La disproportion ?

C?est en effet parce que le vivant est soumis à la reproduction, et donc à des changements dans le temps, que des erreurs deviennent possibles. La disproportion est donc un échec de la règle et de l?ordre de la nature, mais elle peut être comprise, et nous révèle, par l?écart qu?elle représente, ce qu?est la règle et finalité de la nature dans le vivant.   2° La disproportion caractérise le sentiment de l?homme face à ce qui le dépasse Pour Aristote, la disproportion qui apparaît dans les organismes mal formés nous apprend quelle est la finalité naturelle, la forme, mais elle demeure négative car elle marque un échec. De plus, la disproportion est présente comme telle dans la nature, et l?homme peut la comprendre. Mais il est possible de penser la disproportion comme le rapport que l?homme entretient avec la nature : elle réside dans le fait que l?homme sente sa petitesse, donc son manque de proportion, face à l?immensité et aux forces de la nature, mais aussi face à des constructions humaines, comme les pyramides égyptiennes. Elle est alors non pas un fait extérieur que l?homme pourrait comprendre, mais justement ce qu?il ne peut comprendre, car cela est en disproportion avec la capacité de sa raison. C?est ce que souligne Kant dans La critique de la faculté de juger. La disproportion de l?homme avec ce qui le dépasse, comme la force d?une tempête ou l?infini de la nature, crée un sentiment de sublime : contrairement au sentiment de beau, le sentiment de sublime éveillé par la disproportion est un déplaisir, car l?homme se sent écrasé par une réalité qui le renvoie à sa petitesse et à ses limites. Mais ce rapport à la disproportion n?est pas pour autant uniquement négatif, car ce sentiment montre aussi à l?homme que s?il ne peut comprendre ce qui lui est disproportionné, il peut néanmoins le penser : il est donc un indice que notre raison ne se limite pas au donné sensible, mais qu?elle possède une destination supra-sensible par l?attrait pour ce qui la dépasse. L?homme découvre en même temps que ce sentiment d?écrasement sa supériorité sur le sensible.