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G. Duhamel a dit : « Le romancier est l'historien du présent, alors que l'historien est le romancier du passé. » Dans quelle mesure ce jugement peut-il s'appliquer à l'oeuvre de Balzac et à celle de Michelet ?

Publié le 30/03/2009

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balzac

Début — Depuis le romantisme certains rapports ont été aperçus entre l'histoire et le roman : l'historien, pour faire vivant, doit faire appel à l'imagination; le romancier, pour faire vrai, doit s'appuyer sur l'observation et le document. La définition proposée s'applique bien à Michelet et à Balzac.

  • 1. Application à Michelet :

 a) Michelet donne pour base à l'histoire la Science. Ses recherches aux Archives. L'histoire s'appuie sur la géographie et toute une vaste information.  b) Mais son œuvre est surtout celle d'une puissante imagination. Ses excès : « L'histoire visionnaire «.  c) Il est guidé par une large sympathie humaine. L'amour de la France « vue comme une âme et une personne «.

  • 2. Application à Balzac :

 a) Balzac fonde le roman sur l'observation du réel, les choses commencent d'exister dans le roman. Les hommes dans leur diversité individuelle et sociale.  b) Mais la Comédie humaine est tout un monde suscité par ce grand créateur de vivants. Son œuvre est celle de l'imagination et de la sympathie, don de s'identifier à ses personnages pour les recréer du dedans.

  • 3. Réserves nécessaires :

 Le roman est autre chose qu'une « tranche de vie « ; l'historien ne doit user qu'avec réserve de son imagination et se laisser guider par l'esprit critique.  Conclusion. — Le roman et l'histoire utilisent les mêmes facultés de l'esprit, mais en proportion inverse, et doivent rester distincts.

balzac

« ses chefs-d'œuvre.

Mais bientôt il se détourne du passé pour s'adonner à la peinture de la réalité contemporaine.

SaComédie humaine s'inscrit dans le cadre de la vie en France sous la Restauration et la Monarchie de Juillet.

Nullepart l'historien qui voudra faire revivre cette époque ne trouvera documents plus vifs, plus nombreux et plussignificatifs que dans l'œuvre du grand romancier.

C'est bien le cas de dire que, chez lui, le roman est plus vrai quel'histoire : la simple histoire des mœurs, plus ou moins abstraite ou faite de détails juxtaposés nous en apprendbeaucoup moins que la vie d'un César Birotteau, un baron Nucingen, un Philippe Bridau, un Goriot, un Grandet,représentatifs du négociant parisien, du banquier, du soudard, du petit bourgeois français au milieu du XIXe siècle.Leur histoire et celles de leur entourage, c'est bien de l'histoire qui aurait pu être, qui a certainement et maintes foisété, et qui fut par Balzac ressuscitée.L'imagination puissante de cet esprit créateur autant qu' « observateur » a fait cela.

Avec lui les chosescommencent d'exister dans le roman et les hommes sont vus dans leur diversité individuelle et sociale.

Balzac estsurtout un voyant.

Le privilège du génie c'est d'inventer juste.

Là encore l'intuition joue un grand rôle.

De sa table àécrire où il passait tant de jours et de nuits, comment a-t-il pu voir et décrire tant de choses et tant d'êtres ? Parsa vision intérieure, il les inventait d'après le réel.

Il s'est vanté, non sans raison, d'avoir « fait concurrence à l'étatcivil ».Le secret de cette vérité humaine de ses personnages, depuis les types les plus fortement caractérisés jusqu'à sesmoindres comparses, c'est qu'il leur communique la vie puissante qui l'animait lui-même.

Par là, du reste, commeMolière, il n'est pas seulement le peintre de son époque mais des passions et des vices éternels de l'homme.« Balzac est un grand romancier parce qu'il procédait par la sympathie » (Taine).

Nature ardente, éprise de la vie,faite pour comprendre toutes les passions, Balzac semble s'insinuer dans les replis intimes des âmes de ses héros : ildevient eux-mêmes.

D'où le frémissement de son œuvre.

On comprend qu'elle ait été pour ses contemporains «passionnante ».

Pour bien des lecteurs elle l'est encore.C'est cette chaleur communicative que nous retrouvons chez Michelet.Faut-il apporter des réserves au mot de Duhamel? Certainement oui.

Le romancier qui veut faire vrai a toujoursavantage à se conformer, dans une certaine mesure, aux méthodes de l'historien : l'objectivité.

L'informationexacte, l'observation attentive serviront de base au travail de l'imagination.Après Balzac Flaubert s'inspire scrupuleusement de ce souci de vérité.

On sait combien sa documentation étaitminutieuse.

Les naturalistes, après lui : les Concourt, Maupassant, Zola, Daudet, poussent très loin ce goût, voirecette manie des notes prises sur le vif.

Toutefois le roman est autre chose qu'une « tranche de vie ».

Un roman quine serait qu'un reportage de mœurs contemporaines serait bien superficiel et bien froid.

Le romancier doitnécessairement faire œuvre d'imagination.

Il pourra même transformer la réalité et nous entraîner au delà, dans ledomaine de la poésie, pour renforcer l'image qu'il veut donner de la vie D'autre part, le romancier pour animer cescréatures de son imagination est tenu de leur infuser un peu de son être, sous peine de rester inhumain, ce qui estarrivé aux naturalistes qui ne voulaient être que des « raconteurs » tout à fait absents de leurs récits.Par contre, si l'historien doit user de son imagination pour vivifier les documents, il ne devra recourir qu'avecbeaucoup de circonspection à cette brillante faculté qui devient facilement « maîtresse d'erreur et de fausseté ».C'est l'abus de l'imagination, cet abandon aux intuitions échauffées par des passions politiques ou religieuses quirend l'histoire de Michelet apocalyptique et en partie caduque.

La faculté directrice de l'historien c'est l'espritcritique, qui pèse les témoignages, démêle les causes et les conséquences, juge les événements et les hommes (lupoint de vue qu'il a adopté pour donner un sens au passé.Le romancier lui, n'a pas à expliquer les récits, à juger les personnages; moins il intervient dans son œuvre, meilleureelle est.

Peindre la vie est son seul objet.

Au lecteur de dégager la signification de sa peinture.Ainsi le roman et l'histoire utilisent les mêmes facultés de l'esprit mais en proportion inverse, et doivent resterdistincts.. »

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