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HOBBES: Expérience et Universalité

Publié le 07/11/2009

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Lorsqu'un homme a observé assez souvent que les mêmes causes antécédentes sont suivies des mêmes conséquences, pour que toutes les fois qu'il voit l'antécédent il s'attende à voir la conséquence ; ou que lorsque qu'il voit la conséquence il compte qu'il y a eu le même antécédent, alors il dit que l'antécédent et le conséquent sont des signes l'un de l'autre ; c'est ainsi qu'il dit que les nuages sont des signes de la pluie qui doit venir, et que la pluie est un des signes des nuages passés. C'est dans la connaissance de ces signes, acquise par l'expérience, que l'on fait consister ordinairement la différence entre un homme et un autre homme relativement à la sagesse, nom par lequel on désigne communément la somme totale de l'habileté ou de la faculté de connaître ; mais c'est une erreur, car les signes ne sont que des conjectures ; leur certitude augmente et diminue suivant qu'ils ont plus ou moins souvent manqué ; ils ne sont jamais pleinement évidents. Quoiqu'un homme ait vu constamment jusqu'ici le jour et la nuit se succéder, cependant il n'est pas pour cela en droit de conclure qu'ils se succéderont toujours de même, ou qu'ils se sont ainsi succédé de toute éternité. L'expérience ne fournit aucune conclusion universelle. HOBBES

POUR DÉMARRER Dans la langue de l'époque, la dernière phrase du texte exprime la pensée de Hobbes : il n'est pas possible d'induire des lois ou des relations certaines et universelles à partir de l'expérience. Hobbes, dont la philosophie est empiriste, ne pense pas que les données de l'expérience conduisent à l'Universel. Conseils pratiques. C'est surtout le raisonnement qui s'avère ici intéressant. Vous veillerez à bien séparer les idées de Hobbes des exemples qu'il emploie pour éclairer sa démarche.

QUESTIONNEMENT INDICATIF • Que signifie « pour que «? • Que signifie ici « sagesse « ? • Qu'est-ce qu'une « conjecture « ? • Que signifie « universel « ? • Comment est conçue ici « l'expérience « ?

Cet extrait de De la Nature Humaine de Hobbes, 1640, reproduisant les paragraphes 9 et 10 traitent de l’expérience et de sa valeur notamment du point de vue scientifique. L’expérience est utilisée notamment par l’induction pour définir des vérités scientfiques. La question est alors d’évaluer la fécondité cognitive et gnoséologique d’une telle méthode. Dès lors on peut dire que c’est la méthode empiriste qui est en question, c’est-à-dire sa capacité à nous fournir des connaissances sûres sur le monde. Or c’est bien ce qu’entend remettre en cause Hobbes ici. Si la première partie du texte (du début de l’extrait à « les nuages sont des signes de la pluie qui doit venir, et que la pluie est un des signes des nuages passés «) tend à définir et expliquer le fond de cette méthode, la seconde partie (de « C'est dans la connaissance de ces signes « à « ils ne sont jamais pleinement évidents «) montrera le manque d’évidence de cette méthode, voire son incapacité à une fournir des jugements universels c’est-à-dire scientifiques sur le monde (Troisième partie : de « Quoiqu'un homme ait vu constamment jusqu'ici le jour et la nuit se succéder « à la fin du texte). C’est suivant ces trois moments logiques que nous entendons rendre compte du texte.

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« un jugement général sur la manière dont se comporte le monde.

Dès lors l'homme sage ou celui que l'on appellecommunément l'homme d'expériences est un homme qui a beaucoup vécu et qui donc est plus à même de former desinductions plus sûrs que les jeunes qui l'entourent.

On peut comprendre alors que l'induction n'est pas sûre pas elle-même.

Elle gagne en certitude à mesure que le nombre d'occurrences de liaisons entre A et B est observés.

De làs'explique alors l'existence d'une sagesse populaire qui est, somme toute, un enseignement technique relativement ànotre rapport avec le monde.

Il s'agit en outre d'une habilité, c'est-à-dire une capacité à produire de telsjugements.

Et donné que l'induction est censée fournir un savoir sur le monde extérieur elle est alors uneconnaissance.

C'est pour cela que sa fécondité scientifique en tant que méthode de recherche et de définition de lavérité peut être questionnée.b) Or selon Hobbes , croire en la scientificité de cette méthode qu'utilise pourtant nombre de scientifiques à son époque notamment dans les sciences physiques et naturelles relève de l'erreur.

Ainsi l'induction manque de sûreté etne peut jamais en aucun cas nous fournir une assise solide pour atteindre la vérité.

