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HOBBES: Qu'est-ce qu'une bonne loi ?

Publié le 04/04/2005

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Mais qu'est-ce qu'une bonne loi? Par bonne loi, je n'entends pas une loi juste, car aucune loi ne peut être injuste. La loi est faite par le pouvoir souverain, et tout ce qui est fait par ce pouvoir est cautionné et reconnu pour sien par chaque membre du peuple: et ce que chacun veut ne saurait être dit injuste par personne. Il en est des lois de la République comme des lois des jeux: ce sur quoi les joueurs se sont accordés n'est pour aucun d'eux une injustice. Une bonne loi se caractérise par le fait qu'elle est, en même temps nécessaire au bien du peuple, et claire. En effet, le rôle des lois, qui ne sont que des règles revêtues d'une autorité, n'est pas d'entraver toute action volontaire, mais seulement de diriger et de contenir les mouvements des gens, de manière à éviter qu'emportés par l'impétuosité de leurs désirs, leur précipitation ou leur manque de discernement, ils ne se fassent du mal: ce sont comme des haies disposées non pour arrêter les voyageurs, mais pour les maintenir sur le chemin. C'est pourquoi si une loi n'est pas nécessaire, et que la vraie fin de toute loi lui fasse donc défaut, elle n'est pas bonne. HOBBES
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« Certes, il semble absurde qu'un même sujet qualifie d'injuste ce qu'il veut lui-même.

Mais le fait qu'il ne puisse pas«qualifier» sa volonté d'injuste suffit-il à assurer que cette volonté «est» juste?Dans la suite du texte, Hobbes utilise une comparaison entre les lois d'une République et les règles d'un jeu.

Le butde cette comparaison est de rendre sensible et évidente l'absurdité qu'il y aurait à qualifier d'injuste une loi.

Demême qu'il est contradictoire pour un joueur de qualifier d'injuste une règle qu'il accepte par ailleurs (ne serait-ceque par le fait même de jouer), de même il est absurde de juger injuste une loi qui représente sa propre volonté.Quelle est la valeur de cette comparaison? Elle a une fonction rhétorique, mais non démonstrative: elle rendperceptible l'argument utilisé, sans pour autant fonder les présupposés sur lesquels il repose.

En effet, si les joueursne qualifient pas d'injustes les règles sur lesquelles ils se sont accordés, rien n'empêche que d'autres les jugentinjustes, ou qu'elles soient injustes en soi.

Cette comparaison nous permet donc de reformuler le présupposéfondamental de Hobbes: le juste et l'injuste n'existent pas en soi.

Autrement dit, la justice n'est pas une valeurtranscendante à l'aune de laquelle on pourrait évaluer la légalité. 2.

La nécessité de la loi A.

Le rôle de la loi Hobbes dénie donc à la justice le statut de valeur transcendante.

Et ce faisant, il lui interdit de servir de critèred'appréciation.

Après cette réfutation, Hobbes ouvre la seconde partie du texte en posant sa propre thèse: lecritère d'appréciation des lois repose dans leur nécessité et leur clarté.

Hobbes ne développe pas explicitement lesecond critère dans ce texte.

C'est la nécessité qui est essentiellement envisagée.

Sans doute la clarté serattache-t-elle à la nécessité: la bonne loi est celle dont la nécessité s'impose clairement.D'emblée, cette nécessité est présentée comme relative à une fin.

La loi est donc un moyen en vue d'une fin poséecomme essentielle, et elle tire sa nécessité de sa capacité à accomplir cette fin.Qu'en est-il de cette fin, désignée comme «bien du peuple»? Comment la loi l'accomplit-elle? Tout le secondparagraphe répond à cette question en décrivant le rôle de la loi, sa fonction au sein d'un État.

En définissant la loicomme règle revêtue d'autorité, Hobbes lui dénie toute valeur transcendante à la décision politique.

Elle ne sedistingue de n'importe quelle autre règle (une règle de jeu par exemple) que par l'autorité dont elle bénéficie.

Cesont des conventions acceptées et appliquées, au besoin par la force.

Pour Hobbes, la légitimité de cette autoritéest indéniable, dès lors que l'on considère la fin visée par le législateur.

En d'autres termes, si la loi peut apparaîtreau sujet comme une contrainte extérieure, cette contrainte est nécessaire et légitime.Quelle est cette fin? Il ne s'agit pas de s'opposer, par principe, à tout mouvement volontaire et de brimer la libertédes sujets.

Au contraire même: la loi a pour fonction d'assurer la sécurité des sujets, en évitant qu'ils ne se fassentdu mal à eux-mêmes.

Le danger désigné par Hobbes réside donc dans les désirs ou les passions qui peuvent plus oumoins égarer les sujets.

Autrement dit, la loi est nécessaire au bien du peuple en tant qu'elle assure la sécurité dessujets contre leurs propres débordements. B.

La mécanique politique de la loi L'argument de Hobbes peut sembler condescendant et paternaliste dans sa formulation: le pouvoir souverain est iciimplicitement posé en position d'arbitre bienveillant, au-delà de la mêlée des passions qui agitent le peuple.

Làencore, on peut signaler un présupposé dans le texte: qu'est-ce qui permet d'assurer que le souverain est exemptédes passions qui agitent le peuple? Qu'il oeuvre effectivement au bien du peuple? Ce texte ne permet pas derépondre à cette question, et le présupposé demeure ici non fondé.Mais là encore, il semble que le but du texte ne consiste pas à expliciter ces présupposés, mais à rendre sensible etévidente une thèse philosophique.

Hobbes utilise en effet à nouveau une comparaison pour faire comprendre le rôlede la loi.

Cette comparaison (les haies dressées)permet de comprendre les lois sous un registre qui relève de la mécanique: les sujets sont comme des mobiles dontla direction est assurée par ces garde-fous que sont les lois.

La loi est donc comparée à un obstacle physiquepermettant d'assurer l'orientation des mouvements des sujets.La comparaison avec les haies dressées pour les voyageurs permet à Hobbes de relativiser l'aspect contraignant deslois en insistant sur leur rôle d'orientation pour le sujet.

Elle apparaît moins comme un obstacle que comme un guide.La comparaison permet enfin peut-être de préciser implicitement le second critère posé préalablement par Hobbes, àsavoir la clarté.

La loi est claire lorsque l'orientation qu'elle indique est clairement visible.Hobbes conclut le texte en réaffirmant le critère de la nécessité: la loi est bonne si elle est nécessaire, c'est-à-diresi et seulement si elle a pour fin d'assurer une orientation sûre et claire aux sujets. C.

La justice et la liberté à l'ombre de la décision politique L'intérêt et l'originalité de ce texte résident dans la tentative de légitimation de ce que l'on pourrait appeler un«décisionnisme politique».

En refusant la justice comme critère d'évaluation des lois, il tend en effet à montrer quela loi tire sa légitimité du seul fait qu'elle est décidée par le souverain.

L'argument de la fin nécessaire, proposé enlieu et place de la justice, fournit un critère de légitimité qui demeure néanmoins problématique.

Car si seul lelégislateur, par sa position privilégiée, est capable de voir le bien des sujets, personne n'est autorisé à contester sesdécisions.

Autrement dit, Hobbes pose un critère d'évaluation des lois, mais – au moins dans un premier temps – seulcelui qui fait les lois est véritablement en mesure de les évaluer.

On est donc renvoyé au présupposé déjà signalé,par-delà le critère proposé: comment assurer la sagesse du souverain?En outre, on peut s'interroger sur les conséquences de la thèse de Hobbes, notamment du point de vue de la. »

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