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La poésie nous permet-elle de connaître le monde et les hommes ?

Publié le 11/06/2009

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Par « poésie «, nous entendons une forme littéraire qui se distingue de la prose par une exigence touchant a la forme du discours, celle-ci obéissant a des lois précises, formant des unités particulières que l’on nomme « vers «. Plus largement, la poésie est un usage particulier du langage qui consiste a rompre avec l’utilisation commune, et pourquoi pas triviale de la langue, de sorte a créer une expression qui mérite a bon droit le nom de « sacre « au sens étymologique du terme, a savoir de « coupé «, de « séparé «. La poésie est donc plus qu’un simple usage de la langue qui se singularise par rapport a l’usage habituel des locuteurs dans les conversations de tous les jours : elle est bien une langue dans la langue elle-même.

Connaître consiste à produire un discours sur un objet, discours qui a deux caractéristiques principales : d’une part, l’acte de connaître est le moyen de donner une définition de l’objet que l’on s’attache à étudier. De l’autre, connaître est le moyen d’avoir une action sur l’objet de connaissance, le moyen de le maîtriser.

Lorsque nous parlons du monde dans un sens général, comme objet de connaissance, nous pouvons entendre ce terme comme le réceptacle d’une très vaste extension d’êtres et d’objets. En effet, en parlant du monde en ces termes, nous parlons à la fois de toute la sphère des choses dont les hommes peuvent avoir une expérience sensible, mais aussi des relations que ces derniers ont entre eux (pensons par exemple à l’expression : « le monde social «).

Une définition possible de l’homme est celle d’ « animal rationnel «, ce qui implique deux choses : d’une part, que l’homme est un animal parmi les animaux, qu’il appartient à cette catégorie. De l’autre, que l’homme est pourvue d’une faculté, à savoir la raison, qui fait défaut aux autres animaux. La raison est la faculté de l’homme qui lui permet de comprendre le monde et lui-même, le moyen d’une interaction avec l’extériorité.

Lorsque nous posons la question « la poésie nous permet-elle de connaitre le monde et les hommes ? « nous posons une question qui peut à de nombreux égards nous surprendre. En effet, lorsque nous disons que la poésie est peut être un moyen de connaissance, nous tenons une thèse qui se heurte à de nombreuses critiques : bien souvent, la poésie a été considérée comme un discours menteur, sinon trompeur. Mais poésie et vérité peuvent être, nous le verrons au cours de ce travail, des termes moins antithétiques qu’ils le paraissent. En effet, la poésie est peut être un moyen privilégié de produire un discours vrai sur le monde et les hommes, car elle nous amène à les considérer d’une manière originale, nouvelle. Enfin, nous verrons que par delà le monde et les hommes, la poésie nous permet de connaitre une dimension en dehors de notre expérience sensible, puisqu’elle est créatrice d’un monde inouï.

 

« aucune connaissance.

En effet, l'œuvre d'art est éloignée « de trois niveaux de ce qui est réellement » ( La République , Livre X, 598b).

Car Platon distingue entre trois niveaux de réalité : ce qui est réellement (la forme intelligible) ; le phénomène existant (celui que nous apercevons de manière sensible) ; et le simulacre (la copieartificielle du phénomène existant).

Pour Platon, l'art ne nous apprend rien, car il ne produit que des faux semblants.Comme nous le lisons dans la République : « L'art de l'imitation est assurément loin du vrai, et apparemment, s'il s'exerce sur toutes choses, c'est parce qu'ilne touche qu'à une petite partie de chacune, et qui n'est qu'un fantôme.

Ainsi le peintre, affirmons-nous, nouspeindra un cordonnier, un menuisier, les autres artisans, alors qu'il ne connaît rien à leur art.

Cependant, pour peuqu'il soit bon peintre, s'il peignait un menuisier et le leur montrait de loin, il pourrait tromper au moins les enfantset les fous, en leur faisant croire que c'est véritablement un menuisier ».