C'est-à-dire la connaissanceeffective du réel.

Ainsi cette méthode n'est pas valide et n'est pas scientifique pour Hobbes.

En effet, il ne parle pasde nécessité mais simplement de « conjectures ».

Autrement dit, cela signifie que loin d'être une connexionnécessaire entre deux éléments tel que l'on soit sûres que ces deux éléments vont bien toujours ensemble, on nepeut parler que de conjecture, c'est-à-dire que l'on sait simplement qu'il est probable ou que cela se produit le plussouvent.

Nous sommes loin alors de pouvoir définir une nécessité ni revendiquer par cette méthode un déterminismedans la nature.c) Ainsi il n'est pas certain que la présence de nuance signifie toujours la venue de la pluie.

De la même manièrel'orage n'est pas toujours accompagné de pluie.

C'est par ailleurs ce que l'on appelle des orages secs.

Il n'y a doncpas de signes et faire de l'induction une méthode scientifique se serait verser dans l'étude herméneutique de lanature, c'est-à-dire dans l'interprétation des éléments perceptibles de la nature.

C'est d'ailleurs suivant desprincipes inductifs que ce sont développés particulièrement les oracles supposant qu'un élément soit signe d'unautre.

La scientificité de l'induction peut donc clairement être remise en cause.

On comprend alors pourquoi l'hommesage est celui qui a le plus d'expériences.

En effet, l'induction repose sur l'habitude perceptive.

Elle est un effetpsychologique de la croyance.

Ainsi la conjonction est au mieux constante, mais on ne saurait affirmer qu'elle estnécessaire.

Elle n'est simplement que probable.

Transition : Ainsi l'induction n'est pas marquée par le sceau de l'évidence ni de la vérité.

Elle est source d'erreurs voire desuperstitions.

Elle n'est l'effet que de la croyance et repose donc sur un fondement purement psychologique : celuide la croyance et de l'habitude perceptive.

III – L'induction est probabiliste a) L'induction n'est pas alors assurée d'être vrai en tout temps et en tout lieu.

C'est bien ce que veut signifierHobbes avec l'exemple de la succession du jour et de la nuit.

Or cet exemple qui semble à première vue paradoxale voire choquant et absurde, ne l'est pas tant que cela et insiste voire met au jour justement cette habitude toutepsychologique que nous avons de croire en la nécessité de deux éléments parce qu'il en a toujours été ainsi.

Eneffet, jusqu'à présent, le jour et la nuit se sont toujours succédés, mais rien n'indique, à part l'expérience que cetteinduction se vérifiera toujours c'est-à-dire dans un temps très long.

Ainsi il est par exemple faux de penser quel'alternance du jour et de la nuit se fait en vingt-quatre heures.

En effet, plus l'on s'approche des pôles plus on peutremarquer que les jours ou les nuits s'allongent selon la période.

Ainsi, bien que l'expérience nous dise qu'il en esttoujours ainsi, on peut pas raisonnablement et scientifiquement en déterminer un jugement universel.b) En effet, comme Hobbes le conclut dans sa dernière phrase : « L'expérience ne fournit aucune conclusion universelle ».

Dire d'un jugement qu'il est universel c'est dire qu'il sera valable quel que soit le temps et le lieu.

Orrien ne nous permet d'affirmer cela en toute modestie.

L'induction n'est pas capable de nous assurer de l'existed'une nécessité.

Elle ne repose que sur l'habitude.

Au mieux, on pourra parler de très forte probabilité.

Ainsi on nepourra jamais exclure qu'une seule fois au moins il n'y ait pas violation de cette conjonction.

C'est pourquoi il vautmieux parler de conjonction constante que d'affirmer l'existence d'une nécessité ou d'une connexion nécessaireentre ces deux éléments.

A titre de méthode scientifique, l'induction n'est pas valable.

Conclusion : L'expérience et à travers elle l'induction qui est le jugement qui s'opère à partir d'elle n'a donc pas devaleur scientifique certaine.

Au mieux, il peut nous renseigner sur une habitude, c'est-à-dire une conjonctionconstante mais en aucun cas elle ne peut fournir l'idée d'une connexion nécessaire, c'est-à-dire définir un jugementuniversel.

La fécondité cognitive et gnoséologique de l'induction est donc presque nulle.

On ne saurait fonder unevéritable science dessus.

Il est important de voir que cet argument aura un très grand écho dans la traditionphilosophique puisqu'il permettra à Hume notamment de combattre non seulement l'empirisme simplement mais aussi les rationalistes avec le déterminisme au nom du scepticisme académique qui sera le sien.. »

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