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Le savant complet est celui qui embrasse à la fois la théorie et la pratique expérimentale

Publié le 27/02/2008

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Le savant complet est celui qui embrasse à la fois la théorie et la pratique expérimentale. 1° il constate un fait ; 2° à propos de ce fait, une idée naît dans son esprit ; 3° en vue de cette idée, il raisonne, institue une expérience, en imagine et en réalise les conditions matérielles. 4° de cette expérience résultent de nouveaux phénomènes qu'il faut observer, et ainsi de suite. L'esprit du savant se trouve en quelque sorte toujours placé entre deux observations : l'une qui sert de point de départ au raisonnement, et l'autre qui lui sert de conclusion. Pour être plus clair, je me suis efforcé de séparer les diverses opérations du raisonnement expérimental. Mais quand tout cela se passe à la fois dans la tête d' un savant qui se livre à l'investigation dans une science aussi confuse que l'est encore la médecine, alors il y a un enchevêtrement tel, entre ce qui résulte de l'observation et ce qui appartient à l'expérience, qu'il serait impossible et d'ailleurs inutile de vouloir analyser dans leur mélange inextricable chacun de ces termes. Il suffira de retenir en principe que l'idée a priori ou mieux l'hypothèse est le stimulus de l'expérience, et qu'on doit s'y laisser aller librement, pourvu qu'on observe les résultats de l'expérience d'une manière rigoureuse et complète. Si l'hypothèse ne se vérifie pas et disparaît, les faits qu'elle aura servi à trouver resteront néanmoins acquis comme des matériaux inébranlables de la science. L'observateur et l'expérimentateur répondraient donc à des phases différentes de la recherche expérimentale. L'observateur ne raisonne plus, il constate ; l'expérimentateur, au contraire, raisonne et se fonde sur les faits acquis pour en imaginer et en provoquer rationnellement d'autres. Mais, si l'on peut, dans la théorie et d'une manière abstraite, distinguer l'observateur de l'expérimentateur, il semble impossible dans la pratique de les séparer, puisque nous voyons que nécessairement le même investigateur est alternativement observateur et expérimentateur. On voit donc que tous les termes de la méthode expérimentale sont solidaires les uns des autres. Les faits sont les matériaux nécessaires ; mais c'est leur mise en oeuvre par le raisonnement expérimental, c'est-à-dire la théorie, qui constitue et édifie véritablement la science. L'idée formulée par les faits représente la science. L'hypothèse expérimentale n'est que l'idée scientifique, préconçue ou anticipée. La théorie n'est que l'idée scientifique contrôlée par l'expérience. Le raisonnement ne sert qu'à donner une forme à nos idées, de sorte que tout se ramène primitivement et finalement à une idée. C'est l'idée qui constitue, ainsi que nous allons le voir, le point de départ ou le primum movens de tout raisonnement scientifique, et c'est elle qui en est également le but dans l'aspiration de l'esprit vers l'inconnu. Claude BERNARD

Ce texte extrait de L'introduction à la médecine expérimentale (1865) du médecin Claude Bernard, tente de décrire la démarche scientifique, sa méthode, au sein de la médecine expérimentale. Contre le dogmatisme, Bernard propose une science qui avance en dialoguant avec une expérience qui nécessite d'être complète vue la complexité des phénomènes physiologiques.

Ainsi Bernard s'attarde dans un premier temps (« Le savant (...) chacun de ces termes «), d'une part sur la présentation théorique de la méthodologie scientifique autours de laquelle doit s'articuler l'activité scientifique, et d'autre part sur sa présentation concrète au sein de l'esprit du savant. Ensuite (« Il suffira de retenir (...) et expérimentateur «), il s'agit pour Bernard d'expliquer plus précisément comment s'exécute le travail scientifique, la mise en oeuvre d'une hypothèse à partir du donné empirique qui reste le point d'encrage fondamental de la médecine à la réalité garant de sa réussite prédictive. Il s'agira de différencier la démarche active de l'expérimentateur avec celle, passive, de l'observateur. Enfin (« On voit donc (...) fin du texte «), il s'agira de caractériser ce qu'est qu'on appelle une théorie scientifique, la place qu'elle prend dans l'activité scientifique, et comment elle se structure à partir de cette donne primordiale qu'est l'expérience.

