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Le langage premunit-il contre la violence ?

Publié le 27/02/2008

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Le langage est une fonction d’expression et de communication liée à la pensée, spécifiquement humaine. Le fait de parler ne se réduit pas aux dispositifs neurobiologique et organique : « L’invention de l’art de communiquer nos idées dépend moins des organes qui nous servent à cette communication que d’une faculté propre à l’homme [la pensée], qui lui fait employer ses organes à cet usage « (Rousseau, début d’Essai sur l’origine des langues). La pensée a donc besoin d’un intermédiaire, le langage, pour être communiquée, extériorisée. Toutefois, le langage extériorisé caractérise plus la parole, car on peut parler d’un langage intérieur, qui ne se laisse pas forcément percevoir par autrui. Aussi au sens le plus large, le langage est un système de signes servant de moyen de communication : on peut évoquer ainsi le langage des gestes, du corps, en ce sens que tous les organes des sens peuvent servir à créer un langage. Mais communiquer, c’est toujours en quelque sorte imposer son être, affirmer ses idées, et pouvoir ainsi orienter ou déstabiliser son interlocuteur. Comment comprendre, dès lors, cette fonction inhérente au langage qui a pour fins de dominer autrui ? 

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« Comment ne pas voir que dans le jeu des forces, la parole peut elle-même se révéler une force ? Hegel disait bien que, dans l'histoire, on a vu des paroles se révéler redoutablement efficaces,au moins autant que certains actes.

Mais Machiavel l'avait déjà comprislorsqu'il conseillait au prince, entre la violence et la ruse.

de ne jamaisrenoncer complètement à aucune des deux: et le langage est bien enpolitique l'instrument de la ruse.

A la fois lion et renard, le prince doit savoirpersuader aussi bien que contraindre par la force.

Mais.

dans ce cas, lapersuasion n'est-elle pas tout à fait une contrainte, et le langage une force ? C'est encore la politique qui donne à voir le plus clairement le risque majeurque court le langage : n'être qu'un instrument de pouvoir, n'être qu'une forceet, donc, n'être que violence.

C'est à partir de la politique qu'il faut analyserl'une des tentatives de perversion les plus étonnantes dont ait été victime lelangage : la sophistique.

Comprenant que la démocratie donne le pouvoir àcelui qui, dans l'assemblée, sait persuader, les sophistes faisaient professiondes techniques de la persuasion.

Dans Gorgias, Platon fait parler l'un de cesprofesseurs de rhétorique; le sophiste ne fait aucun usage du langage en vuedu vrai, qu'il tient d'ailleurs dans un solide mépris.

Son but est ailleurs : capter- autant dire capturer - l'assentiment de l'interlocuteur, même et surtout si lathèse défendue est fausse.

Gorgias se fait fort de dissuader un malade deprendre un médicament prescrit par le médecin ! Il ne s'agit plus d'avoir raisoncontre un interlocuteur, mais d'avoir raison de lui; le sophiste ne veut pas convaincre, mais vaincre.

Un tel usage du langage traite les mots comme des armes, dont il faut seulementapprendre le maniement ; le dialogue fait place à un combat oratoire où la stratégie s'appelle rhétorique. La perversion sophistique du langage montre donc que ce dernier ne constitue pas par lui-même un rempart contrela violence.

S'il est dialogue, le recours au langage est bien la seule issue lorsqu'on a, de part et d'autre, renoncé àla violence.

Mais le langage ne donne pas nécessairement lieu au dialogue ; peut-être même cette possibilité n'est-elle qu'exceptionnelle et requiert-elle une volonté lucide de s'engager dans une voie différente, où le succès n'estpas assuré.On peut à bon droit parler d'un usage violent du langage lorsque ce dernier est réduit à l'état d'instrument pour letriomphe d'une force ; lorsqu'il ne fonctionne plus lui-même que comme une force jetée, en raison de son efficacitéspécifique (dont les politiques sont assez conscients), contre d'autres forces.

On a cité l'exemple de la politique,mais il y en aurait bien d'autres.

Alain avait soigneusement recensé, sous le nom de bourgeois, tous ces hommes qui« vivent de persuader » : le notaire, le médecin, l'enfant:, l'homme politique n'est pas le seul à connaître le pouvoirdes signes et à l'utiliser.. »

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