La République , Livre X, 598b. De ceci nous pouvons tirer que le poète produit des artefacts toujours éloignés de plusieurs degrés de la vérité, etirrémédiablement voués à l'imperfection.

Par conséquent il introduit dans la vie des hommes en société, rassemblésdans une cité, une dimension de mensonge qui ne sert nullement à leur être ensemble mais serait davantagesusceptible de les troubler.

Dans la mesure où la poésie est une activité fondamentalement menteuse, trompeuse,elle ne saurait être considérée à juste titre comme un moyen de connaitre le monde et les hommes. II.

Cependant, la poésie peut bel et bien être considérée comme un moyen de connaissance a.

La poésie, moyen de connaitre le monde Cependant, il faut bien voir qu'une telle thèse est tributaire de l'inscription de notre réflexion dans le cadre de lapensée Platonicienne et notamment dans celui des différents degrés de réalité (la copie est plus éloignée de lavérité que l'artefact, lui-même plus loin de la vérité que l'idée).

Si nous sortons de cette pensée, peut-être quenotre réponse à la question posée évoluera-t-elle.

Dans La Poétique , Aristote écrit cette phrase célèbre « la poésie est une chose plus philosophique que l'histoire ».

En effet, alors que l'histoire est le récit du particulier, d'une réalisation effective et passée des potentialités du monde, la poésie est du vrai en général.

Faire de l'histoireconsiste à connaître la réalité en acte, alors que faire de la poésie suppose une connaissance générale de la réalitéau-delà de ses réalisations historiques.

Par conséquent, l'art a une valeur éducative car il présuppose uneconnaissance chez l'artiste (celui-ci est capable de considérer la possibilité, la virtualité des réalisations potentiellesdu réel ; l'historien, lui, ne raconte jamais que le particulier) ; mais également parce qu'il délivre à l'amateur d'art uneconnaissance.

Par exemple, en lisant La marmite de Plaute, le lecteur ne lira pas le portrait d'un avare singulier, mais de l' Avare dans sa généralité.

Allant plus loin, le plaisir que l'on prend aux œuvres d'art pour Aristote dérive de leur capacité à nous apprendre quelque chose : « (…) en effet, si l'on aime à voir des images, c'est qu'en les regardant on apprend à connaître et on conclut ce qu'est chaque chose comme lorsqu'on dit : celui-là, c'est lui ». Aristote, La Poétique . Nous dirons donc que la poésie nous permet bel et bien de connaitre le monde, dans la mesure où elle est un moyend'accès au domaine de la généralité. b.

La poésie, moyen de connaitre les hommes Allant plus loin, nous pouvons dire que c'est pour une autre raison que la poésie est un moyen de connaitre leshommes : parce qu'il n'y a pas de véritable expression en dehors d'elle.

En effet, la poésie est non seulement lemoyen optimal et privilégié de l'expression des sentiments, mais aussi le seul qui existe a proprement parler.Appuyons nous sur ce texte théorique de Mallarmé pour soutenir notre thèse : Un désir indéniable à l'époque est de séparer, comme en vue d'attributions différentes, le double état de la parole,brut ou immédiat ici, là essentiel .

Narrer, enseigner, même décrire, cela va et encore qu'à chacun suffirait peut- être, pour échanger toute pensée humaine, de prendre ou de mettre dans la main d'autrui en silence une pièce demonnaie, l'emploi élémentaire du discours dessert l'universel reportage dont, la Littérature exceptée, participe tout, entre les genres d'écrits contemporains .

A quoi bon la merveille de transposer un fait de nature en sa presque disparition vibratoire selon le jeu de la parole cependant, si ce n'est pour qu'en émane, sans la gêne d'unproche ou concret rappel, la notion pure ? Mallarmé, Avant dire au trait du vers de René Ghil A la lumière de ce texte, nous pouvons voir qu'en dehors de la poésie, n'existe que « l'universel reportage », c'est-à-dire un usage instrumental du langage, à l'intérieur duquel rien de personnel et de singulier ne se dit, et qui n'a. »

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