 

« d'une étude approfondie du phénomène, soit le fait d'isoler les facteurs qui rentrent en jeu dans la sensibilité ou lanon sensibilité de la racine antérieure.

Il faut isolée les conditions actives dans le phénomènes, et pour cela, on doitdéjà s'appliquer à une observation puissante et approfondie du phénomène. Mais il ne faut pas pour autant en rester au constat: l'observation appelle l'expérimentation.

Une fois l'accueil du faiteffectuer, il faut s'en faire une idée, donner un sens à ce qui n'est alors qu'un constat.

Je constate par exemplel'apparition de deux phénomènes de manière contiguë dans le temps, j'en tire alors une idée: il y a rapport decausalité entre les deux phénomènes.

Mais je dois contrôler cela, et ne pas simplement m'en tenir à une observationqui va dans le sens de cette idée sans chercher de faits contradictoires.

En effet, pour Bernard, la preuve ne suffitpas à l'acquisition d'une certitude scientifique: il faut ce que Bernard appelle une contre-expérience , soit l'activité qui consiste, pour asseoir solidement son idée, à chercher à détruire ses propres conclusions par des expériencesallant dans le sens inverse de ces conclusions. Ainsi, la seule preuve qu'un phénomène joue un rôle de cause par rapport à un autre, c'est de supprimer le premierpour voir si le second en fait autant.

Après s'être concentré sur le recueil des données physiologiques, il faut yprendre part, devenir actif en interprétant le phénomène, en effectuant une hypothèse explicatrice qui mènera à denouvelles expériences.

Le scientifique doit donc être alternativement observateur des données puis expérimentateurde ses hypothèses pou en observer à nouveau les résultats et ré-effectuer des observations...

etc.

C'est ce cyclequi représente l'activité scientifique. La théorie scientifique III. On peut donc découvrir deux apports dans l'activité scientifique.

Il y a d'abord cet apport matériel, nous l'avons vu,qu'est l'expérience, et qui évite un raisonnement qui fonctionnerait pour ainsi dire à vide, sans contenu.

Et face àcette matière, nous avons la forme, cet apport de l'esprit humain qu'est le raisonnement, soit la manière d'agencerlogiquement, d'interpréter de manière cohérente l'apport empirique.

Le raisonnement ne peut donc êtrequ'expérimental au risque sinon d'être une forme sans matière, sans fond.

L'esprit doit se nourrir de ce qui vient dudehors pour prendre sa première impulsion. Cependant, la science trouve son noyau, son essence dans ce raisonnement à partir des faits que sont les théories,soit cette reformulation logique des faits.

Face aux faits, nous avons d'abord une idée, une ébauche de ce quiconstituera une théorie complète par la suite, soit une expression discursive rendant compte de la totalité du faitlui-même.

Mais cette idée première n'est qu'une conséquence des faits, une ré-action à partir de la phaseobservationnelle, et à partir de laquelle l'esprit prend son élan afin de former une hypothèse explicatrice.

Mais toutpart de cette retranscription des faits dans l'espace psychique humain, la façon dont le scientifique accueille ledonné pour le modeler dans le cadre d'une hypothèse. Or le raisonnement agit sur cette retranscription psychique des faits, sur cette idée expérimentale.

Et l'on peut dire que le mouvement est double.

A partir de cas particuliers retranscris en idées, on tire inductivement une proposition générale (une idée générale).

Puis, déductivement , en allant du général au particulier, on tente de vérifier cet énoncé général par des faits particuliers, cette idée globale par des idées expérimentales. Conclusion La science ne naît que de ce dialogue entre expérience et théorie, soit un raisonnement formelle qui agencent cesidées qui retranscrivent dans l'esprit les données empiriques.

A peine observe-t-on donc, en intégrantpsychiquement une scène, que déjà on lui donne un sens, on table sur une explication, sur des liens qui existe enelle.

L'observation est presqu'aussi tôt expérimentation puisque la saisie du réel par l'esprit ne tarde jamais à de faireactive, en tentant déjà de dénouer les liens secrets autours du noeud expérimental.

A peine l'esprit observe-t-il laréalité, qu'il y voit déjà un défi, qu'il s'applique déjà à lui donner sens.. »

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