L'amour rend-il sage ?

            En fait l?amoureux tente bien plutôt de monopoliser toute son énergie pour se convaincre de son indifférence à la conduite de l?être aimé. Ce n?est que tardivement, après avoir souffert, que l?amoureux semble devenir apte à feindre et à jouer l?amour inconditionné et finalement l?indifférence. Comme si l?amoureux pouvait se rapporter à l?être aimé sur le mode de l?amitié (exemple type de relation qui peut-être inconditionnelle) ; dans Les caractères, La Bruyère (au chapitre « du c?ur ») s?emploie à dissocier radicalement tout rapprochement entre l?amour et l?amitié. L?amour est même comparé à une maladie qu?il est facile de contracter et dont il est difficile de guérir.             Dans Les 120 jours de Sodome Sade présente une galerie de personnages tous plus insensibles et terrifiants qui accomplissent diverses tortures et supplices sur leurs victimes. On peut relever qu?au détour Sade se moque de l?amour en en parodiant la figure institutionnelle qu?est le mariage : des noces sont en effet organisées entre les protagonistes, correspondant à des mises en scènes libertines et macabres. En incluant le mime de l?amour à leurs expériences les libertins s?en débarrassent de manière d?autant plus efficace, à moins que celui-ci ne les rattrape, ainsi qu?on le voit pour les personnages des Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos.             III- L?amour ne rend pas sage.               L?amour ne saurait rendre sage parce qu?il n?est pas d?ordre purement rationnel, l?image de l?amour maladie en trahit bien la dimension somatique, tandis que la sagesse est détachement et état d?équilibre, l?amour est au contraire corrélatif d?un état de déséquilibre. L?idée de passion implique bien celle de passivité, l?amoureux est dominé, mais cela n?implique en rien la notion de sagesse.