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HOBBES: L'invention du langage

Publié le 04/04/2005

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Comme l'expérience est la base de toute connaissance, de nouvelles expériences sont la source de nouvelles sciences, et les expériences accumulées doivent contribuer à les augmenter. Cela posé, tout ce qui arrive de neuf à un homme lui donne lieu d'espérer qu'il saura quelque chose qu'il ignorait auparavant. Cette espérance et cette attente d'une connaissance future que nous pouvons acquérir par tout ce qui nous arrive de nouveau et d'étrange est la passion que nous désignons sous le nom d'admiration. La même passion considérée comme un désir est ce qu'on nomme curiosité, qui n'est que le désir de savoir ou de connaître. Comme dans l'examen des facultés du jugement l'homme rompt toute communauté avec les bêtes par celle d'imposer des noms aux choses, il les surpasse encore par la passion de la curiosité; en effet quand une bête aperçoit quelque chose de nouveau et d'étrange pour elle, elle ne la considère uniquement que pour s'assurer si cette chose peut lui être utile ou lui nuire, en conséquence elle s'en approche ou la fuit; au lieu que l'homme, qui dans la plupart des événements se rappelle la manière dont ils ont été causés ou dont ils ont pris naissance, cherche le commencement ou la cause de tout ce qui se présente de neuf à lui. Cette passion d'admiration et de curiosité a produit non seulement l'invention des mots, mais encore la supposition des causes qui pouvaient engendrer toutes choses. Voilà la source de toute philosophie. HOBBES
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« « souffrir », la passion caractérise une forme de passivité du sujet.

L'admiration est provoquée en l'homme parle surgissement de l'étrange, autrement dit de l'inconnu, de l'inédit; l'homme ne le recherche pas activement.En effet, la recherche de l'étrange supposerait que l'on en possède déjà une représentation : il ne serait doncplus étrange.

Ainsi l'admiration est bien un principe irrationnel dont l'homme n'est pas l'origine volontaire.

Onpourrait néanmoins croire que ce qui est neuf, « étrange », non familier provoque plutôt de la crainte, voire del'effroi.

Mais comme les « nouvelles expériences » conduisent à de « nouvelles sciences », on est prisd'admiration car on en retire un savoir bénéfique, qui, comme tel, est un rempart à la crainte irrationnelle.

À unmoindre degré, en tant que désir simplement, l'admiration devient curiosité.

Ainsi, dans une perspectiveradicalement antiplatonicienne, Hobbes refuse toute origine métaphysiqueau désir de connaître.

Nous désirons connaître les lois qui régissent ce monde, nous désirons savoir l'origine deschoses simplement parce que nous avons constaté par l'expérience que nous sommes capables de savoir.

2.

L'admiration et la curiosité sont à la source de toute réflexion et de toute connaissance A.

L'homme et l'animal sont tous deux confrontés à la nouveautéIl s'agit alors de savoir en quoi le désir de connaître est le propre de l'homme, alors même qu'il est confronté à lanouveauté au même titre que les animaux.

L'une des spécificités du jugement que l'homme porte sur les choses,c'est qu'il leur « impose des noms ».

Hobbes pose ici que seul l'homme est capable de langage : son rapport auxchoses passe par la médiation des noms, et ces noms, en tant qu'ils sont « imposés aux choses », relèvent d'uneconvention ou d'une décision.

L'aptitude au langage permet de ramener l'inconnu au connu (puisqu'un mot permet deramener les cas particuliers sous un genre, et de classer, par exemple, l'individu x qui se présente devant moi dansle genre « homme »).

Cependant, cette aptitude ne suffit pas à rendre compte de l'actualisation du désir deconnaître.

En effet, être capable de connaître n'implique pas nécessairement que l'on désire connaître.

C'estpourquoi la distinction entre l'homme et l'animal réside également dans la « passion de la curiosité ».

Alors quel'animal ne se préoccupe que de l'utile ou du nuisible, pour sa propre survie et pour celle de son espèce, l'homme «surpasse » les bêtes par son désir de comprendre : son désir n'est pas uniquement désir de conservation biologique.Le rapport de l'animal aux choses nouvelles ou étranges est « unilatéral», et de ce fait, sa réaction l'est aussi : il «s'approche ou fuit » une chose nouvelle (un autre animal, un milieu, de la nourriture) selon qu'elle peut lui être utileou lui nuire.

L'animal n'est pas interpellé par la nouveauté. B.

L'homme se distingue de l'animal par le langage et par l'admirationL'homme, en revanche, est frappé par l'étrange, c'est-à-dire par ce qui est apparemment sans cause connue.

Il estanimé par la curiosité devant le spectacle de la nouveauté.

Son rapport au monde n'est donc pas seulementpragmatique, mais aussi théorique.

Doué de mémoire, il tire des leçons de ses expériences précédentes, parce qu'il «se rappelle » la manière dont les événements ont été causés ou comment ils ont pris naissance.

La mémoire de lacause et de l'origine des événements passés l'engage à chercher « le commencement ou la cause de tout ce qui seprésente de neuf à lui ». C.

La connaissance est propre à l'homme car lui seul est capable de curiositéLe désir de connaître, l'espérance d'une connaissance future, autrement dit le désir, l'espérance et l'attente deramener l'inconnu au connu engendre donc l'invention des mots – le langage –, mais également « la supposition descauses qui pouvaient engendrer toutes choses ».

En d'autres termes, devant la nouveauté, l'homme peutlégitimement espérer acquérir une connaissance nouvelle.

Or, celle-ci consistant en l'établissement de relations decause à effet, l'admiration et la curiosité conduisent l'homme à « supposer des causes » à l'événement neuf qui seproduit devant lui.

L'admiration et la curiosité sont « la source de toute philosophie », en ceci que toute philosophieest recherche des fondements et des causes, y compris la métaphysique (qui recherche des causes auxphénomènes au-delà des phénomènes). Conclusion Ainsi, Hobbes a mis en lumière l'origine du savoir (la passion d'admiration et de curiosité), en montrant comment laconnaissance se constitue (par l'expérience) et en quoi elle consiste (l'établissement de liens de cause à effet).

Laconnaissance rationnelle trouve donc sa source, son « moteur », dans un principe irrationnel.

Néanmoins, cettepassion n'a pas d'origine métaphysique : elle naît de la profonde originalité du rapport de l'homme à l'expérience.L'homme est le seul à être apte à la connaissance et à être animé du désir de connaître, car lui seul est doté demémoire.

C'est pourquoi le langage et la passion de l'admiration et de la curiosité, ainsi que le savoir qu'ilsautorisent, sont le propre de l'homme.. »

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