Devoir de Philosophie

HUME: superstition et puissance religieuse

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

hume
Ma première réflexion est que la superstition favorise la puissance des prêtres alors que l'enthousiasme s'y oppose autant et même plus que la saine raison ou la philosophie. La superstition, qui est fondée sur la crainte, la tristesse, l'abattement, conduit l'homme à se représenter sous des couleurs si méprisables, qu'il se trouve lui-même indigne d'approcher de la présence divine et que, naturellement, il cherche un recours auprès de quelque autre personne, qui, par la sainteté de sa vie ou peut-être par son impudence et sa fourberie, passe pour plus favorisée par la divinité. C'est à ce genre de personnes que les superstitieux confient leurs dévotions ; c'est à leurs soins qu'ils recommandent leurs prières, leurs demandes, leurs sacrifices ; et c'est par leur intermédiaire qu'ils espèrent rendre leurs requêtes dignes d'être acceptées par leur dieu courroucé. De là l'origine des prêtres, qu'on peut regarder avec raison comme l'invention d'une superstition vile et craintive, qui toujours défiante d'elle-même n'ose pas élever en offrande ses propres dévotions mais croit par ignorance se recommander à la divinité grâce à la méditation de ses soit-disant amis et serviteurs. Comme la superstition forme une part considérable de presque toutes les religions, et même des plus fanatiques, et qu'il n'y a rien sinon la philosophie qui soit capable de triompher complètement de ces terreurs inexplicables, il s'ensuit qu'on trouvera des prêtres dans presque toutes les sectes religieuses et que leur autorité sera toujours proportionnelle au plus ou moins de superstition qui y règne.HUME

Hume s'attache ici à un thème, la superstition, qui sera le thème privilégié des lumières qui cherchent à lutter contre les religions instituées comme le catholicisme, qui s'appuient sur des principes métaphysiques inconnaissables par l'homme. Il s'agit de faire revenir la raison pour lutter contre des dogmes irrationnels et autoritaires. Les deux ennemis des philosophes de cette époque sont alors la superstition et l'enthousiasme. Il s'agit, dans ce texte, en réalité pour lui de comprendre comment les prêtres et autres religieux parviennent à avoir autant de pouvoir sur les hommes. Fidèle à l'empirisme, doctrine qui postule que la naissance de toutes les idées et les connaissances s'appuient sur nos perceptions, Hume adopte, dans d'autres textes, une position plus critique sur l'existence de Dieu et la soumet si on peut dire à l'épreuve. Pourtant, ici, il n'est pas question de s'attarder sur l'existence ou non de Dieu, mais sur la part d'ignorance et de folie qui règne dans les différentes religions. Hume entend bien sûr lutter contre ce trop grand pouvoir accordé au religion et la philosophie est sûrement la meilleure manière d'y arriver. Rappelons pourtant que ce sont des religieux qui l'ont empêché de garder un poste dans une université et l'ont interdit d'enseignement. La superstition se définit généralement comme un sentiment de vénération fondé sur la crainte et l'ignorance, par lequel on est souvent porté à se former de faux devoirs et à mettre sa confiance dans des choses impuissantes. Comment Hume explique l'adoration des prêtres comme une superstition ? Quelle nature de l'homme peut rendre compte de cela ? Hume conteste-t-il alors le phénomène de la foi ? Est-il possible de purger les religions de ces superstitions ? Ce texte peut se décomposer en trois parties que nous allons essayer d'interroger : premièrement l'origine de la superstition, deuxièment l'existence des prêtres et troisièmement les relations entre superstition, religion et philosophie.

hume

« - Hume évoque ici une deuxième possibilité directement en rapport avec la religion : le cas de la tristesse et del'abattement.

Nous associons les deux états parce qu'ils se rapprochent tous deux du désespoir.

Dans cet état, biensûr, l'homme voit la réalité d'un mauvaise oeil.

Comme le dira Schopenhauer plus tard, la représentation du mondedépend de l'humeur du sujet.

« Rappelons-nous [...] sous quel air triste et sombre il nous apparaît, au contraire, lorsque le chagrin nous abat.

» Dans les moments où l'homme est soumis à un état mélancolique, son image de lui-même n'est guère glorieuse et il se voit plus misérable qu'il n'est, « sous des couleurs si méprisables ».

De fait, il sevoit très éloigné de Dieu, qui se veut un être bon et parfait et par suite, il pense se voir refuser la protection divine.Il se penche alors vers des hommes qu'il estime meilleurs que lui : les prêtres et autres personnes religieuses. Le rôle et l'existence des prêtres - L'homme donc se sent indigne et va se tourner vers les prêtres.

Ceux-ci, nous dit Hume, passent pour êtrefavorisés auprès de la divinité.

Deux raisons à cela : d'une part, ils vivent dans un dénuement et une pitié qui fontparaître leur vie meilleure, les prêtres et moines dédient en effet leur vie à Dieu et s'interdisent tout plaisir des senset de la chair.

L'opinion généralement admise, c'est que les religieux se coupent des désirs sexuels et des instinctsles plus vils des humains.

