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Le désir nous éloigne-t-il de la réalité ?

Publié le 27/02/2008

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L?homme ne surpasse-t-il pas l?animalité par son élan vers ce qui n?est pas encore, alors que la bête « vit attachée au piquet de l?instant », c?est-à-dire enchaînée au donné et au réel univoque ?   I.                   Le désir, débordement de la réalité vers le possible et l?imaginaire   Le désir excède la réalité. Comment pourrait-il en être autrement ? Dès lors que ce que l?on désir nous manque, l?objet n?est donc pas encore partie de notre réalité. Le désir portant sur ce que l?on possède déjà se nomme satisfaction et non plus manque, il n?est donc plus désir.   Par définition, le désir est tension vers ce qui est absent : il est, comme le dit Sartre, un « manque d?être » (L?Etre et le néant, II, chap. 1, §3). D?une certaine façon, le désir irréalise l?être et est une fonction du néant : il est « la transcendance même », càd qu?il est « par nature échappement à soi vers l?objet désiré » (L?Etre et le néant, II, chap. 1, §3).

« trouvons bonne, mais, au contraire, nous jugeons qu'une chose est bonne parce que nous la désirons »(Ethique, III).

Le désir construit son objet : il est à son principe même rival d'une connaissance désintéressée de la réalité, d'un savoir dégagé de toute affectivité .

Il peut même générer à lui seul tout un univers illusoire, que le sujet va préférer au réel : par exemple, lorsqu'il se porte durablement sur un amourimpossible, il se vide de toute interaction humaine, de toute inscription palpable dans la réalité.

Il se meut alorsdans un monde fantôme, inconsistant, et fait que la conscience n'agite que des fleurs embaumées (donc mortes ) au lieu de se porter vers des intérêts vivants.

Le désir, alors, devient pathologiquement « désir du désir », ou paroxysme de la déréalisation de la vie par le désir. On ne désire ainsi intensément que par manque de connaissance sur ce qu'est réellement ce qu'on désire : « Nous ne désirerions guère de choses avec ardeur, si nous connaissions parfaitement ce que nous désirons »,François de la Rochefoucauld, Maximes .

Le désir aveugle, c'est un véritable voile jeté sur la réalité.

La passion dont le désir entretient le feu nous éloigne parfois dangereusement du réel, car elle est distorsion permanente de la réalité, pour flatter son désir .

Elle retrouve partout l'objet de son désir (Swann voyant Odette en toutes les femmes).

Le désir donne ainsi lieu à une distorsion de croyances, car on ne croit souvent que ce que l'on désire , et non ce qui est, si décevant soit-il (ce sont alors les stratégies psychologiques de self-deception ou de duperie de soi).

L'élément affectif de la conscience se substitue donc à l'élément cognitif de l'intellect pour évaluer le réel. On peut donc dire que le désir a horreur de la réalité . Il assujettit tout fait rencontré à son espoir de satisfaction, ne craignant rien plus que la déception,d'où ce recours massif et presque exclusif à l'imagination et cette fuite de la confrontation avec le réel. c. Il faut donc « changer [ses] désirs, plutôt que l'ordre du monde » et « tâcher toujours plutôt à [se] vaincreque la fortune » (Descartes, Discours de la méthode , 3e partie).

Face à l'inflation parallèle du désir et des imaginations qu'il se forge pour éviter la déception, il est clair qu'il vaut mieux réformer son désir, plutôt quevouloir changer une réalité toujours déceptive car imprévisible.

Il y a une tradition de conflit pérenne entrel'impulsion individuelle d'un côté et le cours indifférent de la nature de l'autre.

La recherche intérieure ne doitpas s'obstiner contre un ordre extérieur, généralement divinisé.

D'où une morale de soumission à la nécessité , sous les formes très diverses d'une « compréhension de la nécessité » chez Spinoza, ou du principe de réalité chez Freud, principe semi conscient d'ajournement de la satisfaction.

Ou même une morale de la suppression du désir : « A propos de chaque désir, il faut se poser cette question : quel avantage en résultera-t-il si je ne le satisfais pas ? », Maximes .

Et de même, Epictète, conscient de l'insatiabilité du désir, pour lequel le réel n'est jamais qu'un prétexte dont il a d'ailleurs tôt fait de s'éloigner , déclare : « Ce n'est pas par la satisfaction du désir que s'obtient la liberté, mais par la destruction du désir »(Entretiens ). d. Transition : Le désir ne fait donc pas la preuve de l'objet du désir, ni a fortiori de son caractère désirable.

Il est indifférent à l'objectivité.

Cela pose donc le désir comme un élément du tragique humain : sans cesse régénéré par le manque, s'appliquant à des objets toujours nouveaux, le désir est nourri par l'imagination,qui est cependant incapable de le rassasier et donc de le faire disparaître.

Il convient cependant de distinguer désir et passion , car tout désir n'est pas passionnel. II.

Mais le désir est le seul moyen de nous insérer dans la réalité, en nous poussant à l'action => il est promesse de réalisation Le désir nous situe dans la réalité, il est notre seule perspective pour agir sur elle .

Un homme sans désir ne peut pas même se rapporter à la réalité , c'est-à-dire qu'il ne peut rien faire .

Selon Nietzsche, tout raisonnement rationnel exprime une disposition physiologique individuelle, et est donc une expression personnelle de ses passions.

De même le désir est une interprétation de la réalité .

Dans chaque interprétation que l'on donne de la réalité (et la Volonté de Puissance n'est autre qu'une interprétation de laréalité par un être donné), on rend certes un hommage à ses désirs, mais on ne peut faire autrement : l'objectivité est un vieux rêve positiviste.

« Il n'y a pas de fait, il n'y a que des interprétations » écrit Nietzschedans Ecce homo .

C'est ici le postulat d'extériorité du désir qui est contestable : pourquoi le sujet aurait-il moins de réalité que ce qui lui est extérieur ? La question de l'intitulé se fonde ainsi sur le présupposé que le désir, intériorité néanmoins appelée à s'extérioriser (càd à exprimer sa Volonté depuissance), est coupé de la réalité , et n'est pas réel .

Et cela, alors que le désir est pour l'homme un transcendantal : il est notre rapport au monde, et tout rapport humain prendra la forme –même déguisée et masquée sous une morale austère- d'un désir de domination ou de conservation.

Le désir est donc un ancrage nécessaire pour agir sur la réalité. a. Et même, l'homme ne connaît jamais que son désir, qui est son point de vue indéracinable sur le réel .

Chacun, en désirant, interprète le monde en ce qu'il cherche à s'assimiler l'objet de son désir, et donc à le fairesien : il cherche un monde à son image, et à combler l'écart entre objectif et subjectif.

Tout homme tente donc de façonner la réalité à son image (cf.

les phénomènes de conduite du récit en psychanalyse).

Maiscela ne veut pas dire que toutes les interprétations se valent : Nietzsche n'est pas égalitariste en la matière,et certaines interprétations sont meilleures que d'autres et plus nobles, aristocratiques , ce qui veut dire que certains désirs ont malgré tout plus de valeur que d'autres. l'interprétation chrétienne du monde est elle empreinte de ressentiment envers les forts, et la morale dans laquelle elle s'est exprimée ressortit àune vengeance immémoriale envers les forts, qui menaçaient les faibles de la destruction ( Le Crépuscule des idoles ).

Le désir est notre seule fenêtre sur la réalité.

Il est l'expression de nos valeurs , réactives ou affirmatives. b. c.. »

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