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La philosophie politique de MACHIAVEL

Publié le 30/10/2009

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Ce penseur politique qui réfléchit sur la psychologie et la morale de l'homme d'État reste en marge du mouvement de la Renaissance et de la Réforme. Pourtant il est très nécessaire de l'étudier quand on veut fixer les débuts de la pensée moderne. Avec lui, en effet, la politique devient une psychologie expérimentale. Machiavel, dit Gioberti, est « le Galilée de la Politique «. Il s'agit pour Machiavel de dégager à partir des faits des lois objectives — les lois de l'action politique réellement efficace : Nous sommes loin, ici, note M. Jankélévitch, du « simplisme grandiose et géométrique de la République platonicienne «. Il s'agit non de déduire d'un système a priori la meilleure forme de gouvernement mais d'étudier les faits tels qu'ils sont : « Ce qui est essentiellement moderne chez Machiavel c'est un sentiment aigu de la complexité du réel «.  Les faits étudiés sont ceux de l'histoire romaine tels que Tite-Live les rapporte (voilà le rôle de la culture antique et si l'on veut l'humanisme politique à côté de l'humanisme littéraire). Les faits sont surtout ceux de l'expérience personnelle de Machiavel : Machiavel, né à Florence le 3 mai 1469, dès l'âge de 25 ans s'intéresse à la politique. Il est dans l'opposition au moment où Savonarole gouverne Florence (1494-1498). En 1498, sous le régime du président, du « gonfalonnier « Soderini, il devient secrétaire à la 2e chancellerie : c'est une sorte de chef de cabinet chargé de toutes sortes de missions diplomatiques. En 1512 la chute de Soderini entraîne le retour au pouvoir des Médicis (que Savonarole avait naguère expulsés). Machiavel est en disgrâce. Impliqué dans une conspiration il subira même la torture de l'estrapade. On lui permet cependant de se retirer à San Casciano, près de Florence ; c'est dans cette retraite qu'il écrit son Discours sur la Première décade de Tite-Live (publié en 1520). Il interrompt ce travail pour écrire Le Prince dès 1513, ouvrage destiné à le réhabiliter auprès des maîtres de l'heure puisqu'il est dédié au jeune Julien de Médicis qui attend de son oncle, le pape Médicis Léon X, le gouvernement de quelque principauté. C'est à la demande du Cardinal Jules de Médicis (futur Clément VII) que Machiavel écrira encore une histoire de Florence. Il meurt en 1527.

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« et avec lui sa patrie.

Le pape Jules II se livra pendant tout son pontificat à la fureur et à l'impétuosité de soncaractère et comme les circonstances s'accordaient à merveille avec cette façon d'agir, il réussit dans toutes sesentreprises.

Fût-il survenu d'autres circonstances qui eussent demandé un autre génie, il se serait nécessairementperdu parce qu'il n'eut changé ni de caractère ni de conduite ».

Comme dit très justement M.

Jankélévitch:« Lemachiavélisme est la philosophie des moyens...

Il étend à la politique, à une politique sans éthique,un technicismeque les anciens réservaient généralement à l'agronomie, à la chirurgie ou à la rhétorique ».

Et si Machiavel parle dela virtu il s'agit d'une vertu qui reste en marge de la morale, d'une vertu qui est à la fois puissance et virtuosité, quiest le génie du grand politique capable d'exploiter ce que Machiavel appelle, la fortune, c'est-à-dire lescirconstances complexes et changeantes.

Dans l'Italie morcelée de son temps où royaumes et principautés passentde main en main au gré des combats, des alliances qui se nouent ou se dénouent, dans cette Italie dont la France,l'Espagne, les princes locaux se disputent confusément les lambeaux ensanglantés, la vieille idée chrétienne deprovidence paraît vide de sens : il ne reste plus que le foisonnement des hasards aveugles dont les chefs énergiquesdoivent savoir tirer parti.

A lire certaines pages de Machiavel on a le sentiment que pour lui il n'y a pas d'autre idéalque l'énergie et le succès.

Les actions efficaces, les victoires qui changent la face du monde, rendent dérisoires lescritiques moroses des moralistes.

Il fait au christianisme des objections qui préfigurent celles de Nietzsche.

« Notrereligion place le bonheur suprême dans l'humilité, l'abjection...

Si elle exige quelque force d'âme c'est plutôt celle quifait supporter les maux que celle qui porte aux fortes actions.

» Pourtant il n'est pas tout à fait exact de voir dans le machiavélisme une pure technique, une politique vide de toutemystique.

L'énergie que Machiavel exige du Prince n'est pas une « virtu » gratuite.

Mais la seule religion deMachiavel est le patriotisme.

S'il semble préférer la religion des païens au christianisme c'est parce que la premièreétait une religion de la cité, parce que la seconde empêche selon lui l'unité italienne (le pouvoir temporel de l'Égliseétant ici un des grands obstacles).

Ce que Machiavel appelle de tous ses vœux c'est un prince capable d'unifierl'Italie, de la délivrer des pillages et des misères de l'occupation étrangère.

Dans la dernière page du Prince qu'EdgarQuinet appelait la « Marseillaise du XVIe siècle » Machiavel s'exalte à la pensée de ce prince unificateur qu'il n'hésitepas à appeler le « rédempteur » de l'Italie.Même si Machiavel conçoit des fins politiques bien précises, même s'il veut avant tout le bonheur de la patrieitalienne, il reste que le choix des moyens soumis au critère de la seule efficacité, paraît étranger à toute morale.

Enréalité ceci indique surtout le pessimisme foncier de Machiavel.

Pour lui il faut seulement choisir le moindre mal, onne peut éviter totalement le mal « car l'ordre des choses humaines est tel que jamais on ne peut fuir uninconvénient sinon que pour en courir un autre ».

Si le prince — pour faire régner l'ordre, la paix, en définitive pourfaire du bien à son peuple — est contraint à l'occasion de commettre des actions cruelles ou fourbes, si en politiquela bonté est quelquefois catastrophique et la cruauté moins cruelle que l'humeur pacifique, c'est essentiellementparce que les nommes sont en majorité bêtes et méchants.

« Il est beaucoup plus sûr de se faire craindrequ'aimer...

Car on peut dire généralement une chose de tous les hommes qu'ils sont ingrats, changeants, dissimulés,» écrit Machiavel dans le Prince et il répète, dans le Discours : « Quiconque veut fonder un État et lui donner deslois doit supposer d'avance les hommes méchants ».

D'où le dilemme machiavélien : ou faire le bien avec les moyensdu bord c'est-à-dire à l'occasion la perfidie et la violence, ou bien se montrer doux et humain en toutescirconstances mais au prix de toute efficacité, de toute possibilité d'action réelle.

Tel est le grand problème qui sepose à notre époque comme à la sienne, que Machiavel a nettement posé : « Son grand mérite, écrit Mounin, n'estpas d'avoir résolu le dilemme des rapports entre la politique et la morale (ou bien une politique morale maisinefficace, ou bien une politique efficace mais immorale) c'est de l'avoir formulé de manière telle, cynique, éclatante,insoutenable, que le dilemme après lui ne pût pas être oublié ou esquivé.

». »

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