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Le conflit est-il au fondement de tout rapport avec autrui ?

Publié le 26/07/2009

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Le conflit est-il au fondement de tout rapport avec autrui ?


  • HEGEL : les rapports avec autrui sont toujours conflictuelles : rapport de jalousie, de lutte, de haine. Pour Hegel, le fait premier est le conflit des consciences. Chacun de nous cherche à se faire connaître par les autres. La conscience de soi ne s’exprime qu’en s’opposant aux autres consciences. Vivre, c’est lutter ; vivre, c’est s’opposer. Les rapports sont toujours de domination à servitude. Le moi ne reconnaît l’autre que pour l’asservir. On ne reconnaît l’autre qu’en tant qu’esclave : déshumaniser.

  • SARTRE : l’existentialisme athée. « L’enfer, c’est les autres « Huit-clos
FICHE SARTRE
Selon Sartre, l’existence précède l’essence. Pas de nature humaine. L’homme se définit par ce qu’il fait, par ses actes. C’est le faire qui définit l’être de l’homme. La vie humaine n’a aucun sens. La vie se définit en terme d’échec. Philosophie de l’absurde : absurdité de la condition humaine, pas de raison d’être. « Tout existant naît sans raison, se prolonge par faiblesse et meurt par rencontre « : aspect nihiliste de la pensée de Sartre. MAIS philosophie de la liberté : pour Sartre, c’est l’homme qui crée le sens de son existence en posant des actes. L’homme crée ses valeurs. L’homme est libre ou il ne l’est pas : « Seul, j’ai décidé du bien, seul, j’ai décidé du mal « . Sartre rêve d’être un sujet absolu : divinisation du Moi. Il élimine Dieu : « Dieu est mort, plus de ciel, plus d’enfer, rien que la terre « : humanisme athée.
Sartre donne deux exemples pour autrui
- le regard : le regard d’autrui est toujours une source de timidité, de honte. Il est aliénant. Pour Sartre, être vu, c’est se sentir menacé, c’est être un objet d’ironie de réprobation. En outre, le fait d’être plusieurs à regarder la même chose : signe de rivalité.
- L’amour est nécessairement voué à l’échec. L’amour va toujours entre jalousie et indifférence.

« arbre est incliné par le vent » (ibid.

p.

321).

Me voici figé par le regard de l'autre qui me dérobe mes possibilités.J'avais, avant de regarder par le trou de la serrure et avant bien sûr que l'autre ne survienne, repéré un coin sombreoù j'avais la possibilité de me cacher.

J'avais même d'autres possibilités.

Mais à présent c'est trop tard et cefaisceau de possibilités qui définit la conscience (le pour-soi) se trouve comme fermé par le regard d'autrui.

Alorsque tous mes efforts visent à me poser comme non-objet, me différencier de l'en-soi, pour l'autre qui me regarde, jesuis pareil à un objet.

On comprend dès lors pourquoi le conflit apparaît à Sartre comme « l'essence de laconscience ».

Nous ne saurions dire plus explicitement que dans la perspective de Sartre, le conflit apparaît bel etbien comme étant au fondement de tout rapport avec autrui.

« Le conflit est le sens originel de l'être-pour-autrui »(ibid.

p.

431).

Mais devons-nous nous contenter de cette réponse ? Souvenons-nous de la phrase dans laquelle Sartre disaitqu'autrui était « le médiateur indispensable entre moi et moi-même ».

Ne manque-t-il pas quelque chose à cettephrase par ailleurs très forte ? Mais qu'est-ce qui peut bien manquer ? Sans doute le monde.

« Autrui n'est plustellement une liberté vue du dehors comme destinée et fatalité, un sujet rival d'un sujet, mais il est pris dans lecircuit qui le relie au Inonde, comme nous-mêmes, et par là aussi dans le circuit qui le relie à nous.

Et ce mondenous est commun, est intermonde » (Merleau-Ponty, Le Visible et l'Invisible, p.

322).

Parce que les analyses deMerleau-Ponty vont beaucoup plus loin que celles de Sartre en ce qui concerne l'appartenance commune d'autrui etde moi-même au monde, elles échappent à cet aspect unilatéral, si caractéristique de la réflexion sartrienne dansl'Etre et le Néant.

Si nous considérons à nouveau l'exemple du paysage, nous nous apercevons que le regard del'autre, s'il connaît bien mieux que moi ce paysage, loin de me dérober celui-ci, me permet au contraire de le mieuxregarder.

Le regard de l'autre peut me faire découvrir le paysage, il peut m'apprendre à regarder.

Si nous avions prisl'exemple d'un tableau, les choses dans ce cas auraient encore été plus nettes.

L'ego sartrien se présente commeun pur pour-soi.