Ils ne commettent pas de pêchés puisque leur vie est séparée de la vie du reste deshumains.

Mais, le philosophe affirme que, d'autre part, ils sont perçus comme favorisés par « impudence etfourberie ».

Cela signifie que les prêtres sont des êtres calculateurs et manipulateurs.

La fourberie désigne en effetla disposition à tromper autrui par des ruses perfides.

Le terme « impudence », ici, étonne parce qu'il renvoie à uncomportement contraire à la bienséance.

Or, si les prêtres veulent tromper les autres, ils doivent justement montrerune dévotion et respecter les règles de bienséance.

On peut juste penser que Hume forme ici un jugement sur sesprêtres et qu'il les nomme impudents parce que jugements ils trompent les autres au sujet de Dieu et de leurdévotion. - Voyant ses hommes proches de Dieu, les hommes croient voir en eux une solution pour diriger la protection divinevers eux et vers leur famille.

Ils font tout pour s'attirer les bonnes attentions de ces prêtres et craignent ainsi tousles personnes supposées dans les bonnes dispositions de Dieu.

Nous l'avons dit, la superstition entraîne des fauxdevoirs.

Ici, les faux devoirs sont les rituels religieux, les sacrifices qui sont faits pour les religieux eux-mêmes et nonplus pour Dieu.

Hume parle bien de l'attitude devant ses prêtres comme d ' « une superstition vile et craintive ».L'homme étant persuadé que sa dévotion ne sera pas accepté et que seul, l'intermédiaire des prêtres leur donne lapossibilité de communier avec Dieu. - Enfin, les prêtres et dignitaires religieux, forts de ce pouvoir conféré par les autres, créent des dogmes et despratiques très strictes.

Nous connaissons tous la théorie des pêchés et les confessions nécessaires pour chaquehomme.

Michel Foucault dans son ouvrage, Histoire de la sexualité , montrera comment l'église faisait porter à chaque individu une culpabilité qu'il devait mettre en mot dans le confessional.

Ces dogmes et cette soumissionreprésente une entrave à la liberté et une interdiction pour chaque homme de penser par lui-même. Superstition, ignorance et philosophie - Hume emploie le mot d' « ignorance » pour parler de la superstition.

Cette dernière est en effet reliéetraditionnellement à l'ignorance.

C'est parce que l'homme manque de connaissance sur le monde qu'il en vient à fairedes fausses relations avec les choses.

Vico montre, dans La science nouvelle , que les premiers hommes totalement ignorants ont été effrayés par la foudre pour laquelle ils ne pouvaient avoir d'explication rationnelle et ont doncinventé des Dieux pour se protéger.

Aujourd'hui, par exemple, nous ne croyons plus que la foudre est un châtimentdivin parce que nous pouvons expliquer comment elle advient et ce qu'elle est.

Dès lors, n'y a-t-il pas un moyen decombattre la superstition en dissipant les ténèbres de l'ignorance ? - En effet, Hume voit dans la superstition le fond de toute religion et de toutes sectes.

Il peut paraître, pourl'époque, déplacé de concevoir la religion de manière négative.

Le terme de « secte » employé par Hume met bienen évidence pour nous, les dangers que créent l'extrême pouvoir accordé à certaines personnes.

Les sectescontemporaines effraient parce qu'elles coupent l'individu de toutes ses relations et le poussent parfois à des actesdangereux pour lui-même et pour d'autres.

Rappelons nous des affaires de suicide collectif.

L'autorité des prêtresest vécue par Hume comme une véritable menace et ce n'est pas tant la religion qu'il critique mais bien ces hommesqui ont une importance extrême dans la société.

Il ne faut pas oublier que Hume vit au XVIIIe siècle et qu'à cetteépoque, l'influence de la religion était énorme.

C'est notamment contre elle et pour la liberté de penser que lesphilosophes des lumières ont lutté. - Le but de Hume ici est donc de trouver un moyen pour faire disparaître la superstition et par suite l'autoritéabusive des religieux.

Or, dans le texte, il évoque un seul moyen : la philosophie.

Il affirme « qu'il n'y a rien sinon laphilosophie qui soit capable de triompher complètement de ces terreurs inexplicables.

» Il ne s'agit pas de prendre lareligion et les prêtres directement comme objet de critique.

La solution qu'il avance se trouve dans la disparition desterreurs inexplicables et donc de l'ignorance. Pour ce faire, Hume invente ce qu'il nomme une science de l'homme, qu'il développe dans sa philosophie : il s'agitd'appliquer les méthodes des autres sciences à l'homme pour notamment élaborer une théorie des passions.

Celle-cipourrait nous permettre de mieux agir sur les sentiments humains.

Il faut en effet, comprendre que la superstitionprend naissance dans l'affectivité du sujet, puisque nous l'avons dit, elle se fonde sur la crainte et la tristesse.

Dèslors, on peut se demander si la seule raison peut avoir des effets sur la superstition puisqu'elle ne se situe pas dansle même domaine et qu'un argument ne peut jamais vraiment enlevé les sentiments et émotions qui ont fait naître. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles