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Le mythe peut-il sauver l'humanité ?

Publié le 15/04/2009

Extrait du document

  • Analyse du sujet

-          Le sujet se compose de trois termes : mythe, sauver, humanité. On y trouve également l’expression « peut «.

-          Mythe : du grec muthein : raconter, parler. Le mythe est un récit fabuleux où des forces impersonnelles sont représentées sous des formes personnelles dont les actions ont un sens symbolique. Discours narratif utilisant des images, exprimant les sentiments d’une collectivité et entraînant l’action. à distinguer du logos, discours rationnel, vérifiable et argumentatif. Le mythe a pour vocation de présenter, sous forme métaphorique, les origines de l’humanité, la place de celle-ci dans le monde qui l’entoure et les valeurs qui doivent alors être les siennes. Le mythe renvoie alors à l’idée d’un sacré. Le mythe exprime alors pour l’homme une manière de vivre et donne un sens à l’existence humaine. Le mythe se distingue également de l’histoire, cette dernière ayant pour vocation une enquête sur les causes réelles des évènements humains et vise, en ce sens, à la vérité des faits.

-          L’humanité : l’ensemble des hommes pour autant qu’ils sont dotés d’une conscience et participent à une histoire qu’ils produisent en partie par la liberté qu’ils possèdent.

-          Sauver l’humanité : cela suppose que l’humanité est en danger. Celui-ci peut concerner son essence (le risque : l’inhumanité) ou son existence (le risque : la mort).

 

 

 

  • Problématique

Dans un premier temps, il paraît aller de soi que le mythe ne peut sauver l’humanité (au sens de son existence : échapper à la mort ; et de son essence : échapper à l’inhumanité) car, bien au contraire, c’est en développant le récit historique et le discours argumentatif, que l’homme peut acquérir une vérité vérifiable sur lui-même et sur le monde. Or seul un tel discours, un savoir, peut donner à l’homme la maîtrise qui lui donne les moyens de développer sa liberté à travers la technique. En outre, du point de vue de son essence, le mythe est instrument de pouvoir sur l’homme, il s’adresse à sa partie irrationnelle (l’imagination, les passions), et nie donc la nature de l’homme : sa raison (logos). Cependant, le mythe est porteur de valeurs, il présente une vision du monde et une délimitation du sacré et du profane. A tel point que la technique et la raison peuvent apparaître comme des mythes modernes. Le mythe serait alors une condition de l’humanisation de l’homme, dans sa dimension politique et rationnelle, comme propédeutique. En outre, il permettrait d’échapper au danger du pouvoir autodestructeur de l’homme. La question soulevée est donc de savoir si c’est le mythe qui peut sauver l’humanité, ou bien s’il est porteur de dangers que la rationalité doit éliminer.

« II- La nécessité du mythe comme propédeutique et soin de l'âme humaine. - Alors certes, comme le remarquait déjà Platon, le mythe s'adresse à une partie irrationnelle de l'âme. Mais c'est justement pour cela qu'il est une nécessité.

Il faut ainsi compléter l'argumentation contraignanteen persuadant par des mythes incantatoires.

En effet, comme le souligne le Timée 70d , la partie appétitive de l'âme est une bête sauvage.

Elle est située entre le diaphragme et la frontière du nombril, au plus loin dela raison, pour qu'elle ne soit pas perturbée par les désordres de l'irrationnel.

Devant la partie appétitive setrouve le foie, écran sur lequel la divinité, après avoir entravé l'exercice normal de la raison, fait apparaîtredes images destinées à effrayer ou apaiser ce qui résiste le plus à la raison.

L'incantation et la fascinationont pour but de guérir l'âme humaine de cette maladie qu'est la déraison.

L'incantation produite par le mythea donc pour tâche de ramener la partie de l'âme humaine sous le contrôle de la raison.

Ainsi le mythe duPhédon (108d114c), mythe eschatologique de la fin, est-il justifié par Socrate par le fait qu'il veut se délivrer de la crainte de la mort.

Que l'âme soit immortelle, est « convenable et digne d'être risqué par celui quiestime qu'il en est ainsi.

Car ce risque est avantageux.

Et il faut qu'on se raconte des choses de ce genre,comme si on se faisait à soi-même des incantations.

