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La science ou la métaphysique peuvent elle expliquer mon existence ?

Publié le 27/02/2008

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La métaphysique comme la science sont des discours qui visent à fournir des explications quant à leur objet, c'est-à-dire à donner les causes de leur existence ou de fait qu'il soit tel qu'il est. Etant moi-même quelque chose qui existe, il semblerait donc évident que ces disciplines puissent au moins tenter de fournir les causes qui sont à l'origine de mon être et de ses déterminations.   Mais par « existence » on entend quelque chose de différent lorsqu'on l'applique aux êtres humains que lorsqu'on parle d'autres êtres. En effet, mon existence ne désigne pas uniquement le fait que je sois, que je fasse partie de la réalité, mais aussi que j'ai une vie au sens biologique du terme (que j'accomplisse un certain nombre d'activités vitales) d'une part, et d'autre part que j'ai une vie constituée par des choix, des événements, des projets, des sentiments, etc. Or si la science peut fournir un certain nombre d'explications sur mon existence naturelle, biologique, il semble qu'aucune science n'est pour objet ce qu'est d'exister comme humain, cette condition humaine. La métaphysique le peut-elle ? Il semblerait que non, puisqu'elle a pour objet l'être dans ce qu'il a de plus général et non les particularités qui constituent mon existence propre, ma manière d'être spécifique parmi les autres et les choses. Il y aurait donc quelque chose, dans ma spécificité, qui résisterait à tout discours rationnel ne fournissant que des explications générales.   Pourtant la métaphysique semble prétendre aux grandes questions dites existentielles qui portent sur l'origine de l'être et sur la destination de toute chose, en étudiant des concepts comme le monde, l'âme et Dieu. En ce sens, elle permettrait bien d'expliquer, c'est-à-dire de fournir les raisons, de ce qui fait que j'existe et à quoi cette existence va ou doit aboutir. Mais alors, la science et la métaphysique semblent en concurrence pour expliquer les différentes facettes de mon existence, alors que celle-ci forme un tout et doit être expliquée comme telle.   Le problème ici posé est de savoir en quelle mesure un discours rationnel peut-il fournir des raisons qui s'appliquent à mon expérience singulière du monde et de la vie. Ce discours, s'il existe, est-il rigoureusement scientifique, s'appuie-t-il plutôt sur la métaphysique, ou combine-t-il les deux ?

« l'homme a à charge ensuite de connaître.

C'est ainsi qu'il faut concevoir l'homme : il n'est pas un objet parmi lemonde mais un objet pour lequel il y a un monde, c'est-à-dire pas uniquement des choses mais des choses dotéesd'une signification, d'un sens.

Cela n'est possible que parce que l'être humain est libre, qu'il n'est pas uniquementdéterminé par le reste de l'être qui l'environne mais qu'il a une dimension de non-être : l'homme a toujours à devenirson être, son être n'est que sous forme de projet à devenir.

C'est cela qui permet d'agir et qui permet de former unmonde où les objets ont un sens – précisément vis-à-vis de ce projet.

Voilà la spécificité de l'existence de l'êtrehumain : elle est à prendre au sens étymologique d' ex-stare, ce qui se tient hors de soi, qui existe sous forme de non-être.C./ Mais alors, est-ce encore la métaphysique qui peut décrire cette forme d'existence et en rendre raison ? Non,car la métaphysique suppose non un monde défini par celui qui l'appréhende, mais un univers dont la réalité est fixéeet pareille pour tous.

En cherchant à décrire ce qui est commun à tout ce qui est, elle ne peut que passer à côté dece qui change selon la conscience de celui qui appréhende ce qui est.

Néanmoins, cette description n'échappe pas àtout discours rationnel.

Il existe en effet une discipline à prétention de science qui s'occupe de la manière dont laconscience constitue un monde à partir de ses intentions : la phénoménologie.

C'est de cette discipline, initiée parle philosophe allemand E.

Husserl, dont se réclame Sartre, pour rendre compte de la manière dont les expériences dechacun sont modelées pour former un ensemble d'objets dotés de signification.

On peut, à partir de là, rendre raisonde la manière dont chacun de nous existe sous sa forme particulière, en déterminant le projet qui l'anime et qui aété posé par sa liberté.

Mais on peut contester à la phénoménologie son statut de science indépendante et autonome.

En effet, si elledécrit comment chaque être humain existe, l'explique-t-elle pour autant ? Elle n'en donne pas les causes.

Pour cela,ne faut-il pas abandonner la métaphysique et la phénoménologie et chercher ce qui, dans les sciences sociales etdans la biologie, permet de déterminer cette activité, ce mode d'être, qu'est exister ? III./ Les sciences peuvent-elles expliquer le fait d'exister ? A./ La science moderne, parce qu'elle s'appuie sur l'expérience mais refuse l'introspection comme source légitime deconnaissance, semble incapable de pouvoir me donner une explication de ce que j'ai de plus intime, de plus proche :mon existence.

La science passe par l'objectivation de son objet : elle le place comme extérieur à soi pour pouvoirl'observer et l'examiner.

Peut-elle alors comprendre cette expérience du monde subjective qu'est l'existence d'unêtre humain ? Cela est possible si elle peut, dans son objet d'étude, déterminer les causes qui rendent une telleexpérience possible et explique pourquoi elle est telle qu'elle est.B./ Or les sciences positives semblent, en partie du moins capable de réaliser un tel projet.

Canguilhem, dans l'articlesur le « Le Vivant et son milieu » dans La Connaissance de la vie , remarque ainsi que le corps de chaque animal, notamment ses organes perceptifs, implique qu'il soit sensible à certains stimuli de son milieu et non à d'autres.

Lecomportement animal n'est pas une simple réaction mécanique à ce qui vient le stimuler de l'extérieur, mais laconfiguration d'un environnement en milieu, par prélèvement, ponction dans cet environnement de ce qui estimportant pour l'être vivant.

Ainsi par exemple pour la chauve-souris le monde n'est fait que d'infrasons qui indiquentles trajectoires de vol possibles et les sources probables de nourriture.

Son organisme n'est pas que l'union de sesmembres, c'est aussi ce qui configure son milieu ainsi.

Autrement dit, tout être vivant existe, est producteur d'unmonde dans lequel il vit, parce qu'il est doté d'un certain système physiologique de perception et d'action.

C'est bienà la biologie que revient, en premier lieu, de déterminer les causes de l'aspect que prend notre existence, c'est-à-dire le fait que nous ne soyons pas qu'un être dans le monde mais aussi un être au monde, qui produit un monde.C./ Mais pour les êtres humains, les sciences sociales viennent aussi remplir un grand rôle dans la découverte descauses de notre existence.

La sociologie par exemple, en montrant comment nos comportements et goûts sontdéterminés par des facteurs sociaux, vient aussi expliquer comment nous formons un monde et y agissons, bref,quelle est notre condition d'existence.

Bourdieu montre ainsi dans « Les Règles de l'art », au sein du recueil Raisons pratiques , que la trajectoire des différentes positions sociales qu'occupe un agent dans un champ social, comme la petite société littéraire de la fin du XIXe siècle français, n'est pas une question de choix artistique mais de l'état duchamp, lui-même déterminé par les conditions sociales de l'ensemble de la société contemporaine.

Si l'on accepte devoir ainsi nos existences objectivées et prises comme objet d'étude par les sciences, que ce soit la biologie ou lasociologie, il est sûr que l'on peut découvrir les causes qui font que non seulement nous existons, mais que nousexistons tels que nous sommes.

Ainsi, si la science ou la métaphysique peuvent expliquer notre existence, c'est au sens d'un « ou » exclusif : soitl'une soit l'autre permet de saisir ce qu'est pour nous qu'exister.

La description de cette activité qu'est exister estassurément bien accomplie par la métaphysique comme par la phénoménologie : pour moi, exister, ce n'est passimplement faire partie du monde, mais aussi lui donner sens, le configurer.

Mais pour comprendre les causes de cefait, l'expliquer réellement, il faut en passer à des sciences positives qui objectivent cette existence comme étantl'effet de certaines réalités matérielles – biologiques ou sociales.

On a certes perdu ainsi l'intimité et la subjectivitéde cette expérience d'existence, mais on peut ainsi voir que l'existence naturelle, spontanée, des vivants n'est pasradicalement différente de l'existence humaine.

Et ce que l'on a gagné, en mettant l'accent sur les causes quidéterminent notre mode d'être, c'est peut-être la possibilité de se libérer de leur contrainte.. »

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