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LE TEMPS selon DURKHEIM ?

Publié le 09/06/2009

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temps

« Qu'on essaie de se représenter ce que serait la notion de temps abstraction faite des procédés par lesquels nous le divisons, le mesurons, l'exprimons au moyen de signes objectifs ; un temps qui ne serait pas une succession d'années, de mois, de semaines, de jours, d'heures, de minutes ! Ce serait quelque chose d'impensable. Nous ne pouvons concevoir le temps qu'à condition d'y distinguer des moments différents. Or, quelle est l'origine de cette différentiation ? Sans doute les états de conscience que nous avons déjà éprouvés peuvent se reproduire en nous, dans l'ordre même où ils se sont primitivement déroulés ; et ainsi des portions de notre passé nous redeviennent présentes, tout en se distinguant spontanément du présent. Mais, si importante que soit cette distinction pour notre expérience privée, il s'en faut qu'elle suffise à constituer la notion ou catégorie de temps. Celle-ci ne consiste pas simplement dans une commémoration, partielle ou même intégrale, de notre vie écoulée. C'est un cadre abstrait et impersonnel qui enveloppe non seulement notre existence individuelle, mais celle de l'humanité... Ce n'est pas mon temps qui est ainsi organisé, c'est le temps tel qu'il est objectivement pensé par tous les hommes d'une même civilisation. Cela seul suffit déjà à faire entrevoir qu'une telle organisation doit être collective. « DURKHEIM.      Introduction    Tout homme parle du temps, et pense savoir très bien ce qu'il entend par là. Mais, si on le presse de dire ce qu'est le temps, il n'y voit qu'un cadre indéfini qu'il désignera par ce qu'il y met, ce que tout le monde y met : le temps, ce sont les jours, les mois, les années qui passent et qui s'en vont sans revenir... DURKHEIM est frappé par la nature collective de la notion du temps. Et à ce propos, il écrit : « Qu'on essaie de se représenter... «  Comment faut-il entendre ce texte et la notion du temps qu'il propose ? et que faut-il en penser ?    I. Exposé de la pensée de DURKHEIM    1°) Idée essentielle de ce passage    Ce texte nous présente un exemple parmi d'autres de la théorie sociologique de DURKHEIM. Celui-ci veut par là nous faire saisir, par une analyse d'expérience, que le temps est une catégorie de nature collective.  Place de cette idée dans son contexte  C'est dans une introduction à une étude du problème de la connaissance qu'il s'exprime ainsi sur le temps. La thèse qu'il énonce et dont celle-ci n'est qu'un exemple, c'est que les catégories les plus communes comme celle-là semblent historiquement d'origine religieuse ; et « participent de la nature commune à tous les faits religieux : elles doivent être elles-mêmes des choses sociales, des produits de la conscience collective. «  On retrouve donc ici la grande idée de Durkheim et de l'école sociologique : la conscience collective est l'explication totale de tous les faits qui se présentent dans la conscience individuelle.

temps

« véritable temps.

DURKHEIM reconnaît bien le fait.

On ne peut nier en effet que nous distinguions spontanément ennotre conscience un « passé », qui revient en nous, du présent dans lequel nous le revivons.

Si je pense au mal dedents que j'avais hier, je ne le confonds pas avec le souvenir que je m'en fais aujourd'hui : je sais que je n'ai pasmal aux dents aujourd'hui.

Mais précisément, soutient-il, si je ne fais pas de confusion, c'est parce que je suis aidépar les divisions du temps que me fournit la société : « hier » et « aujourd'hui ».Relevons pour conclure cet exposé que l'auteur est très soucieux de ne rien avancer que ne prouve l'expérience.

Lerésumé de la présente thèse comme d'ailleurs de toute la doctrine sociologique pourrait être : l'expérience bienanalysée montre toujours les racines sociales de tout fait individuel. II.

Critique de cette pensée 1°) Concessions On ne voit pas comment on pourrait contester la dimension sociale de la notion de temps.

L'homme ne sort pas desa condition sociale et le « temps » fait vraiment partie intégrale de la vie en société.

Il n'est pas d'activité humainequi ne soit pensée et vécue dans le cadre collectif du temps, avec ses divisions auxquelles se réfèrent tous leshommes et qui constituent le « calendrier ».D'autre part, non seulement les événements que nous vivons collectivement mais même ceux que nous vivonspersonnellement le sont dans le cadre collectif du temps avec ses divisions telles que les hommes, avec lesquelsnous sommes, les pensent.

