, que la question de la justice et de l'égalité estune question complexe qui doit être débattue.. »

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