C'est là, dit Merleau-Ponty, un ego désincarné.

Chez ce dernier, rien de tel.

Il insiste, à ladifférence de Sartre, sur l'ancrage de l'homme dans le monde.

Au fond, Sartre n'échappe guère au piège dusolipsisme, c'est-à-dire à la clôture du sujet sur lui-même : « chez Sartre c'est toujours moi qui fais la profondeur,qui la creuse, qui fais tout, et qui ferme du dedans ma prison sur moi » (Merleau-Ponty, Le Visible et l'Invisible, p.291).

Il est très vrai qu'il y a une médiation indispensable d'autrui entre moi et moi-même, mais il faut prendre gardede ne pas oublier la médiation tout aussi indispensable du monde entre autrui et moi-même.

C'est ainsi parce quetout rapport à autrui a lieu sur la toile de fond du monde que le conflit cesse d'être le fondement de ces rapports.Mais est-il possible que le conflit cesse d'être la base de tout rapport à autrui tant que l'on en reste à l'oppositionmoi-autrui ? Il semble bien que non.

Aussi n'est-ce point un hasard si, en modifiant la perspective sartrienne qui faitdu conflit l'horizon de n'importe lequel de nos rapports à autrui, Merleau-Ponty modifie du même coup la natureprofonde du rapport moi-autrui.

Merleau-Ponty ne parle plus comme le faisait Sartre du « problème d'autrui », ildéclare, lui : « Prenons les autres à leur apparition dans la chair du monde » (Signes, p.

22, c'est lui qui souligne).Ce changement de perspective atteste clairement que Merleau-Ponty, surtout dans ses derniers textes, s'éloignaitnon seulement du contexte existentiel, mais encore peut-être de celui de la philosophie du sujet.

Ce n'est en effetqu'an sein de ces deux contextes qu'il y a un « problème d'autrui ».

Pour en revenir à notre sujet, nous constatonsen suivant l'analyse de Merleau-Ponty que le conflit n'est pas au fondement de tous nos rapports avec autrui.

Celane signifie nullement — faut-il le préciser ? — que les rapports avec les autres soient des rapports angéliques.

Maisenfin ils sont là, les autres, et nous aussi.

Et c'est là, c'est-à-dire dans le monde, que nous nous rencontrons.La dernière question que fait naître le sujet qui nous est proposé est celle-ci : Qu'en est-il de la question : « leconflit est-il au fondement de tout rapport avec autrui ? » si c'est d'abord et avant tout à la base ou plutôt au plusprofond de nous-mêmes qu'il y a conflit ? L'idée d'un conflit à l'intérieur de l'être d'un homme n'est pas en soi uneidée bien nouvelle.

Pourtant l'aspect novateur de la théorie freudienne des pulsions ne doit pas être mini- misé.

Cen'est pas seulement entre l'individu et la société qu'il y a conflit, mais chaque individu porte en son sein la marquedu gigantesque conflit que se livrent Eros et Thanatos, la pulsion [nous rendons par ce terme l'allemand Trieb quel'on traduit généralement par « instinct »] de vie et celle de mort.

Ecoutons Freud nous préciser le sens de ces deuxconcepts-clés de la psychanalyse : « Après de longues hésitations, de longues tergiversations, nous avons résolude n'admettre l'existence que de deux pulsions fondamentales : l'Eros et la pulsion de destruction (Eros,Destruktionstrieb) (les pulsions, opposées l'une à l'autre, de conservation de soi et de conservation de l'espèce ainsique celles, également contraires, d'amour de soi et d'amour objectal entrent encore dans le cadre de l'Eros).

Le butde l'Eros est d'établir de toujours plus grandes unités afin de les conserver ; le but de l'autre pulsion, au contraire,est de briser tous les rapports, donc de détruire toute chose.

Il nous est permis de penser de la pulsion dedestruction que son but final est de ramener ce qui vit à l'état inorganique et c'est pourquoi nous l'appelons pulsionde mort (Todestrieb) » (Freud, Abrégé de Psychanalyse, P.U.F.

p.

8).

Ainsi, si d'une part certains conflits, tel celuidécrit par Freud ici, semblent indépassables et incontournables, et si d'autre part il existe, comme l'a bien montréHegel, une lutte pour être reconnu, cela ne veut pas dire pour autant que le conflit domine et détermine toutrapport à autrui, disons plutôt aux autres.

Le fait même de parler « des autres » et non plus d'autrui atteste que lesrapports avec autrui envisagés sous l'angle de l'affrontement des consciences cèdent la place à des rapports danslesquels, d'une façon directe ou indirecte, nous sommes tous en présence les uns des autres sur la toile de fond dumonde.. »

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