Il est certain qu'il ne nous vient pas à l'esprit d'accaparer le temps, de parler de « notre» temps ni à plus forte raison de « mon » temps.

Dans l'organisation de notre existence, même en ce qui regarde cequ'il y a de plus caché aux autres hommes, nous pensons tout, nous prévoyons tout, nous nous souvenons de touten le référant à ce temps que nous regardons strictement comme « le » temps, On doit donc admettre avecDURKHEIM que le temps psychologique est marqué par le cadre social. 2°) Réserves Tout d'abord, ne pourrait-on opposer à l'argument négatif de DURKHEIM celui qu'utilisait ARISTOTE, expliquant lacatégorie du temps à laquelle se réfère notre auteur, à l'opposé de l'interprétation de celui-ci.

Le philosophe grecdisait : « Sans l'âme (c'est-à-dire pratiquement sans ce que nous appelons aujourd'hui la consciencepsychologique), le temps n'existerait pas, car seule l'âme, et, dans l'âme, l'intelligence est par nature capable decompter ».

En effet, pour parler d'avant et d'après il faut se souvenir de ce qui a été et projeter analogiquement cepassé vers l'avenir.

L'expérience du temps c'est l'expérience psychologique du devenir ou « durée » que BERGSON asi bien analysée : celle d'un objet de conscience qui, au moment même où il est saisi dans la connaissance que nousen prenons, tend à disparaître de cette même connaissance pour faire place à un autre objet.

S'il n'y avait pascette expérience première, nous ignorerions le devenir temporel.

L'analyse de cette expérience montre que le tempsn'est pas un « cadre » tout fait, mais d'abord un état de conscience qui dure.

Il est vrai que nous faisonsabstraction de cette durée par rapport à ce qui dure, et c'est avec cette durée abstraite que notre intelligence, enlui donnant un caractère objectif, construit le temps.Comme l'ensemble des hommes fait cette même expérience incessante de la durée et procède invinciblement à lamême abstraction, suivie de la même objectivation, il est aisé de comprendre qu'une mentalité collective se crée etqu'ainsi tout le monde s'accorde à voir dans « le » temps une réalité objective, une sorte de cadre dans lequelviendrait s'insérer l'événement.Ainsi on retrouve l'aspect collectif du temps, que nous avons reconnu avec DURKHEIM.

Mais il cesse d'êtrel'explication du temps psychologique, pour être au contraire expliqué par lui.D'autre part, il y a un autre aspect du temps : c'est le devenir même des êtres de la nature.

Si l'homme est undevenir et, tandis qu'il en prend conscience, prend conscience du « temps », selon le procédé que nous venons dedécrire, il peut analogiquement, mais, cette fois, dans une toute autre expérience, abstraire le devenir des choseset construire mentalement un cadre avec ce devenir.

C'est le temps objectif ou « physique » que déjà ARISTOTEdéfinissait comme étant « la mesure du mouvement » des êtres de la nature.

L'homme a pu observer qu'il y a desmouvements réguliers dans la nature.

Dès lors, il a convenu de prendre ces mouvements réguliers comme mesuredes autres devenirs, y compris celui de ses propres expériences psychologiques.

Ce temps, mesure du mouvementdiurne, est devenu le temps usuel des hommes.

Et l'abstraction qu'ils en font est ce cadre objectif, impersonnel etcollectif dont parle DURKHEIM.Là encore, s'il faut reconnaître la nature collective de ce « temps physique », on ne saurait voir dans ce caractèrecollectif une donnée première qui explique la réalité connue.

C'est du mouvement régulier qui s'est imposé à laconscience des hommes qu'est né le temps comme concept collectif, et non le contraire. Conclusion Rendons à DURKHEIM cette justice : avec toute l'école sociologique, il a attiré l'attention sur le caractère social dela réalité psychologique qu'est le temps.

C'est l'humanité qui a élaboré sa notion du temps et en ce sens cettenotion est vraiment, comme il l'affirme, une notion collective.

Mais, par contre, ne craignons pas d'affirmer que cen'est pas une notion essentiellement de « nature » collective.

Sans aller jusqu'à la définition du temps par KANT quidisait : « le temps n'est autre chose que la forme du sens interne c'est-à-dire l'intuition de nous-mêmes et de notreétat intérieur », reconnaissons avec BERGSON que la « durée » est « l'étoffe des choses », y compris celle de notreexpérience intérieure, et que le temps est cette durée abstraite que l'homme vivant en société a objectivée etorganisée.. »

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