C'est pourquoi, quant à moi, je prolonge ce mythedepuis longtemps ».

L'incantation permet d'apaiser la crainte.

Le mythe à une fonction curative qui est cellede l'incantation. - Le mythe a donc une vertu curative.

Dans le Charmide (156d-157c) Socrate rapporte les paroles d'un médecin thrace affirmant qu'il faut soigner le tout avant la partie, la tête avant les yeux, et l'âme avant lecorps.

On la soigne avec des incantations, qui sont les « discours qui sont avantageux », qui « font naîtredans les âmes la sagesse ( sphrosunê ), dont la naissance et la présence font qu'il est dorénavant facile de procurer la santé à la tête et au reste du corps.

Il ne faut avoir la santé indépendamment de la sagesse.Socrate ne donnera donc pas de remède pour le mal de tête de Charmide sans incantation préalable pourl'âme. - Le mythe, dans la fonction qui le lie à la partie appétitive de l'homme joue donc un rôle fondamental car il peut soigner l'âme, la guérir de ses craintes, l'apaiser, et constituer ainsi une propédeutique pour un savoirqui exige l'exercice de la raison.

C'est pourquoi le mythe s'adresse avant tout aux enfants, encore dominéspar cette partie irrationnelle.

Il est donc une condition de la réalisation de l'humanité de l'homme.

S'il ne peutpas alors, à lui seul, sauver l'humanité, il est bien une condition propédeutique et curative du salut del'humanité. III- Le mythe, comme support et production de l'imaginaire, est la condition d'un futur de l'humanité et d'établissement de valeurs transcendantes. - On peut alors redonner toute la place qu'il convient à l'imaginaire.

Là où la raison est muette, le mythe doit venir jouer le rôle de guide.

En ce sens, le rôle de l'imaginaire pour l'humanité est tout à fait fondamentalcar il permet l'invention et la vision d'un futur qui n'est pas connu ou pas connaissable.

Comme le souligneMarx, « Toute mythologie maîtrise, domine les forces de la nature dans le domaine de l'imagination et parl'imagination et leur donne forme : elle disparaît donc quand ces forces sont dominées réellement »(Contribution à la critique de le l'économie politique ).

Cela suppose alors que c'est dans la mythologie que l'homme peut trouver ce sur quoi exercer sa pensée.

Ainsi, le mythe d'Icare ne représente-t-il pas un rêve,et donc un désir, pour l'humanité ? Et même si en ce sens le mythe renvoie à une enfance de l'humanité,alors le retour au mythe n'est que le retour à sa propre enfance et à sa vitalité.

Le mythe est alors ce quisuscite le désir par l'imagination. - Mais en outre, le mythe rend possible la position d'une transcendance de l'humanité.

La religion et la mythologie restent présentes même pour l'homme sans religion, car elles rendent « l'existence « ouverte » àdes valeurs qui ne sont plus contingentes ni particulières, permettant ainsi à l'homme de dépasser lessituations personnelles et, en fin de compte, d'accéder au monde de l'esprit » (Eliade Le Sacré et le profane ).

En organisant la distinction sacré / profane, le mythe détrône une raison instrumentale dépourvue de finalités, une raison techniquement puissante, mais incapable de se donner les limites de son application.En ce sens, le mythe reste nécessaire pour fixer les bornes d'un développement technique qui se révèlen'être qu'un autre mythe, dangereux celui-là pour l'humanité, celui d'un homme maître du monde. Conclusion On peut donc dire que le mythe peut sauver l'humanité dans son existence, au premier sens où le mythedoit pouvoir limiter la puissance d'une raison instrumentale aveugle, et donc destructrice de l'homme par ledéveloppement technique.

Et en un second sens, il intervient comme propédeutique au développement d'uneraison humaine finalisée par des valeurs transcendantes, donnée dans un imaginaire qui suscite le désir.

En cesecond sens, le mythe sauve l'humanité de l'inhumanité (négation de l'essence de l'homme) définie commeabsence de valeurs et de désirs.

Dès lors, on peut considérer le mythe comme l'instrument de l'humanisation del'homme qui se réalise dans une rationalité mesurée par un sacré, que définit le mythe.. »

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